Israël : gigantesque scandale d’espionnage informatique

Après l’arrestation en France de l’espionne chinoise Li Li, qui s’était infiltrée chez Valeo, voici une autre affaire d’espionnage industriel qui éclabousse des industriels en Israël. Un scandale de grande ampleur qui fait la « une » des médias

La vengeance est un plat qui se mange froid. Toute cette affaire commence par une histoire de famille, plus précisément un règlement de compte entre un mari déchu et son ex-femme. Après une rupture tumultueuse, le mari, un informaticien très doué, Michael Haephrati, décide de se venger en piratant l’ordinateur des parents de son ex- épouse.

Malheureusement pour lui. En novembre 2004, le nouveau petit ami de son ex, un écrivain du nom d’Amnon Jacont porte plainte auprès de la police de Tel-Aviv. La raison: il s’est rendu compte que des passages entiers de son roman, en cours d’écriture, sont diffusés sur Internet. Et les soupçons de l’écrivain vont se porter sur Michael Haephrati. Une piste reprise par une cellule de policiers spécialisés dans les affaires de ce type, qui vont effectivement localiser la source du piratage. Le coupable était bien Haephrati, 41 ans, un germano-israélien qui réside entre l’Allemagne et la Grande-Bretagne. Or, en examinant le contenu du disque dur de la victime, les enquêteurs ont découvert qu’il avait été infiltré par un programme ‘cheval de Troie’. Le programme-espion permettait à l’ex-gendre de prendre le contrôle à distance de l’ordinateur familial, de supprimer ou de déplacer le contenu du disque dur. Michael Haephrati et sa nouvelle compagne Ruth Brier, ont été interpellés ce 31 mai. Ils sont emprisonnés en attendant une audience devant prononcer leur extradition dans les deux jours. L’enquête va de découverte en découverte… Au cours de l’enquête baptisée « Course de chevaux« , les policiers se sont rendu compte que cette attaque orchestrée depuis Londres n’était pas isolée, mais que les manipulations étaient d’une toute autre ampleur. En réalité, Michael Haephrati avait vendu son logiciel ‘trojan’ à trois sociétés de détectives privés israéliennes, Modi’in Ezrahi, Hamafil, Krochmail Zvika. Ces mêmes sociétés de détectives ont proposé des « services d’information améliorée« , c’est à dire de l’espionnage, à une vingtaine de sociétés israéliennes. Le fournisseur de réseau télévisé Yes aurait ainsi espionné son concurrent Hot. Les opérateurs de réseaux téléphoniques Cellcom et Pelephone auraient obtenu des informations sur leur concurrent Partner. Et enfin Meir Motors, importateur israélien de Volvo et de Honda, aurait également utilisé ces services pour s’informer sur les pratiques commerciales de Champion Motors, importateur de Volkswagen. Jusqu’à 60 personnes pourraient être inculpées D’ores et déjà, la police israélienne a appréhendé 20 personnes, dont de très hauts responsables de sociétés phares en Israël. Pour l’instant, une quinzaine de sociétés sont impliquées, mais l’enquête qui prend une dimension internationale pourrait bien en compromettre plus de soixante. Selon la radio publique israélienne et le quotidien Le Figaro, la méthode des détectives était bien rôdée. Ils provoquaient l’installation du module espion dans l’ordinateur cible en envoyant par courrier des cédéroms contenant de fausses offres promotionnelles, ces supports étaient reçus et lus par les secrétaires des dirigeants. Le danger est bien réel, constate Annie Gay, directeur général de Sophos France, éditeur de solutions anti-virus et anti-piratage: « Pour empêcher ces données d’être dérobées par des logiciels malicieux tels que des ‘spywares’ ou des chevaux de Troie, il est vital que les entreprises protègent leurs réseaux par des solutions de sécurité de dernière génération » La découverte de ce réseau d’espionnage est une mauvaise nouvelle pour l’économie israélienne qui commence à peine à sortir d’une période de récession provoquée, entre autres facteurs, par des années de conflits. Dimanche, la Bourse à Tel-Aviv était nettement à la baisse suite aux précisions données sur cette vaste affaire compromettante. Une affaire unique en son genre, qui rappelle le temps de la guerre froide ou encore certains films d’anticipation comme « Le Troisième Homme ». Encore la réalité qui rattrape la fiction…