Formation professionnelle : le « oui, mais… » du numérique français

Syntec Numérique et Tech in France saluent la direction prise par le gouvernement pour réformer la formation professionnelle. Mais ils restent vigilants quant aux moyens.

Accès simplifié, accompagnement renforcé, gouvernance repensée… Les principaux axes de la réforme de la formation professionnelle présentés lundi par la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, ont été bien accueillis par les représentants d’entreprises du numérique. Toutefois, des inquiétudes demeurent, selon Tech In France et Syntec Numérique.

Tech In France, porte-parole d’éditeurs de logiciels et solutions internet, salue dans son communiqué « la direction prise par le gouvernement, mais demande des engagements plus ambitieux ». De son côté, Syntec Numérique, qui représente ESN, éditeurs et sociétés de conseil en technologies, se réjouit de « l’impulsion donnée par le gouvernement pour rendre plus agile notre système de formation professionnelle ». Le syndicat patronal s’enorgueillit « de la reprise d’une de ses propositions » sur le compte personnel de formation (CPF).

La mesure du gouvernement vise à créditer le CPF non pas d’heures de formation, mais d’une somme (500 euros par an, plafonné à 5000 euros sur dix ans, ou 800 euros, plafonné à 8000 euros pour les personnes « sans qualification »). Le dispositif sera couplé à une application permettant de s’inscrire à une formation et de la payer directement, « sans appel à un intermédiaire et sans validation administrative », a expliqué lundi la ministre du Travail. L’application proposera un ensemble d’informations au titulaire du compte (droits acquis, offre de formation par bassin d’emploi, taux d’insertion professionnelle…).

Pour Syntec Numérique, cette mesure permettra de transformer le CPF « en véritable compte-épargne formation numérique ». Un CPF « individualisé, monétaire, potentiellement abondé par l’entreprise et par la personne et directement branché sur l’offre de formation ».

« On ne peut plus former aux métiers du 21e siècle avec un système kafkaïen et illisible hérité des Trente Glorieuses et de la loi de 1971. Il convient cependant de préserver un équilibre entre les choix de l’individu, les besoins en compétences des entreprises et la régulation du système par l’État », a tempéré Godefroy de Bentzmann, président de Syntec Numérique.

Vers un crédit d’impôt formation ?

La gouvernance repensée du système à venir pose question. Syntec Numérique dit rester « attentif au transfert de la collecte des fonds de la formation aux URSSAF et celui de la péréquation interprofessionnelle à la nouvelle agence [de régulation] France Compétences, c’est-à-dire l’État, qui prendra le contrôle de la redistribution des sommes collectées ».

Le syndicat professionnel s’inquiète ainsi du risque qu’elles ne soient pas intégralement reversées aux entreprises enregistrant une forte croissance de leur masse salariale.

Tech In France aussi s’inquiète des moyens dont disposeront les entreprises du secteur pour maintenir à niveau et développer les compétences de leurs collaborateurs.

Certes, la réforme comporte « de nombreux aspects positifs », parmi lesquels : l’accompagnement des jeunes diplômés à l’évolution des métiers et aux transformations portées par le numérique, le renforcement des droits à la formation (à travers la modernisation du CPF) ou encore la simplification des démarches administratives.

« Toutefois, en l’état, la réforme ne répond pas à la grande incertitude que rencontrent les entreprises du secteur numérique sur les moyens financiers qui resteront à leur disposition pour financer leurs besoins en formation », souligne l’association présidée par Bertrand Diard.

Pour assurer aux entreprises les moyens adéquats à leurs besoins en formation, Tech In France souhaite que la réforme aille plus loin et propose de créer un « crédit impôt formation » orienté sur les emplois  « innovants ». Ou encore de créer un label « entreprise formatrice numérique » pour valoriser celles qui priorisent  l’évolution des compétences.

Tech In France milite, enfin, pour une plus grande implication des entreprises de la filière numérique dans les parcours universitaires et de formation.

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