M. Coppet (AOL France) : ‘Nous avons réussi notre recentrage’

Il y a un an, AOL a décidé d’ouvrir son portail de services et de contenus à
tous les internautes. Ce changement radical dans la stratégie du portail
commence à porter ses fruits, selon le directeur du développement de la filiale
française du géant américain

En avril dernier, AOL a fait sa révolution. Le portail avait jusqu’alors une stratégie simple: recruter des abonnés et les fidéliser grâce à des services propriétaires comme la messagerie instantanée (AIM) ou les contenus multimédias. Une stratégie qui montré ses limites tant la concurrence dans ce secteur est acharnée.

Désormais, le groupe (AOL US et toutes ses filiales) ouvre son portail de contenus et ses services (comme la messagerie instantanée, AOL Photo ou le webmail) à tous les internautes, abonnés ou pas. Terminé l’environnement fermé et propriétaire d’AOL qui avait fait sa fortune mais aussi entraîné par la suite son déclin. Ces contenus, pour la plupart gratuits, sont disponibles à la demande via un portail ouvert et orienté Web 2.0.

Ce virage à 180 degrés et d’autant plus stratégique pour le groupe que les activités de FAI ont été cédées, notamment en France à Neuf Cegetel. Les revenus publicitaires tirés de ce portail ouvert deviennent donc primordiaux pour le groupe. Reste à savoir si cette stratégie porte ses fruits ? Elements de réponse avec Martin Coppet, directeur du développement d’AOL France.

Pouvez-vous tirer un premier bilan de cette nouvelle stratégie ?

On commence à ressentir les effets de ce recentrage mondial. Cette stratégie d’ouverture nous permet de toucher bien plus d’internautes. 95% de nos contenus sont désormais totalement ouverts. Et les résultats sont là. La chaîne musicale générait 100 à 200.000 visiteurs uniques par mois avant l’ouverture, désormais, elle attire plus d’un million de visiteurs uniques. Même chose pour les services. Depuis que nous avons ouvert AOL Mail, nous avons recruté plusieurs centaines de milliers d’utilisateurs. C’est très important, car ces applications génèrent de la fidélité.

La refonte des contenus a-t-elle joué un rôle ?

Oui, ouvrir le portail n’aurait pas suffit. Dès le départ, nous avons dit que nous tenions à développer des contenus à forte valeur ajoutée. Pour notre chaîne d’actualités, la thématique la plus consultée, nous proposons un flux mais nous produisons aussi et surtout nos propres contenus. Nous avons mis en place un partenariat avec Karl Zero. Autant d’éléments qui permettent une forte différenciation.

Vous avez également opté pour une démarché très Web 2.0.Là encore, il s’agit de se différencier ou de surfer sur le buzz ?

Le Web 2.0 permet en effet de différencier en permettant aux internautes d’interagir avec les contenus. Mais ce n’est pas une fin en soi. Il faut d’abord un contenu fort, une ligne éditoriale avant de mettre en avant le Web 2.0. Proposez simplement des blogs est peu efficace, d’ailleurs, le volume des contributions demeure faible à cause du phénomène d’abandon de la part des créateurs de blogs. Par contre, on observe un grand succès sur les contributions liés à des contenus forts comme la musique.

Les annonceurs sont-ils au rendez-vous ? Qu’en est-il de vos revenus publicitaires depuis un an ?

Notre recentrage a porté ses fruits. Nous avons réalisé un chiffre d’affaires publicitaire de 95 millions d’euros en 2005. Ce chiffre est passé à 126 millions en 2006 et nous tablons sur 50% de croissance cette année. Les services (mail, messagerie instantanée) génère du volume ce qui séduit les annonceurs. On s’y attendait. Mais la bonne surprise vient des contenus thématiques qui sont également très recherchés. Les annonceurs peuvent toucher une cible plus qualitative.

Développez-vous d’autres sources de revenus ?

Outre la publicité sur notre portail, et la régie interne qui la commercialise, nous louons notre savoir faire à des tiers. Ainsi, nous avons revu le portail de Neuf Cegetel qui sera mis en ligne cet été. Nous en assurons également la régie. Ce portail a été réalisé en co-branding, les deux marques sont présentes. Nous comptons développer ce type de deal avec des FAI et d’autres bassins d’audience.

Par ailleurs, notre régie travaille aussi pour le compte de sites Web tiers comme Seloger.com ou Sportever. Cette offre génère déjà 20% de notre chiffre d’affaires publicitaires un an après son lancement.

L’échange de vidéos suscite un grand engouement, allez-vous vous positionner sur ce marché ?

Oui. Une plate-forme est déjà prête, il s’agit d’UnCut qui est disponible aux Etats-Unis. Elle devrait être bientôt adaptée au marché français.

L’an dernier, AOL France avait également annoncé la disponibilité d’In2TV, télévision gratuite qui reprend les grandes séries de la Warner. Mais on a rien vu venir.

Nous sommes actuellement en discussion. In2TV est toujours prévu pour le marché français mais je ne peux pas donner de date de lancement.

Vos concurrents (Yahoo, Google) se lancent tête baissée dans le mobile pour porter leurs services dans les combinés. AOL n’accuse-t-il pas un grand retard dans ce domaine ?

Le marché est naissant, il faut trouver les modèles économiques, il est donc trop tôt pour tirer des bilans. Nous estimons que les places restent à prendre. Dans le même temps, nous investissons depuis cinq ans dans le mobile. Il s’agit d’étendre l’expérience Internet sur le mobile. Nous avons 27 sites Wap référencés dans les portails des opérateurs.