LIVRES : Femme des cavernes et… semi-conducteurs

Comment penser l’innovation technologique ? Entre le pessimisme des écrivains, l’optimisme conquérant des industriels du secteur et les craintes des femmes des cavernes… l’exercice est périlleux

De « 1984 » de Georges Orwell au Mondial de l’Automobile à Paris version 2008, c’est une révolution. Accoucheuse de cauchemar dans le roman, la technologie sauve la planète, porte de Versailles.

Tels étaient du moins les termes du débat d’une table ronde sur cette grave interrogation: « Comment penser l’innovation technologique ? Quel sens lui donner pour qu’elle s’inscrive au service de l’homme et de la société » – table ronde tenue ce 7 octobre, à Paris – un des temps forts du forum Freescale Technology, du fabricant de semi-conducteurs.

Entre deux représentants de la société, Andreas Wild, directeur de la R&D, et Denis Griot, vice-président et chairman, était assis Michel Puech, philosophe, auteur d’ « Homo sapiens technologicus », paru aux éditions Le Pommier. Le principe : alterner les propos théoriques du philosophe et les exemples concrets amenés par des deux industriels.

Les réalisations technologiques permettent d’améliorer le confort de l’automobile, et, surtout, de diminuer son impact sur l’environnement ont été largement commentées.

« Au salon de l’automobile, on ne parle quasiment plus que d’écologie. L’intelligence que l’on met dans les objets va dans le sens de vos valeurs a commenté Michel Puech. L’objectif que j’ai avec mes clients et partenaires est de faire baisser la consommation de carburant en dessous du litre/100 km, car c’est un meilleur bilan énergétique que la voiture électrique » a voulu illustrer Andreas Wild, qui cite également, dans un autre domaine, un dispositif électronique bénéfique pour le développement durable : celui qui permet l’arrosage les plantes uniquement lorsque c’est nécessaire, économisant ainsi les ressources en eau.

Et d’autres applications existent, qui apportent des bénéfices dans le domaine de la sécurité, du confort ou de la santé, comme la pompe à insuline « qui injecte le produit nécessaire, au bon moment » ajoute Denis Griot.

La technologie rend-t-elle bête ?

La démonstration a suscité de nombreuses réactions dans le public. Tout d’abord, à force d’externaliser son intelligence dans les objets, l’homme ne devient-il pas plus bête, s’inquiète une personne, citant le contrôle automatique de vitesse, « avec lequel on roule à la même vitesse sous la pluie, ou lorsqu’il y a des tournants qu’en ligne droite »?

Et encore, est-on vraiment obligés de vivre avec toutes ces technologies, de réapprendre à se servir des fonctionnalités d’un nouvel appareil tous les deux ans, a interrogé celle qui s’est auto attribué le titre de « femme des cavernes »?

Pour Michel Puech, c’est là la question de « l’apprentissage« , qui a toujours été complexe, y compris, par exemple, pour apprendre à marcher, ou à se vêtir.

« Nous devons apprendre à maîtriser la puissance que nous donne ces outils. Nous avons déjà asservi nos lunettes et nos lentilles de contact » a expliqué le philosophe. Il a aussi observer que le fait de diminuer, grâce aux technologies, l’impact des voitures sur l’environnement ne rend finalement pas service à ce dernier, si c’est le transport individuel lui-même qui est en cause, le philosophe répond par une mise en garde : « La technologie n’est ni bonne, ni mauvaise, ni neutre« . Une conclusion qui n’a sa place ni chez Orwell, ni au salon de l’auto.