Dossier spécial VoIP/ToIP : le tour de la question

0

Migration, technologies, avantages et limites, études de cas, idées reçues : Silicon.fr fait le tour des communications IP en 17 articles

Atouts et faiblesses des architectures de TOIP (1ère partie)

Malgré un fort battage à son sujet, le tout-IP, ou full-IP, semble encore une utopie. Pourtant, le secteur progressera forcément en ce sens. Côté architecture, pourquoi le Centrex IP se développe-t-il si lentement ?

Retour au sommaire

Les choses sont très claires, nous nous orientons immanquablement vers un monde tout IP. Si cela semble évident pour les Américains, qui le traduisent dans les actes, il en va différemment en Europe.

Le monde tout IP : une illusion ?

« Les Nord-Américains ne déploient que du full-IP et détestent la TOIP hybride, tandis que les Européens, plus hésitants sur la rupture (et peu encouragés), penchent plutôt pour le mode hybride. Il n’y a pas de modèle figé. Néanmoins, mieux vaut choisir une solution facilitant la migration vers le full-IP »,conseille Jean-Denis Garo. « Chez Aastra-Matra, le cœur de toutes nos solutions est équipé du même logiciel, ce qui facilite non seulement le choix entre hybride et full-IP, mais aussi la migration sans rupture. Cette année, nous ne sommes plus vraiment un équipementier et devenons finalement plutôt un éditeur de logiciels. »

D’autres expliquent autrement la lente ascension du tout-IP, comme Michel Dudet (Orange) : « Sur le terrain, les architectures sont plutôt mixtes. On note que le full-IP est parfois déployé sur les petites entreprises, mais cela reste rare. En effet, la fiabilité d’un PABX s’avère bien plus élevée que celle d’une architecture TOIP et informatique. Or, la grande majorité des entreprises refuse de prendre le risque d’une indisponibilité supérieure à quelques minutes par an ! » Un propos tranché que relativise Pierre Ardichvili, en soulignant les différences mixte/full-IP : « En full-IP, je connecte directement des postes IP sur le réseau relié à l’équipement, et non pas via une carte dans une armoire de PABX. Car dans ce cas, il reste toujours deux systèmes à administrer et à maintenir. On fait vraiment de la VOIP, et pas de la TOIP avec un réseau de communication intelligent. Cela signifie que même la signalisation et la gestion des appels sont gérées par l’application IP. Et ce jusqu’au poste client, qu’il s’agisse d’un PC, d’un Macintosh ou d’un PDA. Cependant, nos solutions permettent aussi de s’interfacer avec d’autres parties d’un parc hétérogène via des PABX. C’est même très fréquent. »

Pour Gilles Cordesse, le pragmatisme s’impose, car « le pur IP n’existe pas au niveau du client. C’est une notion de constructeurs. Et quoi qu’il en soit, on est encore obligés d’utiliser le monde TDM dans la quasi-totalité des cas. Et que dire dans le cas d‘une migration d’entreprise de 200 agences : sans TDM, impossible ! Actuellement, la possibilité de full-IP dans une entreprise est rarissime. Avec un réseau mondial totalement IP, cela deviendra possible. Mais il faudra avoir réglé les nombreux problèmes existants auparavant : QOS, sécurité, administration… En revanche, une installation en tout-IP dans un même bâtiment s’impose. Il serait même ridicule de ne pas tout basculer en IP (à part les quelques inévitables fax pour les comptables et juristes par exemple). »

Le Centrex IP existe-t-il vraiment ?

PourJean-Denis Garo, ce segment est installé et continuera à exister:« Aastra-Matra vend beaucoup de téléphones IP aux acteurs de Centrex IP. C’est donc une réalité. Et l’avènement du protocole IP profite du mode Centrex qui existe depuis plus de vingt ans. Mais il est difficile de pénétrer sur le marché, car il s’agit surtout de TPE ou de petites PME/PMI. Le Centrex IP ne va pas disparaître, mais certainement stagner au même niveau de part de marché. Il restera un choix possible aux côtés des logiciels Open Source comme Asterisk, des Box, de l’IPBX, etc. On note aussi quelques rares tentatives de Centrex IP chez de grands comptes. »

« Mutualisé ou dédié, l’IP Centrex proposé par un intégrateur ou un opérateur vise un marché de TPE, avec des offres à partir de 10 euros par mois et par utilisateur. De plus, une grande entreprise ne peut se permettre de ne plus disposer de communications en cas de panne d’une liaison ! Pour choisir entre Centrex IP et IPBX, les TPE devront choisir entre une offre packagée, moins chère et plus limitée, une offre avec plus de services et plus personnalisée. L’année 2007 a été difficile pour le Centrex IP, et le réseau intelligent n’est pas encore tout à fait mûr. D’ailleurs, Alcatel a installé de nombreux IPBX chez d’anciens clients de Centrex IP », témoigne Pierre-Antoine Thiébaut.

Pourtant, le segment Centrex IP est investi par des opérateurs nationaux d’envergure, comme le rappelle Patrice Giami : « L’accélération du marché est alimentée par les opérateurs de téléphonie mobile, comme les offres Centrex de Bouygues ou SFR. Des solutions qui apportent plus de crédibilité au segment du Centrex IP. »

Des services limités mais suffisants ?

Proposé par les opérateurs, le Centrex IP est diversement apprécié par des acteurs pourtant tous impliqués. Pour Michel Dudet ,« le Centrex a retrouvé une nouvelle jeunesse avec IP. Il propose de nouvelles possibilités et apporte une grande simplicité de déploiement et de gestion. De plus, il devient moins cher avec IP, avec de multiples avantages et moins de risques. La migration vers cette architecture est facile, et la maintenance globale et les mises à jour sont assurées par l‘opérateur. Les interfaces actuelles proposent une gestion des utilisateurs généralement plus évoluée que celle proposée par un IPBX. En effet, elle est créée par un opérateur qui fournit une prestation personnalisée, suivie et facturée par utilisateur. »

Opter pour le Centrex IP ou le PABX hébergé revient à disposer du téléphone dans l’entreprise sans passerelle ni logiciel réseau à maintenir. « Des options intéressantes si l’entreprise ne dispose ni d’équipe technique ni de compétences, et qu’elle ne souhaite gérer ni les logiciels ni leurs mises à jour… Néanmoins, l’entreprise devra vérifier si le niveau de service proposé répond à ses besoins actuels et à venir : un Centrex IP haut de gamme pourra proposer des services haut de gamme, et un Centrex IP bas de gamme… Quoi qu’il en soit, le Centrex IP propose moins de service que l’IPBX managé ou hébergé, car l’éventail de ses services se limite souvent au dénominateur commun de nombreux clients. Le décideur devra donc aussi se pencher sur l’ensemble de services proposés ou possibles, et pas uniquement sur le prix »,avertit Gilles Cordesse.

Pour Pierre Ardichvili « ce choix relève moins d’une question technologique que d’un choix d’investissement. Et tout dépend de ce que l’entreprise est prête à confier à un opérateur. Le Centrex IP peut toutefois poser des problèmes à une grande entreprise (ou PME/PMI). En effet, elle aura plus de difficultés pour obtenir un grand nombre de services à valeur ajoutée peu répandus. De plus, cette architecture rend complexe l’intégration de la téléphonie aux applications existantes du système informatique. Enfin, le client devient dépendant des services que propose l’opérateur ».

Patrice Giami, président de B3G, défend ce segment si malmené. « On constate tout de même quelques primo-accédants PME/PMI, car le Centrex IP génère des économies d’échelle intéressantes immédiates, suite à une analyse des coûts. Premier bénéfice, la convergence fixe/mobile. Ensuite, les possibilités de télétravail, car le Centrex IP propose la gratuité des communications entre le domicile et le bureau, avec récupération de l’environnement de travail du bureau sur son poste à la maison. De plus, le réseau privé virtuel voix offre la possibilité de passer directement les appels au service commercial, même géographiquement éloigné, ou au commercial en charge du dossier, même lors de déplacements. Et ce sans intermédiaire et sans que le client ne voie de différence. Une proximité qui améliore sensiblement la relation client. Enfin, son utilisation nécessite un minimum de formation, soit environ une heure pour la personne chargée d’administrer la téléphonie (pas forcément un technicien, et quinze minutes par utilisateur pour la prise en main. »