Mainframe : IBM z16 cherche sa place dans l’e-commerce

Face aux GAFAM et à Oracle, IBM invite ses clients à innover autour de la puce Telum de son nouveau mainframe z16, conçu pour l’IA et le chiffrement des données à la volée.

« Deux premières de l’industrie accompagnent le lancement du mainframe IBM z16 : son processeur Telum embarque un puissant accélérateur d’IA. Et il accueille le premier système de cryptographie post-quantique », lance Ross Mauri, le directeur général des mainframes IBM Z.

En termes de performances, l’accélérateur d’IA autorise 300 milliards d’inférences deep learning par jour avec 1 milliseconde de temps de latence. Une réserve de puissance significative pour les applications sous linux ou zOS, cependant difficile à matérialiser.

C’est pourquoi Ross Mauri choisit deux analogies plus parlantes : « Plus de 10 millions de voyageurs sont affectés par une annulation de vol chaque année. Si toutes ces annulations avaient lieu en même temps, l’IA embarquée du z16 pourrait les rerouter en moins de 30 secondes. »

Combiner e-commerce et chiffrement

Il enchaîne avec un autre exemple dans le e-commerce : « imaginez près de 8 milliards d’individus sur terre décidant de faire du shopping en ligne simultanément avec leur carte bancaire ; le système z16 pourrait alors gérer toutes les transactions chiffrées, de façon totalement sécurisée avec une détection de fraude, en un seul jour. »

Un démarrage sécurisé et une cryptographie post-quantique peuvent aider les clients IBM à contrer de futures menaces liées à l’informatique quantique, notamment des attaques de type « harvest now, decrypt later » pouvant conduire à l’extorsion, à la perte de propriété intellectuelle et à la divulgation de données sensibles.

« Dans le chiffrement actuel, on doit utiliser un algorithme assez fort pour résister aux attaques par force brute. Une clé inférieure à l’AES 256 bits pourrait être cassée rapidement avec un ordinateur quantique. L’IBM z16 restera à l’avant-garde, face à cette menace ,» assure Anne Dames, Cryptographic Technology Architect d’IBM.

Recentrage stratégique vers l’IA et le cloud hybride

Chiffrer les données et refuser les paiements douteux à la volée permettra de gonfler les recettes des enseignes en ligne. Telle est la promesse d’IBM en exécutant des workloads d’IA sécurisées sous linux ou zOS.

Pour autant, IBM saura-t-elle détourner les fintechs et les acteurs de l’e-santé de leurs projets en cours avec les géants du cloud autour de modèles d’IA soigneusement entraînés ? Le défi n’est pas des plus simples à relever.

Depuis plus d’une décennie, les applications d’IA sont conçues et mises à jour autour d’outils collaboratifs, de frameworks et de bibliothèques open source, partiellement retenus par IBM depuis trois ans seulement.

En outre, des problèmes de rentabilité viennent de la conduire à revendre Watson Health, sa filiale spécialisée dans l’IA pour les métiers de santé. Créée en 2015, cette branche avait pour ambition d’optimiser de lourds traitements médicaux (diabète et cancers) par l’analyse de vastes jeux d’images médicales.

Après plusieurs milliards de dollars engloutis, des contrats perdus et un turn-over important d’experts, Watson Health est partiellement reprise par la société de capital-risque Francisco Partners. La transaction est estimée autour d’un milliard de dollars et reste à finaliser d’ici à l’été 2022.

Red Hat, navire amiral pour le Cloud

Justifiant de faire de cette activité verticale une entreprise autonome, IBM évoque une cession stratégique. Rappelons qu’à l’automne 2021, la firme bouclait déjà l’essaimage de ses activités de gestion d’infrastructure IT dans la nouvelle entité Kyndryl, spin-off focalisé depuis sur la cyber résilience.

L’objectif de ces cessions ? Comme on taille la vigne dans l’espoir d’une récolte plus abondante, il s’agit de se concentrer sur des marchés réputés mûrs et rentables, à savoir le cloud hybride et les plateformes génériques d’IA.

Comment expliquer la stabilité et la haute disponibilité des mainframes depuis cinq décennies ? Les grands clients d’IBM ont développé des applications dédiées sous zOS puis linux, en s’appuyant sur le gestionnaire de données DB2.

Depuis, les migrations cloud les orientent vers une infrastructure et des systèmes plus ouverts, fournis notamment par la filiale Red Hat (OpenStack et OpenShift).

Au cours du dernier trimestre 2021, les ventes cloud d’IBM ont augmenté de 6,5% pour atteindre 16,7 milliards de dollars. Le chiffre d’affaires du cloud hybride a augmenté de 16% pour atteindre 6,2 milliards de dollars.

Olivier Bouzereau