Jeux vidéo: les scénarios violents ne stimuleraient pas l’agressivité …

Une étude de l’Université de l’Illinois montrerait qu’une exposition prolongée aux jeux vidéo très violents n’entraînerait pas nécessairement d’augmentation substantielle de l’agressivité… Qu’en pensent les juges?

Une polémique a vu le jour aux Etats-Unis à la suite du meurtre en 2003 de deux officiers et d’un employé civil de la police de Lafayette, en Alabama. L’auteur des crimes, un jeune homme de 20 ans, Devin Moore, avait déclaré lors de son arrestation:  »

La vie est un jeu vidéo. Tout le monde doit mourir à un certain moment« . Il n’en a pas fallu plus à l’attorney Jack Thompson pour mettre en cause le jeu vidéo Grand Theft Auto: Vice City, auquel s’adonnait le meurtrier des heures durant. Le juge a estimé qu’il s’agissait là d’un « simulateur de meurtre« . Et d’accuser les concepteurs, distributeurs et revendeurs du jeu d’avoir équipé Moore pour le conduire à tuer aussi sûrement que s’ils lui avaient mis une arme dans les mains ! « Le sang est sur les mains de certains bureaux de conseil d’administration du Japon à New York« , avait-il déclaré. Ce raccourci qui consiste à penser que tous les joueurs de jeux vidéo plus ou moins violents sont des meurtriers en puissance a été allégrement franchi par Jack Thompson, et repris par les associations familiales américaines, qui n’attendaient que cela ! Les très nombreux joueurs de la série GTA, et d’autres jeux réalistes, apprécieront ! Une étude commanditée? Une étude de l’Université de l’Illinois devrait rassurer les joueurs et l’industrie du jeu vidéo. Les chercheurs concluent n’avoir pas rencontré « d’effets forts associés à l’agressivité causé par ce jeu violent« , a affirmé Dmitri Williams, l’auteur du rapport. L’Université a soumis un groupe de 75 joueurs test (de 14 à 68 ans) au jeu vidéo Asheron’s Call 2, auquel ils ont joué en moyenne 56 heures par mois. « Les joueurs n’étaient statistiquement pas différents des non joueurs d’un groupe de contrôle dans leurs réactions agressives après avoir joué à ce jeu qu’ils ne l’étaient avec le jeu auxquels ils jouaient auparavant« . « Le jeu n’est pas un facteur prédictif de comportements agressifs. Comparés au groupe de contrôle constitué de 138 non joueurs, les 75 joueurs n’ont pas modifié leurs comportements raisonnés après le jeu, ils n’ont pas non plus été sensiblement plus enclins à discuter avec leurs amis et partenaires« . L’étude ne répond pas à toutes les questions !

Sans remettre en cause le sérieux de l’étude, en particulier les tests d’évaluation de l’agressivité basés sur le reconnu NOBAGS (Normative Beliefs in Aggression) de L.R. Huesmann (les psychologues apprécieront), ses résultats laissent encore planer de nombreuses interrogations. Tout d’abord, le groupe test, dont la moyenne d’âge est de 27,7 ans, n’était pas centré sur des adolescents, généralement plus fragiles et sensibles à certains stimuli. Ensuite, on pourra objecter que le jeu Asheron’s Call 2 est un jeu en ligne tourné vers le fantastique, et donc que la perception de son imaginaire ne peut être comparée avec un réalisme ancré dans une forme de réalité d’un jeu comme GTA: Vice City. L’étude révèle surtout que les opposants comme les partisans des jeux vidéo ne disposent pas d’informations suffisantes pour étayer leurs argumentations. Et donc que les phénomènes induits par la pratique des jeux vidéo pourraient être plus complexes qu’on ne l’imagine.