Hadopi: le décret sur la surveillance automatisée attaqué devant le Conseil d'Etat

FDN, un fournisseur d’accès associatif, fait valoir un vice de forme et dépose un recours en annulation du décret Hadopi auprès du Conseil d’Etat.

La veille du délai d’expiration pour les demandes d’annulation, le décret ( n° 2010-236 du 5 mars 2010 ) ouvrant la voie au traitement automatisé de données à caractère personnel dans le cadre de la loi Hadopi, est attaqué. Le fournisseur d’accès French Data Network (FDN), associé au collectif citoyen la Quadrature du Net, ont déposé un recours devant le Conseil d’État ce jeudi 6 avril.

« Par le présent recours, les requérants demandent au Conseil d’État d’annuler le décret 2010-236 du 5 mars 2010 relatif au traitement automatisé de données à caractère personnel autorisé par l’article L. 331-29 du code de la propriété intellectuelle dénommé « Système de gestion des mesures pour la protection des œuvres sur Internet » », écrivent les dépositaires du recours.

Le traitement automatisé vise à industrialiser l’envoi par les opérateurs des courriels et autres lettres d’avertissement aux internautes pris la main dans le sac des téléchargements illégaux qu’instaure la loi Création et Internet. Autrement dit, il concerne la création des « fichiers Hadopi » qui permettront la surveillance des internautes, notamment des récidivistes.

La démarche de FDN est motivée par… un vice de forme. Ils estiment que « le gouvernement a omis de consulter l’Arcep, et ce alors que la loi le lui impose conformément à l’article L.36-5 du Code des postes et communications électroniques ». Or, le dit gouvernement n’a visiblement pas consulté le gendarme des télécommunications alors que l’article 8 du décret précise que le système de traitement automatisé des données sera interconnecté avec les traitements mis en œuvre par les opérateurs et fournisseurs d’accès à Internet (FAI). Système qui, note au passage FDN, aura des répercussions financières sur lesdits fournisseurs d’accès alors qu’aucun accord sur la prise en charge de ses frais n’a été trouvé entre les différentes parties.

Pour la FDN, l’un des premier FAI français (1992, sous forme associative), et la Quadrature, l’absence de consultation justifie l’annulation du décret en question. « Non seulement la consultation est imposée par la loi, mais en outre cette omission a pu exercer une influence sur la décision, écrit le président de FDN Benjamin Bayart sur le blog de l’association. Cette omission est donc de nature à entraîner l’illégalité du décret attaqué. »

Reste à savoir si le Conseil d’Etat partagera l’analyse de FDN. Si c’est le cas, le décret en question devra être re-publié après consultation de l’Arcep mais aussi de la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés). Ce qui retardera l’envoi des premiers e-mails d’avertissement prévus pour la fin juin. Pour peu que la proposition de loi du député (UMP) Michel Zumkeller sur la licence globale soit approuvée (Faisons un rêve, écrivait Sacha Guitry) l’avenir de l’Hadopi risque de sérieusement s’assombrir.