Interview Boris Lecoeur – Amazon Web Services : « Cloud public : un mouvement massif en France »

A l’occasion du Transformation Day, Boris Lecoeur, senior manager AWS France, aborde pour Silicon.fr la stratégie du fournisseur de services cloud pour les entreprises.

Migration vers le Cloud, sécurité, RGPD, besoins en compétences, intelligence artificielle… Nous avons profité de la conférence Transformation Day organisée par Amazon Web Services  (8 novembre à Paris) pour aborder la stratégie du fournisseur de services Cloud pour les entreprises avec Boris Lecoeur,  responsable des activités AWS et partenaires en France.

Silicon.fr – Quel constat portez-vous sur l’adoption du Cloud public par les grandes entreprises aujourd’hui en France ?

Boris Lecoeur – Il s’agit d’un mouvement fondamental et massif, en France comme dans le monde. Veolia, Decathlon, Nexity… Plusieurs de nos clients sont venus en témoigner sur scène ce matin.

Par exemple, Veolia va fermer l’ensemble de ses datacenters d’ici 2020. La stratégie du groupe de gestion de l’eau, des déchets et de l’énergie est de limiter le temps de cohabitation entre l’existant et le Cloud qui offre plus d’agilité en phase avec l’attente des métiers.

Ils ont commencé leur migration dans le Cloud par les systèmes critiques. Ce n’est pas forcément le chemin le plus emprunté mais commencer par le plus compliqué rend la migration du reste plus simple.

Et cela permet d’avoir des bénéfices tout de suite. La migration de l’environnement SAP et ses 17 000 utilisateurs sur AWS leur a permis de réaliser 40% d’économies.

Veolia a également mentionné qu’il exploitait 10 millions de capteurs disséminés dans le monde et le Cloud s’inscrit comme un élément indispensable au traitement des données que les capteurs remontent pour apporter des services que les clients attendent comme les alertes en cas de fuite d’eau.

Silicon.fr – Comment AWS accompagne l’accélération de cette tendance et en quoi la migration massive vers le Cloud s’accélère ?

Boris Lecoeur – AWS a développé des compétences de migration chez ses partenaires qui vont pouvoir aider un client dans sa migration.

On pense que les migrations peuvent être réalisées dans des temps record avec de l’automatisation et les bonnes compétences.

Le Cloud est automatisé, beaucoup d’outils ont été créés pour faciliter ces migrations. A titre d’exemple, le fournisseur d’énergie italien Enel a migré 10 000 applications en neuf mois.

Silicon.fr – La sécurité ne constitue plus un frein pour les entreprises à basculer ?

Boris Lecoeur – Aujourd’hui, les grandes entreprises sont conscientes que AWS est mieux sécurisé que leusr datacenters parce que nous disposons de toutes les normes, ISO 27001, SSAE 16 SOC 1 , SOC 2, etc. Nous apportons une expertise dans laquelle très peu d’entreprises peuvent se permettre d’investir autant et de trouver les compétences.

Mettre en place des contre-mesures DDoS coûte extrêmement cher alors que notre service AWShield facturé à l’usage permet à l’entreprise de diviser ses coûts entre 10 et 50 par rapport à des solutions sur site.

Parmi les tendances des organisations, on constate que, au-delà de l’agilité, la sécurité figure parmi les premières raisons pour basculer chez AWS.

Silicon.fr – Comment AWS peut aider les entreprises à se conformer au Règlement européen sur la protection des données personnelles (RGPD) ?

Boris Lecoeur – D’abord on est prêt, dès que la norme sera en vigueur [l’échéance est fixée au 25 mai 2018, NDLR]. AWS sera en conformité avec la norme européenne, comme nous l’étions déjà avec la directive précédente, la 9542-EC.

Ensuite, nous avons beaucoup de services qui facilitent la vie des clients pour savoir de manière massive les opérations effectuées dans l’environnement sans avoir à interroger chaque système d’un datacenter. En un appel d’API on peut savoir qui a accédé à quel système, et de quelle manière la donnée a été gérée.

Enfin, nous faisons parti du CISPE (Cloud Infrastructure Services Providers in Europe) qui préconise un certain nombre de principes de sécurité et de conformité de la sécurité.

Le chiffrement est natif chez AWS et les coûts d’entrée pour accéder à une sécurité avancée sont infimes.

D’entrée de jeu, lorsque vous déployez une application sur AWS vous bénéficiez de tous les standards de la sécurité en cours. On applique la norme PCI-DSS (sur les paiements en ligne par carte bancaire) sur tous nos services par défaut, qu’ils fassent du paiement en ligne ou pas.

Silicon.fr – La difficulté à trouver les bonnes compétences ne risque-t-elle pas de constituer un frein au développement d’AWS ?

Boris Lecoeur – C’est un défi. Et c’est d’ailleurs un point longuement abordé ce matin. C’est un problème identifié que l’on résout en investissant dans la formation. On s’engage à former gratuitement 25 000 personnes d’ici 2020 en France pour accélérer les compétences autour d’AWS.

Depuis le début de l’année, on a réalisé plus de 50 sessions de formation auprès de nos partenaires pour les faire monter en compétence. Chaque mois, on organise des cessions de formation pour 200 personnes et, chaque semaine, il y a des événements pour aider à former.

La formation est un des éléments clés de notre stratégie. C’est un problème technique mais aussi d’éducation autour du Cloud qui ne concerne pas seulement la DSI et le CTO mais aussi de la direction, le P-DG.

Les dirigeants des grandes entreprises et les métiers prennent conscience que l’informatique traditionnelle ne répond plus aux enjeux de la transformation numérique.

Silicon.fr – Contrairement à Google ou Microsoft, on entend peu AWS sur ses développements en matière d’intelligence artificielle. Où en êtes-vous ?

Boris Lecoeur – Beaucoup de sociétés investissent 80% de leur énergie dans le commerce et le marketing, et 20% dans le produit. Globalement, Amazon fait l’inverse.

L’IA, qui est liée à la data, à l’Internet des objets (IoT), est un sujet d’investissement majeur pour AWS. Les services Polly, Lex, Rekognition lancés lors du précédent Re:Invent, autour de l’image et de la voix, ont évolué extrêmement rapidement. Enormément de clients sont en phase d’adoption de ces services.

Sur les chatbot, nous avons une belle référence, Peter le Chatbot, une start-up française qui offre de l’assistance éducative aux étudiants.

Le traitement de la voix, de la data par l’IA se répand à très grande échelle et le faire sur AWS est rapide et peu cher. Mais les entreprises ne souhaitent pas forcément communiquer sur ces usages qui sont considérés comme des avantages concurrentiels.

Silicon.fr – A propos de concurrence, Salesforce vient d’annoncer un accord avec Google privilégiant son Cloud. Aux dépens d’AWS, donc ?

Boris Lecoeur – Salesforce est un partenaire très important pour nous. Ils font tourner leur plate-forme IoT sur AWS et avait annoncé en 2016 que l’on était un fournisseur majeur.

Je n’ai pas de commentaire particulier à faire si ce n’est qu’entre l’usage et les annonces, il y a parfois un gap.

Silicon.fr – Où en est le projet d’ouverture d’un datacenter en France annoncé en septembre 2016 ?

Boris Lecoeur – Il ne s’agit pas d’un datacenter en soit mais d’une région complète, c’est-à-dire un concentré de technologies et de savoir-faire AWS, qui se concrétisent par de multiple datacenters que l’on regroupe par « zone de disponibilité » pour permettre aux entreprises et start-up française de mettre en place des applications résilientes, de haute disponibilité.

Et, comme nous l’avions annoncé, l’ouverture est toujours prévue d’ici la fin de l’année.

Cela va permettre d’accélérer les mouvements de migration, les clients français vont pouvoir héberger leurs données en France, ceux qui ont des datacenters à Paris vont pouvoir les connecter plus rapidement et gagner en latence.

Silicon.fr – Au-delà de ce lancement prochain, menez-vous d’autres investissements notables en France ?

Boris Lecoeur – En septembre dernier, nous avons ouvert un bureau à la Défense qui regroupe l’ensemble des équipes AWS sur 2700 m2 et à partir duquel nous avons lancé le support en français.

Beaucoup de sociétés choisissent de délocaliser le support nous choisissons de le localiser en France, à Paris, afin que les clients qui souhaitent communiquer en langue française peuvent le faire.

Nous avons aussi ouvert notre bureau à Station F, (l’incubateur lancé par Xavier Niel) en juillet. On a d’excellents retours avec les start-up. Et, au-delà de la technologie, il y a beaucoup de synergie entre nos grands clients entreprises et les start-up de Station-F, et d’ailleurs, que nous soutenons.

On pense vraiment être un moteur de la transformation et de l’économie numérique de la France qui a tout pour devenir une nation Cloud tant côté start-up que grandes entreprises. C’est vraiment l’enjeu des prochaines années.


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