La dématérialisation fiscale demeure l'exception

Le marché de la dématérialisation des factures, lourd de 400 millions d’euros, devrait connaître une croissance à deux chiffres dans les années à venir. Néanmoins, les obstacles ne manquent pas, qui pourraient freiner ce développement.

Ce 24 novembre, Markess International, cabinet d’études sur l’impact des technologies de l’information sur les organisations, a présenté son étude annuelle sur l’évolution de cette pratique et sur son marché. L’enquête s’appuie notamment sur 190 entretiens menés entre août et octobre 2009, auprès de directeurs informatiques, des responsables vente ou achat, ou encore des directions générales, ainsi qu’auprès de 34 fournisseurs de solutions IT.

Croissance à deux chiffres malgré la crise

Le marché de la dématérialisation des factures connaît un taux de croissance de 21 % depuis 2008, et devrait continuer à croître, malgré la crise. Aux dires de la majorité de l’échantillon interrogé, les problèmes économiques ne freinent pas ces projets, voire les encouragent. Dans les secteurs pionniers, comme l’industrie ou la distribution, la tendance donc devrait se poursuivre. Et des projets commencent à poindre dans le secteur privé.

La mairie de Paris, par exemple, a mis en place un projet dans le cadre de la dématérialisation des achats publics. La LME (loi de modernisation de l’économie) prévoit d’ailleurs de nouvelles obligations dans ce domaine, même si elles ne sont pas encore rentrées en application. « Depuis trois ans, l’intérêt pour la dématérialisation des factures est de plus en plus soutenu », note Hélène Mouiche, chargée d’études auprès du cabinet Markess. Résultat, le marché devrait continuer à croître, en vertu d’un effet «domino» des projets.

Ceux ci portent sur des types de dématérialisations différentes. 60 % des entreprises interrogées (un panel plutôt mature sur le sujet) la pratiquent déjà. Néanmoins, la dématérialisation dite fiscale, seule à éliminer totalement le flux de papier parallèle, demeure très minoritaire. Au total, elle ne représente que 6 % du volume des factures échangées des 134 entreprises de l’échantillon. C’est 2 % de plus que l’année précédente.

Motivation à marche forcée pour les fournisseurs

Pour les clients comme pour les fournisseurs, les motivations ne manquent pas de passer à la dématérialisation. Pour le neuf dixième des clients, la motivation principale réside dans le besoin d’automatiser les processus comptables, de les optimiser en éliminant des taches manuelles. La LME, qui impose des délais de paiement réduits et prévoit des pénalités en cas de non respect, renforce cette préoccupation.

Autre volonté, celle de réduire les coûts. Car c’est le client assume les deux tiers du coût de traitement de la facture, qui va de 15 à 18 euros. Cette préoccupation de réduction des coûts est partagée par les fournisseurs, même si dans une moindre mesure. Mais, en fait, si les fournisseurs entament des projets de dématérialisation, leur motivation réside pour l’essentiel selon la demande de leurs clients, tout comme en 2008. Une nouveauté toutefois : certains commencent à citer le développement durable comme une motivation pour dématérialiser les factures.

Et l’Europe ?

Cette démarche s’arrêterait-elle aux frontières nationales ? Aujourd’hui, les entreprises mettent en place –ou non– des stratégies diverses, au niveau de leurs relations avec leurs partenaires européens. Un quart des organisations indique avoir déjà initié des projets en 2009. Coté client, la moitié des projets sont gérés à partir de la France, et 34 % pays par pays, avec des plates formes multiples. Parmi ceux-ci, seuls 15 % sont coordonnés. Et ce taux double chez les fournisseurs, qui doivent suivre des projets menés par leurs différents clients.

De fait, la dématérialisation fiscale au niveau européen est loin d’être simple. En effet, « il n’y a pas d’harmonisation réelle des pratiques fiscales », rappelle Hélène Mouiche. Résultat : les entreprises qui mettent en place un système en France, peuvent se heurter à des obligations légales différentes dans un autre pays. Autre souci : l’absence de standard technique européen. « Même pour l’EDI, il existe plusieurs standards, par pays ou par secteur d’activité », précise Hélène Mouiche. Les discussions sont en cours…

Un marché éclectique

En soutien des entreprises, la préoccupation de pouvoir se déployer au niveau européen semble avoir été prise en compte par les prestataires du secteur. Les deux tiers d’entre eux annoncent déjà suivre leurs clients à travers l’Europe, soit via des filiales, soit en passant par des partenariats avec des acteurs locaux de la dématérialisation. D’ailleurs, près de la moitié envisage de faire des achats d’ici 2011.

Pour l’instant, le marché de ces prestataires est très éclectique, car ils proviennent de métiers différents et offrent des solutions variées. Les acteurs spécialisés dans l’éditique, comme StreamServe, ont étendu leur prestation à la gestion des factures sortantes. Les factures rentrantes, sont captées par des acteurs de la dématérialisation et de l’automatisation comme ReadSoft. Esker ou Ariba proposent la gestion de la totalité du processus, en mode SAAS.

Autre clé d’entrée : la gestion de la chaîne achat/règlement voit l’arrivée d’offres d’acteurs comme Baseware, ou Hubwoo. Les opérateurs de services, comme Accelya, ou B-process gèrent des plates-formes de facturation. Autres acteurs : Atos Worldwide, ou Orange Business Services, qui traitent les flux dématérialisés. Sans oublier les spécialistes de l’EDI, tels Edicom ou Seeburger…Pour les deux années à venir, à en suivre les projections du cabinet Markess, ils se partageront un marché qui va encore croître de 29 %.

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