Guy Mamou-Mani, Syntec Numérique : « le gouvernement a mis le numérique à la hauteur de l’industrie »

Après la promotion d’Arnaud Montebourg à Bercy, le numérique demeure une priorité du gouvernement Valls, se félicite Guy Mamou-Mani. Mais le président de Syntec Numérique, syndicat patronal des SSII, sociétés de conseil en technologie et éditeurs de logiciels, s’interroge sur la non-reconduction de Fleur Pellerin à la tête d’un ministère dédié.

Arnaud Montebourg est désormais chargé de l’Économie, du Redressement productif et du Numérique à Bercy. Les initiatives engagées par son ancienne ministre déléguée, Fleur Pellerin, seront-elles poursuivies ? Un secrétariat d’État au numérique va-t-il être créé ? Guy Mamou-Mani, co-dirigeant de Groupe Open et président du syndicat patronal Syntec Numérique, s’interroge sur les futures orientations du nouveau gouvernement.

Silicon.fr – Arnaud Montebourg va piloter la politique numérique du gouvernement de Manuel Valls, depuis Bercy. Son ancienne ministre déléguée au Numérique, Fleur Pellerin, passe au Commerce extérieur. Quelles sont vos réactions à ce remaniement ?

Guy Mamou-Mani – Tout d’abord, le fait de placer le Numérique à la hauteur de l’Industrie est une bonne chose. La transformation numérique de la France constitue donc bien une des priorités du gouvernement en place. La filière s’en félicite. En revanche, nous sommes très déçus que Fleur Pellerin, ministre déléguée en charge des PME, de l’Innovation et de l’Économie numérique sous le gouvernement Ayrault, n’ait pas été reconduite dans ses fonctions. Et ce alors même que les professionnels du numérique saluent sa compréhension des enjeux et soutiennent les initiatives qu’elle a lancé pour promouvoir la filière à l’international, dont le label « French Tech ».

Va-t-on lui confier un autre poste lui permettant d’exercer ses talents (ndrl : Fleur Pellerin hériterait du secrétariat d’État au Commerce extérieur) ? Peut-on compter sur une autre personnalité pour prendre les commandes d’un secrétariat d’État au numérique ? Je pense que Corinne Erhel – députée PS des Côtes d’Armor – serait à la hauteur. Je le pense aussi de Laure de La Raudière, mais ce choix est très improbable (ndlr : Laure de La Raudière est députée UMP d’Eure-et-Loir). Elle sont toutes deux membres de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale et pilotent, entre autres, une mission sur le développement de l’économie numérique française.

Pensez-vous que les politiques publiques, pacte de responsabilité inclus, soient favorables au développement de la filière ?

Nous soutenons le pacte de responsabilité et la réorientation vers une politique de l’offre. Mais l’exécutif français déclare cibler les réductions de charges sur les bas salaires. Et ce pour réduire le chômage et relancer l’emploi… peu qualifié. Nous estimons que les futurs allègements devraient cibler des niveaux de salaires plus élevés, les métiers à forte valeur ajoutée, les emplois qualifiés.

Ces emplois créent de la valeur et renforcent l’attractivité du pays. De plus, relancer la compétitivité des entreprises générera mécaniquement des créations de postes moins qualifiés. Nous devons donc monter en gamme, attirer des talents dans des secteurs en croissance, dont le numérique, où la concurrence est âpre et mondiale.

Les entreprises doivent avoir les moyens de mieux rémunérer leurs collaborateurs qualifiés. Je milite pour une augmentation du plafond du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Celui-ci est actuellement assis sur des rémunérations dont le montant n’excède pas 2,5 Smic, et concerne donc peu la filière IT. Nous proposons d’augmenter ce plafond à 3,5 Smic, comme le préconisait le rapport de Louis Gallois sur la compétitivité.

Le marché IT français devrait enregistrer une légère hausse de 1,1% en 2014, soit 2,5 points de moins que la croissance IT mondiale. Comment expliquez-vous ce décalage ?

Le redressement, que nous anticipions dès novembre 2013, et qui se confirme aujourd’hui, reste limité, malheureusement. En Europe, le constat est le suivant : seuls les pays du sud du continent font moins bien que la France. Pourquoi ? Parce que nos investissements et nos choix stratégiques ne sont pas à la hauteur des enjeux, à savoir : accompagner la transformation numérique du pays et accélérer la modernisation de l’État. J’insiste : pour ne pas être disqualifiés, nous devons gagner en compétitivité sur l’échiquier mondial.


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