L’ART souffle les bougies de la dérégulation

La fête est triste. Alors que le marché des télécoms vie une période de crise aiguë, se traduisant par une série de faillites et de difficultés, l’anniversaire de la dérégulation n’est pas très joyeux pour l’ART (Autorité de régulation des télécoms), le grand ordonnateur de l’ouverture à la concurrence.

Tout avait pourtant si bien commencé. En 1998, l’ouverture des télécoms à la concurrence faisait espérer monts et merveille. Et au débit, on pouvait y croire grâce à l’apparition de nouveaux acteurs se traduisant par une baisse des prix.Mais l’éclatement de la bulle Internet-Télécoms a refroidi tous le monde. L’ART constate ainsi avec regret la remontée des prix, le mécontentement des clients et le retour des monopoles, surtout en ce qui concerne Internet et le dégroupage. L’ouverture du marché des télécommunications locales ne s’est par exemple pas traduit par une baisse importante des prix. Selon l’ART, les opérateurs alternatifs ne proposent que 5% de réduction. Dans le même temps, le prix des abonnements à progressé. Pour la première fois, la part de l’accès aux services représente la majorité de la facture moyenne des foyers.Si France Télécom a perdu son monopole sur le local, il conserve néanmoins les trois quarts du marché. Les concurrents, Cegetel en tête, se partagent le reste grâce surtout à une politique agressive sur les prix qui semble aujourd’hui être stoppée.La concurrence n’a eu qu’un effet léger sur les prix Par ailleurs, le volume de communications locales ont fortement régressé (-31% entre 1998 et 2001) suite à la montée en puissance des mobiles. Le sans fil continue à générer autant d’argent mais la croissance connaît un net ralentissement. La France compte 37,8 millions d’abonnés soit un taux de pénétration de 62,7%. Un taux inférieur à la moyenne européenne. Par ailleurs, la facture moyenne a reculé de 4% (24,6 euros par mois et par abonné) ce qui reste faible compte tenu de la concurrence sur ce marché. Il s’agit donc une fois de plus d’un échec pour l’Art qui doit en plus prendre en compte le mécontentement des abonnés.Concernant Internet et le haut débit, l’ART est bien forcée de constater les dégâts. 82% des Français ne sont pas connectés, le haut débit progresse très lentement (7,1% des internautes), le dégroupage n’avance pas. Et la crise n’arrange pas les choses: les opérateurs n’ont plus trop envie de mettre la main à la poche. D’ailleurs, les investissements de ces derniers ont reculé de 8,6% en 2001, à 7,2 milliards d’euros. Haut débit et dégroupage: l’échec L’ART tente bien de tenir son rôle en forçant par exemple France Télécom a revoir ses tarifs sur le dégroupage (permettant à d’autres opérateurs de fournir de l’ADSL) permettant théoriquement une baisse des prix des abonnements. Mais le bras de fer entre les deux « institutions » est sans fin. L’Autorité propose désormais une solution alternative en se prononçant pour l’extension du rôle des collectivités locales dans le déploiement des réseaux haut-débit.Il s’agirait, pour le patron de l’ART, Jean-Michel Hubert, « de permettre aux collectivités de subventionner les opérateurs pour les inciter à s’installer sur leur territoire, ou bien de leur permettre d’établir elles-mêmes un réseau, là où aucun opérateur n’est susceptible d’intervenir dans des conditions viables ». L’idée semble séduisante mais elle exige une volonté politique forte…Enfin, l’ART veut croire au développement du câble comme support au haut débit. Si les abonnés à ce support ont progressé de 50% en un an, ils ne représentent encore qu’une faible minorité. L’Autorité préconise de modifier le cadre réglementaire des réseaux câblés afin d’inciter les opérateurs à investir. Pour l’ART, cette proposition illustre également sa volonté d’étendre son champ d’activité, le câble étant sous la tutelle du CSA.