e-santé (3): la salle d’attente fait le plein dans le nuage

Coup sur coup, le salon HIT à Paris, semaine passée, et l’e-Health Week à Budapest, semaine précédente, ont promu le Cloud ‘Computing’ pour améliorer les soins et optimiser les dépenses de santé (3è partie)

Intel, EMC, HP, GE Healthcare, Hitachi Data Systems, Orange, Microsoft ou encore IBM… Les acteurs des technologies de l’information lorgnent le marché prometteur des systèmes d’information de la santé. Leur argument majeur :  il y a avantage à délivrer des solutions performantes pour le domaine des soins sur des infrastructures   «dans le nuage», ou ‘cloud computing’.

Les marchés les plus stratégiques sont bien évidemment ceux du déploiement des systèmes de dossiers patients électroniques ou EHR (Electronic Health Records) qui exigent une refonte et l’adoption de standards communs pour les équipements informatiques des professionnels de santé. Cela s’applique aussi à tous les organismes gestionnaires de la santé.

Les appels d’offre et les investissements concernés sont massifs. Mais les marges de manœuvres sont étroites et la rentabilité peu assurée.  En revanche, tout ce petit monde de l’informatique de santé est formel : une grande partie de l’ e-Santé sera dans le nuage à terme.
En effet, seule une informatique à taille variable, répercutant la charge de la gestion des équipements, serait adéquate: mises à jour, ajustements aux pics de demande mais aussi sécurisation des données, vers le fournisseur ou prestataire informatique.

Intel et la pénurie des experts cliniques
Le ‘cloud computing‘, en distribuant la compétence médicale à l’échelle de la planète, pourrait également résoudre un problème commun à toutes les régions du monde. Ce que Intel nomme « une pénurie significative d’expertise clinique dans le monde ». Pour Intel, « un nuage médical sécurisé peu étendre significativement la recherche d’expertise médicale à travers une région du monde, au travers de la coordination des soins, d’outils distribués d’aide à la décision clinique, une meilleure répartition ou triage des patients, une meilleure adéquation des ressources médicales entre zones rurales et centres urbains ».
Se fondant sur la capacité de ses processeurs et des systèmes d’exploitation à délivrer de la virtualisation, Intel en propose une version dite « sécurisée », adaptée aux problématiques sociétales des systèmes d’information santé. La solution eSanté d’Intel utilise la technologie Intel Trusted Execution Technology (TXT): elle apporte des pools de ressources sécurisées permettant à la fois de garantir la permanence et l’évolutivité du système, mais aussi une meilleure protection contre les attaques et les malveillances.
Avec cette innovation, le géant des processeurs souhaite mettre en place un écosystème complet de partenaires industriels, notamment auprès des spécialistes de l’eSanté.

EMC avec Documentum et RSA…
EMC
dispose déjà d’un atout, avec son fonds d’applications ancré dans la virtualisation, avec VMWare, des options de stockage massif,   de la gestion documentaire avec Documentum, de la protection de l’information avec RSA et de la gestion globale des informations.
Dans le domaine de la santé, EMC propose également la fourniture des prestations d’eSanté comme un service (« eHealth as a Service »). Il prétend ainsi apporter dès aujourd’hui aux acteurs publics et privés de la santé toute la gamme des solutions pour la eSanté à la demande, de l’infrastructure de sauvegarde au terminal au pied du patient.

IBM, le suivi temps réel des patients
IBM décrivait,  fin avril, la révolution que constitue l’information à la demande pour le suivi en quasi temps-réel des patients.  « La nouvelle médecine basée sur l’information,  lit-on dans une présentation de la firme, améliore profondément  les pratiques médicales et pharmaceutiques avec la masse de connaissances générée de l’agrégation de multiples données cliniques et biomédicales. Ce phénomène va accélérer les découvertes dans les pratiques cliniques. Il va permettre un accès complet et presque temps réels à l’historique du patient et à ses données médicales. Des prescriptions et des traitements mieux ciblés, basés sur le profil médical de chaque patient, pourront être délivrés tout en évitant les médications dangereuses et en réduisant les rejets de traitement ».

Seul problème, les règlementations en la matière sont drastiques : le risque « patient » pourrait donc être en partie transféré de l’opérateur de santé à l’opérateur du ‘datacenter’ , voire à l’opérateur lui-même. C’est déjà le cas en France avec les « hébergeurs de données de santé » qui doivent faire l’objet d’une certification auprès de l’ASIP Santé.
C’est également ce que tentent de démontrer des opérateurs comme Orange (France Télécom) au sein d’instances internationales de régulation et de coordination comme la HiMSS (Healthcare Information and Management Systems Society), l’IHE (Integrating the Healthcare Enterprise), ou encore  le COCIR (European Coordination Committee of the Radiological, Electromedical and Healthcare IT Industry), en y pronant un rééquilibrage des forces dans les instances de régulation. Il est cependant à noter l’absence ou l’éloignement notable des professionnels de santé eux-mêmes, en dehors des DSI des grands centres ou réseaux hospitaliers.

Dès lors, chacun déploie son savoir-faire. Microsoft parle ainsi de « Cloud health » et met en avant une première réalisation au Royaume Uni, basée sur sa plateforme Sharepoint, mis en œuvre pour la NHS.
De même, Oracle a présenté fin avril sa plate-forme ‘cloud’ pour offrir des ressources à la demande à ses applications scientifiques. Ce Health Science Cloud d’Oracle vise tous les acteurs du calcul scientifique et de la recherche dans la santé. Elle aussi exploite pleinement des technologies issues de récentes acquisition, notamment les serveurs, les outils de stockage et les middleware issus de l’américain Sun (aujourd’hui Oracle).

Hitachi Data Systems s’appuie, quant à lui, sur ses multiples partenariats avec bon nombre de ces fournisseurs de solutions propriétaires, mais aussi sur son application des standards en place: le géant japonais propose des offres dédiées au marché européen, notamment via son partenaire de services informatiques Computacenter. Les deux entités ont ainsi présenté la plate-forme Hitachi Clinical Repository (HCR), un référentiel en ligne qui permet de protéger, de rechercher et d’extraire des informations à travers l’ensemble des données médicales d’un établissement de santé.  Par elle-même, la connexion des établissements de santé entre eux ou avec les instances de l’eSanté prépare la voix aux solutions Cloud et initie une belle bagarre à l’entrée de salles d’attente, pour les équipes commerciales des fournisseurs informatiques.