Fibre optique : l’Europe va poursuivre l’Allemagne

La menace pendait au nez de Berlin depuis plusieurs mois déjà…

Berlin devait s’y attendre, c’est désormais une réalité. La Commission européenne va poursuivre l’Allemagne au sujet de la fibre optique, a déclaré une source de l’Union européenne.

« La Commission défèrera l’Allemagne devant la Cour de Justice européenne en juin, en raison des vacances judiciaires », a dit la source.

La procédure sera longue, mais elle a été enclenchée. Rappel des faits. En 2006, Deutsche Telekom décide d’investir 3 milliards d’euros pour déployer un réseau en fibre optique et proposer à terme le très haut débit à 100 Mbits/s.

Mais l’opérateur historique considère que cet investissement colossal doit lui permettre d’avoir l’exclusivité de ce réseau, au moins pendant quelques années. En clair, il refuse toute régulation dans ce domaine.

Il a obtenu le soutien du gouvernement qui a donné son feu vert pour une loi le protégeant de la concurrence. Une loi qui déplaît fortement à la Commission européenne.

Fin 2006, Bruxelles prépare une procédure d’infraction contre l’Allemagne. Une réunion organisée entre la Commission européenne et des membres du gouvernement allemand ne débouche sur rien. Le ministre allemand des Finances s’est défendu de mettre en place un monopole pour protéger Deutsche Telekom mais a estimé que l’entreprise avait le droit de récolter le fruit de son travail de « pionnier. »

Mais Viviane Reding, le commissaire européen aux Télécommunications n’est pas de cet avis. Et précise ses menaces. Malgré de nouvelles tractations, le gouvernement allemand ne cède pas. En mai dernier, la Commission transmet au gouvernement allemand un « avis motivé », soulignant ses préoccupations vis-à-vis de cette loi.

Il s’agissait de la dernière étape avant que le dossier ne soit porté devant la Cour de justice européenne. Ce qui est aujourd’hui fait.

Rappelons qu’en France, il n’existe pas de telle loi, mais l’opérateur historique partage à peu près la même position que son homologue, et néanmoins concurrent, allemand. France Télécom a ainsi à plusieurs reprises déclaré qu’en contrepartie de ses investissements, il entendait ne pas partager dans un premier temps son réseau. C’est une volonté clairement affichée par Didier Lombard, président de France Télécom. Il souhaite que les marchés émergents, ne soient pas « sur-régulés », sous peine d’entraver le développement technologique et commercial de l’opérateur.

Pour autant, le groupe français est en opposition avec le régulateur, l’Arcep, qui explique: « Un scénario de développement de fibre dont les modalités conduiraient, de droit ou de fait, à une re-monopolisation du marché du haut débit professionnel, ne serait pas conforme aux objectifs fondamentaux de la régulation. A moyen terme, tant les entreprises individuellement, que la compétitivité de la France dans son ensemble, en paieraient le prix ».

Là encore, la position de l’opérateur historique est soutenue par le gouvernement. Pour « déployer rapidement » un réseau en fibre optique, « il faut laisser un avantage à celui qui prend le risque de l’investissement « , déclarait il y a un an François Loos, ministre de l’Industrie. On retrouve ainsi Bruxelles, face à l’axe Paris-Berlin…

Mais changement de gouvernement oblige, la position française a peut-être évolué. La nouvelle ministre de l’Economie, Christine Lagarde, ne s’est pas encore prononcée sur la question.