L’Allemagne lâche Quaero

Le moteur de recherche européen se fera entre Français…

Google peut dormir tranquille. La vaste contre-offensive européenne dans le domaine des moteurs de recherche en ligne devient de moins en moins menaçante pour le géant américain. Le projet Quaero (‘Je cherche’ en latin) est passé du cap d’initiative européenne, à celui de projet franco-allemand pour finir aujourd’hui en dossier franco-français.

En effet, selon le premier bilan de l’Agence de l’innovation industrielle (AII) qui finance le projet Quaero est désormais un projet tricolore, piloté par Thomson et développé par Exalead, le champion tricolore de la recherche en ligne.

« Ce n’est pas un désengagement, mais une nouvelle structuration du projet. Il y a maintenant deux programmes au lieu d’un. » se justifie Jean-Louis Beffa, le président de l’AII, cité par Libération.

« Même si nous ne couperons pas les liens, nous poursuivrons désormais un projet national », explique Hartmut Schauerte, ministre allemand de l’Economie.

En effet, les Allemands devraient développer leur propre moteur, baptisé Theseus. Il semble en fait que la volonté allemande de travailler sur son propre moteur ne date pas d’hier.

Annoncé en avril 2005 par le Président Jacques Chirac, Quaero devait réunir Deutsche Telekom, France Télécom et Thomson, Bertin Technologies, Exalead, Jouve, LTU, des instituts de recherche (dont l’Inria, l’Inra, le CNRS, Clips/Mag, RWTH-AAchen et l’Université de Kalrsruhe), ainsi que des fournisseurs de contenus (dont l’INA et Studio Hambourg).

Les fondateurs visaient la sophistication technologique, histoire de faire mieux que Google, en s’appuyant sur des techniques avancées de transcription, d’indexation et de traduction automatique de documents audiovisuels multilingues, ainsi que de reconnaissance et d’indexation des images.

Mais très vite, des oppositions sont nées entre français et allemands. Les premiers privilégiant l’indexation audio et vidéo, les seconds optant pour l’analyse de texte (knowledge management).

« Quaero n’a jamais été franco-allemand ailleurs que dans la tête des politiques. On a vu des Allemands une fois lors d’une réunion, c’est tout »,indique ainsi un industriel français impliqué dans le projet.

Très vite, les partenaires allemands du projet, notamment Bertelsmann, SAP ou Deutsche Telekom quittent le navire. Ne restait plus qu’à officialiser le divorce. Ce qui est désormais fait.

« Il y aura un projet français et un projet allemand et comme ils ne travaillent pas sur les mêmes domaines, ils ne sont pas rivaux mais complémentaires : cela fera deux programmes au lieu d’un », explique l’AII qui tente de se consoler comme elle peut.

Car la dimension européenne de Quero qui valorisait le projet face à l’hégémonie des technologies US part en fumée. Et illustre une nouvelle fois la difficulté de la construction européenne. Incapables de nous entendre sur un moteur de recherche, le consensus autour de questions plus critiques comme une politique extérieure commune apparaît de plus en plus improbable.