Le forum rallume le débat sur le vote électronique

Le Forum des droits sur l’Internet publie sa recommandation sur le vote électronique. Pas sûr que les débats soient tranchés d’ici les élections européennes de juin prochain

A quelques mois des élections européennes, Le forum des droits sur l’Internet publie ce premier septembre sa deuxième recommandation sur le « Vote électronique et modernisation du processus électoral » datée du 30 juin. Les débats demeurent vifs.

La première recommandation du Forum datait de 2003. Depuis, les machines à voter, principal dispositif concerné, ont été utilisées au cours de huit élections ou consultations. En 2004 pour les élections régionales, en 2005 pour le référendum sur le traité constitutionnel européen, et, en 2007-2008 lors des scrutins législatifs, cantonaux et municipaux et présidentiels. Pour ce dernier, par exemple, 1,5 millions d’électeurs ont cliqué, soit un peu plus de 3,3 % du corps électoral.

Le vote électronique a suscité de vives critiques. Certaines collectivités ont fait machine arrière, Une association, CRII-Vote en France, a recueilli 1.000.000 de signatures en ligne contre le vote électronique, et les juges administratifs ont été saisis. Dans la classe politique, les verts, les socialistes et les communistes ont proposé un moratoire sur cette pratique. Et, au sein même du Forum, l’April a claqué la porte du groupe de travail sur le sujet, faisant inscrire sa « position minoritaire » dans la recommandation.

Débattre avant de cliquer

Le Forum qui rappelle prudemment que « la recommandation n’a donc pas vocation à prendre position sur l’opportunité de l’utilisation des machines à voter pour l’organisation et la conduite des élections dans notre pays » invite donc à un débat sur le sujet, notamment au niveau parlementaire. Celle-ci doit précéder les réformes « techniques » du code électoral.

Sur le plan méthodologique, le Forum engage les pouvoirs publics à rechercher « un niveau de sécurité équivalent » dans cette démarche, et à prendre en compte juridiquement et dans les processus la spécificité du vote électronique par machines à voter. Celui ci n’est pas « la transposition numérique du vote papier mais un mode spécifique d’expression citoyenne » rappelle-t-il. Concrètement, le Forum préconise une simplification du règlement technique du 17 novembre 2003, pour définir plus clairement « les attentes en matière de sécurité des dispositifs », ainsi qu’un accès plus transparent aux rapports d’expertises établis par les organismes de contrôle des machines présentées en vue de leur agrément.

Après cette étape et jusqu’au jour de l’élection, le Forum propose de nouvelles possibilités de contrôle, avec par exemple, l’ouverture des opérations de paramétrage des machines à des électeurs, des candidats ou une autorité de contrôle. Le jour du scrutin, les commissions de contrôles des opérations de vote pourraient également être chargées de veiller sur les opérations réalisées sur les machines à voter. Post scrutin, le Forum préconise une procédure alternative de recomptage des votes électroniques lors du dépouillement, basée sur une technique différente de celle utilisée par le fabricant et assurée par le bureau de cote, toujours sous l’oeil d’une autorité de contrôle de l’élection. Malgré plusieurs années de pratique, au niveau des coûts et de la fiabilité des processus, ainsi que de la satisfaction des électeurs, le Forum estime nécessaire des études complémentaires.

Les principales critiques contre le vote électronique-La sincérité du scrutin est remise en cause : l’électeur ne peut plus contrôler le bon déroulement de l’élection. En particulier, il ne peut plus participer au dépouillement, automatisé. -Le système des machines à voter est opaque, invérifiable. Et, ajoute l’April, même le logiciel libre ne constitue pas une réponse, puisqu’il faut être expert en informatique pour comprendre les codes. -Il est impossible d’effectuer un recomptage des bulletins. -L’intervention de sociétés commerciales dans le processus pourrait avoir un impact sur la sincérité du scrutin. -La procédure de vote par machines à voter pouvait conduire à des différences avec la procédure traditionnelle. Ainsi le vote nul n’est pas possible dans une procédure de vote électronique alors qu’il l’est dans une procédure traditionnelle de vote.