Internet : il n’y a plus d’adresses IPv4 disponibles

L’Internet Architecture Board annonce qu’il n’y a plus une seule adresse IPv4 disponible. La transition vers l’IPv6 doit maintenant s’accélérer.

Cette fois, on touche le fond. Pas seulement à cause du résultat de l’élection du 45e président des Etats-Unis mais parce qu’il n’y a plus une seule adresse IPv4 disponible. C’est l’IAB (Internet Architecture Board) qui le dit. « Après discussions avec l’Internet Engineering Task Force (IETF), l’IAB informe ses organisations partenaires de normalisation (SDO) et l’ensemble des partenaires que le pool d’adresses IPv4 non attribuées a été épuisé », a indiqué, lundi, l’organisme chargé de veiller au bon développement du réseau mondial.

De part son codage sur 32 bits, l’IPv4 ne peut soutenir plus de 4,3 milliards d’adresses Internet. Un chiffre astronomique lors de la finalisation du protocole en 1980 par l’IETF mais qui, avec la démocratisation des ordinateurs individuels, des smartphones et, aujourd’hui, de l’Internet des objets (IoT) demain, s’avère insuffisant pour supporter les nouveaux usages. Spécifié en 1995 et finalisé en 1998, son successeur l’IPv6 codé sur 128 bits est lui capable de soutenir un nombre quasi infini d’adresses numériques (3,4 x 1038*). De quoi voir venir. Mais, pour des raisons de migrations technologiques (notamment de compatibilités des routeurs mais aussi la nécessité de refaire les plans d’adressages et adapter les applications), son adoption est lente. D’autant plus lente qu’elle a été freinée par des techniques permettant de gérer plusieurs adresses IPv4 derrière une seule dans un réseau local (technique de NAT, network address translation). La demande d’adresse IPv4 s’est ainsi poursuivie pour l’ouverture de nouveaux service au point de se retrouver aujourd’hui en pénurie totale.

Accélérer la transition vers l’IPv6

Il s’agit maintenant d’accélérer la transition vers l’IPv6. « Par conséquent, les normes du réseau doivent prendre pleinement en charge l’IPv6, poursuit l’IAB. L’IETF ainsi que d’autres SDO doivent veiller à ce que leurs normes ne supposent pas IPv4. » Autrement dit, mettre fin dans les futures évolutions du protocole Internet à la compatibilité avec l’IPv4 et se consacrer uniquement à l’optimisation de l’IPv6. « Nous recommandons que toutes les normes de mise en réseau supposent l’utilisation d’IPv6 et soient rédigées de sorte qu’elles n’aient pas besoin d’IPv4 », insiste l’IAB.

En attendant que l’IPv6 s’impose, une période transition sera nécessaire et fera appel à une double pile protocolaire ou une transition technologique, souligne l’organe. Mais « la question clé pour les SDO est de supprimer tous les obstacles dans leurs normes qui empêchent ou ralentissent la transition dans différents environnements ». Avec la compatibilité des équipements réseau aujourd’hui largement déployés, Internet est prêt pour l’IPv6. Les obstacles résident essentiellement du côté des opérateurs qui tardent à franchir le pas. Certains plus que d’autres. Selon World IPv6 Launch, quand AT&T et Verizon, les deux premiers opérateurs américains, supportent 58% et 78% de trafic IPv6 respectivement, Deutsche Telekom se contentent de 31% et Orange de 15% (et Free de 23%).

Une adoption déséquilibrée

Mais la tendance évolue et, même, s’accélère. Du moins dans certaines zones du globe. Selon les statistiques de Google, près de 12% des connexions qui passent par les serveurs de Mountain View sont en IPv6 aujourd’hui. Contre 7,35% un an plus tôt et moins de 4% en novembre 2014. Avec de grandes disparités géographiques. Quand près de 30% des connexions aux Etats-Unis utilisent le nouveau protocole, celui-ci atteint moins de 1,5% en Russie et moins de 1% en Chine. Avec ses 13%, la France fait pâle figure par rapport à l’Allemagne (26%), la Grèce (28%) ou la Belgique qui, avec 48% d’adoption, semble détenir le record mondial. Certaines zones, comme l’Amérique centrale et l’Afrique, restent proche du 0% (comme l’Espagne ou l’Italie).

De fait, un nombre toujours plus grand d’acteurs incite à l’adoption de l’IPv6. C’est par exemple le cas d’Apple qui oblige, depuis juin 2016, les développeurs à soumettre des applications compatibles IPv6 dans l’App Store. Les institutions se penchent aussi sur la question. Récemment, l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) a présenté un plan pour accélérer l’adoption de l’IPv6 en France. Bref, incontournable, l’IPv6 finira par être adopté. La question est de savoir à quelle vitesse. En attendant, vous pouvez tester votre compatibilité à l’IPv6 depuis cette page.

* 340 282 366 920 938 463 463 374 607 431 768 211 456 adresses en IPv6 précisément


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