Hadopi enterre son outil de sécurisation

Pierre Chappaz a déjeuné avec Eric Walter d’Hadopi, il livre quelques impressions croustillantes et un scoop. Le logiciel de sécurisation des routeurs wifi est enterré. Depuis quand ?

« L’ouverture » ne se pratique pas uniquement à l’Elysée, mais aussi chez Hadopi. Et l’ouverture au sein de la Haute Autorité, cela donne un déjeuner dans les Alpes-Maritimes entre Eric Walter, secrétaire général d’Hadopi, Clémence Fournier, sa directrice de communication, et un 3e larron, le blogueur Pierre Chappaz, fondateur de Kelkoo, de Wikio et, un temps, dirigeant de Netvibes.

Le billet de l’entrepreneur ouvre vraiment l’appétit à partir du 4e paragraphe : « Dans le détail, [Eric Walter] m’a expliqué que le logiciel de sécurisation des routeurs wifi était enterré ». L’outil visant à protéger les box ADSL résidentielles des tentatives de piratage par connexion wifi ne figurerait donc plus au menu de la mise en oeuvre de la loi anti-téléchargement illégal Création et Internet. Mais comment vont se défendre les internautes, téléchargeurs occasionnels (voire pas téléchargeurs-du-tout mais ils n’auront aucun moyen de le prouver), poursuivis à l’identique des « pro du téléchargement massif »? Et Chappaz d’enfoncer le clou : « C’est un peu comme si on condamnait un fumeur de joint comme un dealer … est-ce bien réaliste? »

Réputation de self-made man d’Internet mise à part, Pierre Chappaz, comme nous, a été relativement «interloqué par la proposition de rencontre». « Je me demandais ‘mais que veut-il?’ », raconte-t-il sur son blog Kelblog. Et cela d’autant plus que l’ancien dirigeant de Netvibes n’est pas connu pour être un fervent partisant de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet. L’année dernière en mai, il avait intitulé l’un de ses billets sur Wikio, « Hadopi, la plus grosse erreur de Sarko? ».

Mais ce déjeuner n’était visiblement pas fait pour débattre du fond de la question, mais bien de la forme. Eric Walter – un «libéral » que Pierre Chappaz soupçonne « de ne pas être très à l’aise avec le rôle répressif qui est le sien» – et Clémence Fournier étaient venus prendre la température à quelques semaines « des campagnes d’emails destinées à faire peur aux vilains téléchargeurs ».

Mieux vaut tard que jamais très certainement. Le blogueur en a visiblement profité pour leur rappeler quelques épisodes peu « glorieux » de la mise en place d’Hadopi : « La très choquante première version de la loi heureusement retoquée par le Conseil constitutionnel, l’absence totale d’écoute face à la révolte des internautes et des blogueurs, etc. »

Le fondateur de Kelkoo leur a aussi conseillé de « poursuivre le dialogue avec [leurs] opposants, des blogueurs par exemple ». Il est fort probable que l’abandon de cette mesure ne les oblige à « poursuivre le dialogue » avec l’ensemble des anti-Hadopi auxquels Pierre Chappaz se propose, dans les commentaires, de servir d’intermédiaire.