Le verdict de Bruxelles contre Microsoft est très sévère : pourquoi?

15H30 – La Commission européenne a rendu public, ce 24 mars, comme prévu, son verdict à l’encontre du numéro un mondial du logiciel, accusé d’abus de position dominante: le montant de l’amende avoisine bien un demi-milliard d’euros. Mais surtout Microsoft a 90 jours et 120 jours pour modifier la situation!

Sans grande surprise, le commissaire européen en charge de la concurrence, Mario Monti, a annoncé la condamnation de Microsoft au paiement d’une amende forfaitaire de 497 millions d’euros, soit 613 millions de dollars. En revanche la sévérité des « attendus » est à souligner (lire ci-après). Le montant de l’amende est le plus élevé jamais infligé par les autorités de Bruxelles. Il est cependant nettement inférieur à celui évoqué voici quelques semaines, puisque le droit européen évoque une amende pouvant aller jusqu’à 10% du chiffre d’affaires, soit environ 3 milliards d’euros. Mais le montant de l’amende est de loin le souci le moins important de Microsoft, qui dispose d’une trésorerie largement excédentaire. 497 millions d’euros ne représentent qu’un pourcentage de la trésorerie du groupe et non une menace de mise en liquidation! Abus d’une position de quasi monopole Le motif invoqué dans l’arrêt de la Commission est l’abus d’une position de quasi monopole avec Windows: il est reproché à la firme de Bill Gates d’avoir obstrué la libre concurrence, en particulier sur le marché des ordinateurs serveurs sous Windows et celui des logiciels multimédia. Bruxelles justifie la sévérité de la sanction « parce que le comportement illégal continue actuellement ». Et elle exige, dans un délai fixé, des changements dans le mode de commercialisation de l’éditeur: elles lui demandent de révéler le code source du système Windows afin que la concurrence puisse se développer notamment dans les logiciels serveurs. Microsoft fait appel Steve Balmer, le p-dg de Microsoft, a ainsi indiqué que « Nous respectons la Commission, mais estimons que la proposition de compromis qui lui a été faite la semaine dernière offrait plus de choix et de bénéfices aux consommateurs européens ». Pourtant, a-t-il rappelé, « Nous avons travaillé dur pour parvenir à un accord avec la Commission ». Pas de surprise cependant, l’arrêt de la Commission fait suite à cinq années d’enquête et la décision était largement attendue. Mais plus que de modifier ses pratiques commerciales, c’est bien la nécessité de révéler ses sources qui inquiète l’éditeur. Les craintes du marché? L’appel de Microsoft risque de reporter de plusieurs années la conclusion définitive de la procédure engagée contre lui. Et de donner un large répit à l’éditeur, en laissant les choses évoluer vers une situation où les poursuites pourraient devenir caduques. La décision de Microsoft, qui là aussi était largement attendue, ne devrait pas modifier les perspectives du groupe, et donc rassurer les investisseurs si nécessaire. En effet, ces derniers ont eu le temps d’intégrer les divers scénarios liés à la décision de Bruxelles. Le montant d’une l’amende (aussi elevé?) a dû être provisionné dans les comptes depuis longtemps. Cependant, certaines dissonances font leur apparition dans les commentaires. Même si les bureaux d’études, comme Goldman Sachs ou Merrill Lynch, réaffirment leur confiance dans le groupe et son titre, la modification des pratiques commerciales de Microsoft ne peut que soulever l’inquiétude. Mais surtout, l’ouverture d’une partie du code de Windows pourrait redonner la main à certains concurrents du groupe, et modifier la configuration du marché avec la fin de la ‘position de quasi monopole’ de Microsoft sur le code des OS. Un ton particulièrement sévère

Le communiqué diffusé par la Commission ne fait pas de concession. Au contraire. Il invoque des  »

abus très graves et continus » et dénonce un « comportement illicite« . La Commission « ordonne à Microsoft de divulguer à ses concurrents, dans un délai de 120 jours, les informations (…) nécessaires pour que leurs produits puissent dialoguer » avec son système d’exploitation vedette Windows. » Elle l’enjoint également, dans un délai de 90 jours, de proposer aux fabricants d’ordinateurs une version de Windows « qui ne comprenne pas » le logiciel d’accès aux fichiers audio et video Media Player. « Les entreprises en position dominante ont une responsabilité particulière sur le marché« , a affirmé le commissaire européen à la concurrence Mario Monti, cité dans le communiqué. « La décision rendue ce jour rétablit les conditions d’une concurrence loyale sur les marchés concernés et pose des principes clairs quant au comportement que devra avoir, dorénavant, une entreprise jouissant d’un tel pouvoir sur le marché« , a-t-il ajouté. Pour le commissaire européen, Microsoft a « enfreint les règles de la concurrence communautaire en abusant de son quasi-monopole sur le marché des systèmes d’exploitation pour PC » afin de l’étendre aux « serveurs de groupe de travail ou aux lecteurs multimédias« .