Le rapprochement d’Orange et Bouygues Telecom piloté par l’Elysée ?

Selon le Canard enchaîné, le rapprochement d’Orange et Bouygues Telecom servirait avant tout à l’Etat de prendre une participation au capital de TF1.

Début décembre, l’agence Bloomberg faisait part de discussions entre Orange et Bouygues en vue d’un rachat prochain de la filiale télécoms du second par le premier. Un mouvement présenté comme une consolidation nécessaire à la bonne marche du secteur des télécoms en France. Mais ce rapprochement dans les télécoms ne servirait qu’à cacher une manœuvre hautement plus politique : la volonté de l’Etat d’entrer au capital de TF1, la chaîne de télévision également mise dans la balance.

10% de TF1 entre les mains de l’Etat

C’est du moins le scénario qu’avance Le Canard enchaîné dans son édition du dernier mercredi de l’année. Selon le palmipède, « le groupe Orange, dont l’Etat français détient 23%, étudie une participation de 10% dans la chaine de Martin Bouygues ». Une participation de l’Etat dans le capital de la première chaîne privée du pays procurerait à l’Elysée un certain moyen de pression à l’approche de la campagne des élections présidentielles de 2017. Ce qui expliquerait éventuellement pourquoi Martin Bouygues avait rejeté l’offre de Patrick Drahi, le patron d’Altice (Numericable-SFR) prêt à mettre 10 milliards sur la table pour Bouygues Telecom, en juin dernier.

Et le Canard de citer un acteur des télécoms qui préfère garder l’anonymat : « Les politiques se contrefichent de l’accord sur les télécoms. Tout ce qui les intéresse, c’est TF1. Ils raisonnent encore comme il y a 30 ans. Dès qu’on parle du 20 heures, ils ont les yeux qui brillent. » Ni l’Elysée, ni Bercy n’ont jugé utile de commenter cette vision stratégique. Une autre source « proche du dossier » a déclaré à Reuters que cette information était « fantaisiste », rapporte de son côté ITespresso.fr.

Tout repose sur Iliad

Que l’Elysée soit à la manœuvre ou pas, le rapprochement de Bouygues Telecom et d’Orange ne serait maintenant plus qu’une question de semaines, avance l’hebdomadaire satirique. Quelques points restent à régler. Notamment celui de la participation d’Iliad (Free) invité à récupérer le réseau de Bouygues Telecom. En mars 2014, alors que Bouygues et Numericable/Altice faisait monter les enchères auprès de Vivendi pour acquérir SFR, Xavier Niel avait signé un accord avec le géant du BTP en proposant jusqu’à 1,8 milliard d’euros pour récupérer licences et infrastructure de téléphonie mobile de Bouygues Telecom. Le patron d’Iliad sera-t-il prêt à remettre au pot alors qu’il vient d’investir plus de 932 millions d’euros dans les licences des nouvelles fréquences 700 MHz ?

« S’il joue les radin, il prend le risque de faire capoter le deal, déclare au Canard un négociateur toujours sous couvert d’anonymat. Or, tous les opérateurs ont intérêt à une consolidation du secteur. » D’autant que Martin Bouygues garderait un pied dans les télécoms avec une participation estimée entre 10 et 12% du capital d’Orange. En d’autres termes, la pression de l’Elysée arrangerait tout le monde. Sauf, peut-être, les salariés de Bouygues Telecom qui avaient déjà dû essuyer un plan de restructuration conséquent à la pression concurrentielle provoquée par l’arrivée de Free sur le marché mobile début 2012.


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