Internet: la responsabilité des hébergeurs enfin fixée?

Les Parlementaires sont tombés d’accord. Le texte final est moins contraignant que la première mouture des députés mais aussi moins souple que la version votée par les sénateurs

L’épineux dossier de la responsabilité des hébergeurs Internet est-il enfin en passe d’être bouclé? Après avoir été examiné par les députés puis par les sénateurs, qui ne sont pas tombés d’accord sur ce problème sensible, le texte est passé en CMP (Commision mixte paritaire) où une solution intermédiaire a été adoptée.

Rappel des faits. La responsabilité des FAI vis à vis des sites qu’ils hébergent avait été fortement augmentée lors du vote, par les députés, de la LEN, la loi pour la confiance dans l’économie numérique. Le texte prévoyait ainsi que les hébergeurs devaient surveiller et filtrer les sites illégaux ou sensibles avant même qu’ils aient été alertés. Une position intenable (tout surveiller est impossible) dénoncée par tous les acteurs du secteur comme une mesure liberticide. Une mesure qui aurait transformé les FAI en censeurs du Net. Devant le scandale, les sénateurs avec l’appui du gouvernement ont revu le texte. Il limité leur intervention aux seuls cas où ils sont saisis d’une telle requête par les autorités judiciaires. Pour parvenir à un texte unique, les parlementaires se sont donc réunis en commission et ont décidé de renforcer la responsabilité des hébergeurs mais sans les obliger à la surveillance. Sans être obligés de fait de surveiller en permanence leurs sites, hébergeurs et fournisseurs d’accès auront néanmoins l’obligation de participer à la lutte contre la diffusion de données illégales, sous trois formes. -Ils devront mettre en place un dispositif accessible et visible pour permettre à toute personne de porter à leur connaissance les éléments à caractère pédophile, d’incitation à la haine raciale et d’apologie de crimes contre l’humanité. -Ils devront informer promptement les autorités de toutes les activités illicites qui leur seraient signalées. -Et ils devront rendre publics tous les moyens qu’ils consacrent pour lutter contre ces activités. Une solution intermédiaire qui permet donc aux hébergeurs et à la communauté du Net de souffler. Selon l’AFA, l’association des fournisseurs d’accès et de services Internet, « la suppression de l’obligation de surveillance au profit d’une obligation de signalement en cas d’alerte extérieure et la mise à disposition de moyens d’alerte pour les internautes nous convient », explique Stéphane Marcovitch, délégué général de l’association. Délit de presse: pas de changements

La Commision mixte paritaire n’est pas revenu sur la mesure des sénateurs sur les délais de prescription des délits de presse sur internet.

Les sénateurs avaient adopté un amendement instituant un régime différent de celui mis en oeuvre par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Ils avaient retenu le principe de prendre comme point de départ du délai de prescription « la date à partir de laquelle cesse la mise à disposition du public de l’information incriminée ». Dans la presse « classique » un délit est prescrit trois mois après la première publication du contenu litigieux. Cette disposition a aussitôt suscité l’opposition de plusieurs organisations, au premier rang desquelles le Syndicat de la presse magazine et d’information (SPMI), le Groupement des éditeurs de services en ligne (Geste) et Reporters sans frontières (RSF). « Sauf à renoncer à toute exploitation d’archives sur les sites (ce qui est manifestement incompatible avec l’intérêt du public pour l’internet), autant dire que la prescription n’existe plus sur ce média », s’indigne le SPMI dans un communiqué.