IA cloud : des stratégies hybrides et sectorielles à parfaire

IA cloud 2022 Magic Quadrant

Certains offreurs « leaders » au Magic Quadrant de l’IA cloud affichent une marge de progression sur la gestion des déploiements hybrides et des secteurs d’industrie.

Quelques têtes de pont, beaucoup d’acteurs de niche… et pas grand-chose entre. Les deux premières éditions (2020 et 2021) du Magic Quadrant de l’IA cloud dépeignaient un tel paysage concurrentiel. Cette année, les choses s’équilibrent dans une certaine mesure. Dans le carré des « leaders », toutefois, on prend les même et on recommence. Nommément, AWS, Microsoft, Google Cloud et IBM.

D’une année sur l’autre, le rapport de force entre ces quatre fournisseurs a évolué. AWS, notamment, a pris une longueur d’avance sur l’axe « exécution » du Quadrant. Et, à l’inverse, une de retard sur l’axe « vision ».

Le premier est centré sur la capacité à répondre effectivement à la demande (expérience client, performance avant-vente, qualité des produits/services…). Le second, prospectif, est centré sur les stratégies (sectorielle, géographique, commerciale, marketing, produit…).

Sur l’axe « vision », les fournisseurs se placent dans cet ordre :

  Fournisseur Date de création
1 Microsoft 1975
2 Google 1998
3 IBM 1911
4 AWS 2012
5 Oracle 1977
6 Baidu 1999
7 H2O.ai 2012
8 Alibaba Cloud 2009
9 Tencent 1998
10 Dataiku 2013
11 Aible 2018
12 Clarifai 2013
13 Prevision.io 2016

 

Sur l’axe « exécution » :

  Fournisseur
1 AWS
2 Microsoft
3 Google
4 IBM
5 Alibaba Cloud
6 Baidu
7 Tencent
8 Dataiku
9 H2O.ai
10 Clarifai
11 Oracle
12 Prevision.io
13 Aible

 

Ayant recentré sa stratégie sur ses propres applications, Salesforce sort du Quadrant. Tandis qu’y entre Dataiku (« acteur de niche »), en conséquence de l’extension de son offre au-delà du public des data scientists.

La capacité d’exécution des hyperscalers

Sous le prisme de Gartner, Alibaba Cloud a connu une évolution similaire à celle d’AWS. Il a progressé sur l’exécution et rétrogradé sur la vision, passant de « visionnaire » à « challenger ». Parmi les autres changements de catégorie, on mentionnera :

– Oracle, passé d’« acteur de niche » à « visionnaire »
– Aible et H2O.ai, passés de « visionnaires » à « acteurs de niche »
– Baidu et Tencent, passés d’« acteur de niche » à « challenger »

Cette année encore, un seul critère technologique obligatoire pour figurer au Quadrant : le machine learning automatisé (autoML). Le reflet d’une réflexion anglée sur les développeurs, public qui, estime Gartner, a peu d’expertise en data science.

Par autoML, il faut entendre les composantes suivantes :

– Préparation de données, feature engineering
– Développement, gestion, déploiement de modèles
– Détection des biais, explicabilité et interprétabilité
– MLOps

Les autres briques prises en considération sont « facultatives ». Elles se répartissent en deux catégories. D’un côté, les services de traitement du langage : interprétation et production, analyse de texte ou de sentiment, reconnaissance et synthèse vocales, traduction. De l’autre, ceux qui relèvent de la vision : reconnaissance et étiquetage d’images, analyse de vidéos, OCR.

Sur la partie autoML, un constat : l’innovation est toujours du côté des « petits » offreurs, mais les poids lourds du marché refont leur retard. Dans le domaine de la vision, les fournisseurs chinois se distinguent, même si la progression est générale.

Des portefeuilles exhaustifs, mais inégaux

Point souvent négatif dans les Magic Quadrants, le prix ne l’est ici pas chez les « leaders ». Avec une exception : IBM, qui n’est pas non plus, selon Gartner, le plus prompt à répondre aux besoins du marché (manque de fonctionnalités de feature engineering, de capacités de crowdsourcing, d’autoML pour l’analyse d’images et de vidéos…).

IBM est au contraire crédité d’un bon point pour l’exhaustivité de son portefeuille, en particulier sur le langage. Ainsi que sur la qualité de ses services de détection de biais, l’accessibilité de ses outils et les options de déploiement.

AWS, au contraire, apparaît comme « le seul leader sans vision multicloud et cloud hybride ». Il a par ailleurs du retard sur la question de l’IA responsable. Et manque de solutions sectorielles, même s’il le comble à renfort de blueprints.

AWS se distingue en revanche positivement sur sa capacité d’exécution (compréhension du marché, modèle économique…). Ainsi que, d’une part, avec ses zones de disponibilité, qui offrent une couverture sans pareille sur ce marché. Et de l’autre, sur la mise en œuvre de ses solutions (diversité des instances, intégration des modèles avec SageMaker, optimisation d’outils open source…).

Avec ou sans IA symbolique ?

Chez Google Cloud, les solutions sectorielles sont aussi un point faible. Elles couvrent en tout cas « moins de verticales que chez les autres fournisseurs ». Autre point de vigilance : un support encore partiel des déploiements sur site ou en cloud privé. Et, côté offre, des efforts R&D axés quasi exclusivement sur les réseaux de neurones, quand d’autres explorent les combinaisons potentielles avec l’IA symbolique.

Comme chez AWS, la compréhension du marché est un point positif chez Google Cloud. Gartner salue aussi son positionnement sur l’IA responsable et l’accessibilité de ses solutions pour les devs.

Microsoft obtient un mauvais point sur la question de la couverture géographique : il n’y a qu’en Amérique qu’il propose l’intégralité de son catalogue. L’expérience client se révèle en outre moindre que chez les autres « leaders ». Et les produits ne sont pas toujours au niveau de la concurrence ; par exemple sur la prise en charge des plates-formes hardware.

Le modèle économique, en revanche, est un point fort de Microsoft, qui opère « une différenciation claire entre développeurs professionnels et ‘citoyens’ ». La stratégie commerciale l’est aussi. En particulier avec la « gratuité » d’autoML (on paye calcul et stockage).

Photo d’illustration © immimagery – Adobe Stock