La CFE-CGC inquiète sur le malaise social chez Numericable-SFR

Le syndicat CFE-CGC s’inquiète de la situation salariale chez SFR qu’il rapproche des années noires qu’ont connu les salariés de France-Télécom

La situation de SFR (Numericable-SFR) est à ce point jugée préoccupante pour les salariés et l’avenir de l’entreprise qu’Orange y met son grain de sel. Du moins, la CFE-CGC de l’opérateur historique. Dans une lettre cosignée par les délégations CFE-CGC de SFR et nationale, et adressée hier à Bercy (Emmanuel Macron, ministre de l’Economie et Axelle Lemaire, déléguée au Numérique) et à la ministre de l’Emploi, Myriam El Khomri, le syndicat alerte sur « la situation très préoccupante des salariés de Numericable-SFR ». Les ministres ont annoncé qu’ils allaient recevoir les syndicats pour en discuter.

Si la représentation syndicale d’Orange prend la peine d’intervenir sur un dossier qui ne la concerne pas directement à première vue, c’est parce que « le contexte […] rappelle de manière très inquiétante les prémices de la crise sociale intervenue en 2009 chez France Télécom ». Pour mémoire, la réduction des coûts engagés en 2002 chez l’opérateur historique alors confronté à un environnement concurrentiel nouveau pour lui avait conduit à une baisse des investissements, un recul des revenus tout en maintenant un niveau de dividendes qui, en 2009, dépassait celui des bénéfices nets. Une situation qui a pesé sur les conditions de travail et entrainé une vague de suicides qui s’est poursuivie jusqu’en 2014.

Un contexte anxiogène pour les salariés

Une situation qui se répèterait chez SFR (Numericable-SFR) aujourd’hui, selon la CFE-CGC qui dénonce pêle-mêle des « retards d’investissement […] très inquiétants pour la pérennité de l’entreprise » (ce qu’a reconnu SFR tout en annonçant les relancer), des fournisseurs impayés (notamment pointés par le Syntec Numérique et la DGCCRF) ou encore une chute de 1,2 million de clients en un an. Sans oublier un emprunt de 1,68 milliard d’euros pour verser un « dividende généreux » de 2,5 milliards à son propriétaire Altice pour l’exercice 2015. « Comment, ainsi asséchée de toute liquidité, et peut-être bientôt de capacité d’emprunt, Numericable-SFR pourra-t-elle redresser la barre des investissements et du paiement des fournisseurs ? Et quel est son futur ? », s’inquiète la CFE-CGC pour qui ce « contexte très dégradé est évidemment très anxiogène pour les salariés de Numericable-SFR ».

Ce que ne contredira pas la CFDT. Dans une communication interne datée du 26 novembre sur laquelle Silicon.fr a mis la main, le syndicat a compilé des témoignages de salariés de SFR de différentes directions un an après l’acquisition. On peut notamment y lire que « la stratégie financière a remplacé la stratégie industrielle », que « l’arrivée de la nouvelle direction s’est traduite par un fort ralentissement, sinon un arrêt de certaines activités et des partenaires historiques non payés » que « la communication des dirigeants est totalement surréaliste sur le terrain », que « l’avenir est incertain. La machine à cash est mise à mal, les « marketeux » le savent, ils quittent l’entreprise ». Ce qui se traduit par « un mélange de lassitude, démotivation et volonté de protéger sa santé ou son poste » avec des « arrêts maladie […] nombreux cette année et je pense que ce n’est pas fini… »

500 départs en un an

Le syndicat dénonce notamment « au moins » 500 départs « de gré ou de force » de l’entreprise depuis un an. « Sans compter les milliers de prestataires des SSII, des sous-traitants, et des Centres d’appel. » A l’occasion de la présentation de la stratégie industrielle d’Altice le 9 novembre, Eric Denoyer, directeur général de SFR, déclarait respecter l’accord sur l’emploi (qui vise à éviter tout plan social pendant 36 mois) et évoquait pour sa part une « communication externe des syndicats en période de campagne électorale ». Les prochaines élections syndicales sont prévues en mars 2016.

Il n’en reste pas moins que si, trimestre après trimestre, SFR (Numericable-SFR) vante l’amélioration de ses résultats financiers, la machine risque de s’enrayer si la base salariale ne suit plus. Ce que craint la CFE-CGC qui demande à Bercy et à l’Emploi « d’intervenir au plus tôt pour que Numericable-SFR ne connaisse pas les mêmes jours noirs que France Télécom ». Faudra-t-il attendre le premier suicide chez SFR pour s’en émouvoir ?


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