Julien Parrou, président de ConcoursMania : « Il n’existe aucune interdiction d’offrir une dotation en argent via des jeux »

Spécialiste du marketing et des jeux-concours, Julien Parrou, cofondateur et président de ConcoursMania, nous apporte ses lumières sur l’opt-in, l’opt-out, la réglementation actuelle, et les pratiques en la matière

Quelles sont les obligations d’un éditeur de site sur la gestion des données récupérées en ligne ?

Un des principaux objectifs de la LCEN (Loi pour la confiance dans l’économie numérique) visait à limiter le spam. Elle impose un principe fort : instaurer une autorisation préalable et explicite de l’internaute pour lui envoyer des e-mails ou des SMS. Toutefois, le texte reste trop générique et ne précise rien sur les modalités opérationnelles. Que signifie ‘accord préalable’ ? Le syndicat de National de la communication directe (SNCD) a énoncé des recommandations qui s’imposent dans les pratiques. Tout d’abord, il faut obtenir un accord ‘libre, exprimé, informé et explicite’. Il s’agit donc de l’opt-in, par lequel l’internaute doit réaliser une action (par exemple en cochant une case) sur quelque chose du type : ‘Oui j’accepte de …’ suivi du propos précis. ‘Libre’ signifie que cet accord n’est lié à aucun autre avantage proposé (par exemple à une réduction). ConcoursMania et les organisateurs de jeux-concours plaidons tous en ce sens.

Cependant, certains acteurs (en ligne ou non) ont choisi de faire cocher des formules négatives, ce qui signifie que l’internaute dit oui par défaut. Notons les différences : l’opt-out consiste à décocher une case, tandis que l’opt-in réel (celui que nous défendons) revient à cocher une case avec une formulation positive, et un accord explicite sans lien avec une autre offre.

Bien entendu, la constitution d’un fichier de données concernant des prospects, visiteurs, clients… doit être déclarée préalablement à la CNIL.

Quel intérêt représentent les jeux-concours dans la promotion de sites ?

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Les jeux-concours et la promotion en général visent à animer un site et à en augmenter le trafic des visiteurs, en créant un événement en rupture avec le fonctionnement habituel. La phase de conquête met en œuvre la capacité à acquérir de nouveaux prospects ou adhérents à une newsletter, par exemple. Dans ce cas, la nature des lots est essentielle, et leur choix très important. Avantage avec les jeux-concours : les données récupérées sont très fiables. En effet, l’e-mail permet de se tenir au courant, et l’adresse postale de recevoir les cadeaux… D’ailleurs, les jeux-concours sont également très efficaces en B2B pour la conquête de contacts professionnels. Il y a toujours une personne et un consommateur derrière l’internaute. La différence tient dans le choix des lots et dans la façon de les présenter.

La phase de qualification active la capacité du site à enrichir sa base de données clients ou CRM, aussi bien avec de nouveaux contacts qu’avec des clients existants.

Les jeux-concours présentent trois intérêts pour l’entreprise : la récolte d’information, le travail sur la marque (branding) et la qualité des données récupérées.

Mais peut-on offrir de l’argent ? Et combien ?

En France, contrairement aux idées reçues, il n’existe aucune interdiction d’offrir une dotation en argent via des jeux. Et ce, sans limite, et même si l’entreprise n’est pas un organisme de jeux. De plus, le gagnant n’a pas à le déclarer aux impôts. Seule obligation : déposer un règlement en bonne et due forme chez un huissier de justice.

Par ailleurs, une entreprise ne peut pas demander d’argent pour la participation à un jeu, comme l’indique la loi du 21 mai 1836 (!) en son article 1 : ‘les loteries, de toutes espèces sont prohibées’. Toute opération ouverte au public donnant l’espérance d’un gain et faisant intervenir le hasard doit être sans participation du joueur. Ce qu’aujourd’hui on retrouve dans la formule ‘jeu gratuit sans obligation d’achat’.

Exceptions à ce principe : les dons aux associations (foires au jambon et autres bingos), et les trois monopoles d’État que sont les casinos (opérateurs privés sous licences et très taxés), les courses hippiques (très taxées), et la Française des jeux (tous jeux payants hors casinos et PMU).

Internet ne fait-il pas exploser les monopoles des jeux de hasard ?

Avant tout, il faut souligner qu’il est bénéfique de contrôler ces secteurs. Si Internet fait exploser les frontières, les internautes victimes des paris ou casinos en ligne hébergés à l’étranger ne peuvent pas se tourner vers les tribunaux français, et ne disposent d’aucun recours. Certes le monopole subsiste, mais personne ne peut empêcher l’internaute de jouer ailleurs sur son PC.

Certains détenteurs de licence de casino en France (et faisant correctement leur travail) souhaitant se défendre face aux jeux en ligne veulent lancer ce type de service. Une action judiciaire a été initiée en 2007 auprès de la Commission européenne à Bruxelles. Cette institution affirme qu’elle accepte le monopole public s’il est justifié par exemple par la lutte contre l’addiction, mais demande des explications sur cette défense puisque ces monopoles font beaucoup de publicité… Un débat qui pourrait bien ouvrir une brèche dans ces monopoles, où pourrait venir s’engouffrer bien du monde.