Fibre : l'Arcep fixe les règles du jeu

Après avoir consulter les acteurs, le régulateur publie ses recommandations

L’horizon se dégage pour la fibre optique en France. Après une longue période d’incertitude, liée à une réglementation assez floue, l’Arcep le régulateur des télécoms, publie ce vendredi ses recommandations après avoir consulter le secteur. Les points les plus sensibles y sont abordés : de quoi accélérer les déploiements ?

En guise d’introduction, l’Arcep souligne que « le déploiement d’une nouvelle boucle locale en fibre est un enjeu technique, économique et concurrentiel majeur pour notre pays. Il s’agit d’un investissement de long terme qui nécessitera un nombre significatif d’années et de milliards d’euros, à l’instar du déploiement du réseau cuivre ».

Mutualisation du génie civil

C’est une question essentielle puisque le génie civil (les fourreaux, les tranchées) constitue la dépense la plus importante dans un projet de déploiement de fibre optique. Le régulateur s’est prononcé très tôt pour que France Télécom fournisse un accès non discriminatoire à son génie civil, le plus important avec celui de Numericable. L’opérateur historique a déjà annoncé une offre en ce sens. Mais cette dernière, fortement critiquée, devait être revue, estime l’Autorité.

Aujourd’hui, l’Arcep note que France Télécom a publié le 15 septembre 2008 une nouvelle offre de référence. Celle-ci est « opérationnelle et (les travaux techniques) ont confirmé le niveau satisfaisant de disponibilité du génie civil. Tous les opérateurs, quelle que soit leur technologie, peuvent désormais utiliser les fourreaux de France Télécom pour déployer la fibre ». Reste à connaître l’avis de la concurrence.

La mutualisation de la partie terminale du réseau

Deuxième point sensible : où mutualiser le réseau, au pied de l’immeuble, dans l’immeuble ? Cette question, jusqu’à aujourd’hui non réglée, a pénalisé les déploiements. Pour le régulateur, il n’y a pas de solution unique.

« Dans une phase de démarrage, l’Autorité privilégie la recherche de solutions par les acteurs, sur la base de recommandations qu’elle publie aujourd’hui. De premiers accords ont déjà été signés. D’autres accords sont nécessaires pour que tous les opérateurs puissent démarrer.Il s’agit de tester les différentes solutions sur quelques grandes agglomérations, c’est-à-dire à une échelle suffisante pour dégager des retours d’expérience sans pour autant préjuger de la suite ».

Dans ses recommandations, l’Autorité préconise notamment que « le premier opérateur équipant un immeuble propose aux autres opérateurs de poser des fibres supplémentaires pour leur compte sur la partie terminale. Cette option viendrait le cas échéant en complément des solutions de mutualisation envisagées par les opérateurs et serait préfinancée par les opérateurs intéressés. Compte tenu de son surcoût limité et de sa compatibilité avec les choix techniques de l’ensemble des opérateurs, il s’agit d’une pratique de bonne gestion préservant l’avenir ».

Rappelons qu’Orange et SFR ont signé un accord de mutualisation qui prévoit que le point de mutualisation sera implanté « le plus près possible des logements selon des critères opérationnels pragmatiques, en fonction de la taille et du type de logement, et en tenant compte des contraintes d’accessibilité et d’occupation du domaine public ».

Relations avec les propriétaires

Pour encadrer les déploiements et les relations avec les propriétaires et les syndics, l’Arcep propose aujourd’hui « une convention type conciliant les attentes formulées par les acteurs. Ce document pose les garanties essentielles aux propriétaires tout en limitant les lourdeurs administratives pour les opérateurs. Il permet d’offrir aux propriétaires et aux opérateurs un cadre contractuel de référence répondant aux principes posés par la loi. La convention type peut être utilisée dès à présent par les acteurs ».

Surveillance

Toutes ces mesures sont censées dynamiser le secteur. Pour rappel, Free a annoncé qu’il comptait investir 1 milliard d’euros dans la fibre d’ici 2012 dont 300 à 400 millions pour 2008-2009. Neuf Cegetel (SFR) a annoncé un investissement de 300 millions d’euros d’ici 2009. Pour Orange, les investissements cumulés pour la période 2007-2008 sont évalués à 270 millions d’euros mais l’opérateur historique a décidé de lever le pied et de retarder ses déploiements d’au moins un an, compte tenu du flou réglementaire qui semble aujourd’hui être levé. Il compte au 30 juin 14.000 abonnés à la fibre.

Pour autant, l’Arcep souligne qu’elle sera « particulièrement vigilante à ce qu’aucun opérateur ne dispose d’avantages injustifiés dans le déploiement de la fibre, que ce soit en termes d’avance de déploiement, de capacité à tirer la fibre dans le génie civil ou de faculté à démarcher les immeubles et les clients ».

D’ici la fin de l’année, l’Autorité mettra en place un tableau de bord trimestriel du très haut débit pour suivre l’avancement des déploiements et de la mutualisation ainsi que l’utilisation des fourreaux de France Télécom.