J. Giachino (Starzik) : ‘Nous n’avons pas été rachetés par Nexway »

Le patron de la 5e plate-forme française de téléchargement légale revient sur les enjeux de la musique en ligne et sur l’évolution de son business model

Dans le marché très encombré de la musique en ligne, Starzik poursuit son bonhomme de chemin. Cinquième plate-forme française (source IFOP) derrière les géants ITunes, Virginmega ou Fnac.com, le service s’est rapidement distingué en proposant des contenus sans DRM, ces verrous techniques qui brident l’interopérabilité et pénalisent l’essor de la musique en ligne légale. Sa force est également de proposer sa plate-forme en marque blanche à d’autres entreprises comme les 3 Suisses ou Free. Aujourd’hui, Starzik mise sur la diversification des contenus et les partenariats. Jérôme Giachino, son p-dg fait un point sur son activité et sur les défis que doit relever la musique en ligne.

En mai dernier, Téléchargement.fr (devenu depuis Nexway) annonçait le rachat de Starzik. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Nexway est allé un peu vite en besogne dans cette annonce… Il n’y a pas eu de rachat à proprement parler mais la signature d’un partenariat serré et complet entre les deux groupes. Ce partenariat permet des synergies au niveau marketing, commercial et financier. Nous allons également monter ensemble des projets, notamment au niveau européen. Mais à ce jour, nous sommes toujours financièrement indépendants.

Dans un marché très concurrentiel, comment parvenez-vous à vous différencier ?

Nous avons une approche assez unique puisque européenne. Notre plate-forme est vendu en marque blanche à certains distributeurs comme Fnacmusic Belgique et à des fournisseurs français comme Free ou les 3 Suisses. Cette activité de gros est actuellement en plein développement. Dans le même temps, nous sommes les seuls en Europe à proposer une partie de notre catalogue sans DRM et en multi-formats (mp3, wma, ogg, aac…)

En France, quel est votre trafic ?

Nous revendiquons environ 650.000 visiteurs par mois, 5 millions de pages vues et 45.000 morceaux téléchargés chaque mois (la base compte 2 millions de titres). Nous maintenons notre 5e place malgré l’arrivée de nouveaux acteurs.

La mise en ligne de titres sans DRM a-t-elle dynamisé votre business ?

Nous proposons 600.000 titres sans verrous, issus essentiellement du catalogue EMI et de labels indépendants. Aujourd’hui, la vente de ces fichiers totalement ouverts représente 33% de notre chiffre d’affaires. Surtout, cela permet de fidéliser l’audience, qui reste attirée par le peer-to-peer.

La fin progressive des DRM est-elle suffisante pour compenser l’essor du P2P ?

C’est un élément fondamental. Tant que cette question ne sera pas totalement réglée par les maisons de disque, on aura des problèmes. Pourquoi payer pour quelque chose qui est moins bien ? Mais à elle seule, la fin des DRM ne sera pas suffisante. Il faut se poser la question du contrôle des P2Pistes et des sanctions à envisager. Il faut également faire un travail de communication et de pédagogie pour mettre les internautes face à leurs responsabilités.

Les opérations de communication ont pourtant déjà été nombreuses et la riposte graduée semble acquise…

On est évidemment pour la riposte graduée mais il faut avant tout éduquer. Je pense que la sévérité doit être la même que pour les contrevenants de la route. Traduction : il faut imposer plus de sévérité. C’est le seul moyen pour parvenir à des résultats.

L’Industrie du disque ne paye-t-elle pas les frais de sa stratégie à court terme et de son manque de vista ?

C’est vrai que l’industrie a mis en place un modèle qui aujourd’hui se retourne contre elle. Et il faut le dire. Mais il faut aussi faire comprendre que le marché ne se résume pas aux stars, que la musique n’est pas un produit de consommation.

Les Majors veulent responsabiliser les FAI dans la lutte contre le piratage, quel est votre avis sur la question ?

Tout passe par eux, ils ont forcément un rôle à jouer. La lutte contre le piratage ne pourra pas se faire sans eux. Ils doivent donc mettre en place des mesures tout en évitant de faire fuir leurs abonnés.

Pour résoudre le problème, la solution n’est-elle pas de rendre les contenus gratuits et de financer l’industrie par la publicité et des abonnements ?

Pourquoi pas. Mais ce modèle ne pourra pas être unique. Il pourra venir compléter d’autres façons de consommer la musique. Néanmoins, je pense que l’abonnement locatif, utilisé par les plates-formes qui propose la gratuité (comme Rhapsody), ne correspond pas à l’état d’esprit latin. Dans nos cultures, nous voulons posséder le bien acheté et pas en être ‘le locataire’. Enfin, ce modèle fonctionne avec une économie globale en forme. Lorsque le ralentissement arrivera, les premières économies se feront dans la publicité, ce qui remettra en cause les services gratuits. Chez Starzik, nous avons vite intégré le fait qu’il ne fallait pas mettre nos oeufs dans le même panier. Notre business-model est à la fois basé sur les ventes à l’acte, la publicité et sur une communauté payante destinée à des artistes qui souhaitent mettre en ligne et vendre leurs créations.

Ce qui permet à votre chiffre d’affaires de décoller ?

Nous sommes en phase de développement. Nous visons 300.000 euros de revenus en 2007.

Quels sont vos projets ?

Poursuivre la vente B2B en marque blanche, notamment en Europe. Nous comptons également nous diversifier dans la vidéo, le logiciel et le jeu.