La stratégie de contenus d’Orange menacée par un amendement

Le procédé d’Orange, qui lie abonnement à l’offre triple play et souscription à ses services de télévision, n’est pas du goût de certains parlementaires

Après la remise en cause de son contrat d’exclusivité sur la vente d’ iPhone, Orange voit sa stratégie de contenus exclusifs contestée et mise en péril par les parlementaires. Qui veut la peau de l’orange ?

Un amendement proposé et adopté par des députés dans le cadre de la réforme de l’audiovisuel vise à remettre en cause le choix imposé par l’opérateur. En effet, un particulier désireux de s’abonner aux chaînes Orange Foot ou Orange Cinéma Séries devra au préalable souscrire un abonnement à l’offre ADSL ou satellite de l’opérateur historique. Pour certains députés (comme pour les concurrents de l’opérateur), cette pratique entre en contradiction avec la loi de la concurrence.

« Si une société privée telle que Canal Plus achète les droits de retransmission du football, l’amateur de foot s’abonnera au service télévision de la chaîne. S’il s’agit d’une société du type Orange, il faudrait permettre à toute personne qui dispose d’un abonnement téléphonique et d’une live box classique, de pouvoir payer ce supplément de x euros donnant l’accès aux matchs de foot en question, a expliqué Benoist Apparu, député UMP, lors d’un débat à l’Assemblée. En effet, il me paraît choquant que l’accès au programme télévision d’Orange et à cette exclusivité soit conditionné à la souscription d’un abonnement téléphonique et Internet, s’ajoutant à l’achat du service télévision » a-t-il précisé.

L’amendement indique donc que « la commercialisation d’une offre de services de communication audiovisuelle par voie électronique éditée par un opérateur de communications électroniques au sens du code des postes et des communications électroniques ne peut être réservée aux seuls abonnés aux offres d’accès à internet de ce même opérateur « .

Cette nouvelle proposition place Orange dans une situation d’autant plus délicate que même Eric Besson, le secrétaire d’Etat à l’Economie numérique partage cet avis. « Le choix d’un mode d’accès ne doit donc pas conditionner les services auxquels l’on peut accéder » indiquait-il aux Echos il y a quelques mois.

D’ailleurs, le plan France Numérique 2012 se penche sur la question. Le plan propose de saisir le Conseil de la concurrence en vue de formuler un avis sur les relations d’exclusivité entre activités de fournisseurs d’accès au réseau et de distribution de contenus et de services, portant notamment sur l’opportunité d’un cadre juridique spécifique.

Rappelons que depuis 2007, l’opérateur a opéré un virage marqué en direction des contenus. Après l’obtention de droits de diffusion des matchs de football de la ligue 1 pour un peu plus de 200 millions d’euros par an jusqu’à 2012, l’opérateur lançait en juillet dernier une offre de TV par satellite, puis plus tard, les chaînes Orange Foot et Orange Cinéma Séries. Une initiative interprétée par Canal+, principale chaîne à péage française, comme un acte de guerre.

Un front constitué par le fournisseur d’accès Internet, Free, et la chaîne cryptée n’avait pas tardé à critiqué avec véhémence l’entreprise d’Orange, inique selon eux car, l’opérateur refusait de partager ses contenus. Pour Canal +, il s’agissait également de voir Orange clairement assumer son nouveau rôle, celui de diffuseur de contenus.

Pour Didier Lombard, p-dg de l’opérateur,  » les contenus constituent l’oxygène [des] réseaux« . Les programmes proposés par les fournisseurs d’accès conditionnent désormais le choix d’un opérateur. Christine Albanel, abondant en ce sens, considère que l’amendement proposé rejette « toute concurrence entre les distributeurs de services, lesquels ne pourraient plus se démarquer aux yeux du consommateur« .

Fort de ce soutien de poids, Orange conserve son cap sans trop de crainte. Après tout, rien, n’assure que les sénateurs se montreront favorables à cet amendement.