Manuel Valls intensifie la lutte contre le cyberterrorisme

Le Premier ministre a détaillé mercredi les mesures de lutte contre le terrorisme après les attentats qui ont fait 17 morts à Paris. Les moyens humains et techniques des services de renseignement vont être renforcés pour mieux traiter le cyberdjihadisme.

Manuel Valls a précisé ce mercredi 21 janvier, à l’issue du conseil des ministres, les mesures destinées à renforcer la lutte contre le terrorisme après les attentats des 7, 8 et 9 janvier qui ont fait 17 morts à Paris. Au total 2 680 emplois supplémentaires vont être créés en trois ans et 425 millions d’euros débloqués. Internet et les services de renseignement sont au coeur du dispositif.

Les services de renseignement renforcés

« La première urgence c’est de renforcer les moyens humains et techniques des services de renseignement », a déclaré le Premier ministre. Ainsi, 1 400 des 2 680 nouveaux emplois annoncés concernent le ministère de l’Intérieur (dont 540 recrutements cette année). Sur ces 1 400 postes, 1 100 emplois seront affectés aux unités de renseignement chargées de lutter contre le terrorisme, dont 500 à la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure), 500 aux services centraux territoriaux du renseignement territorial et 100 à la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris. Dans ce cadre, 540 recrutements sont prévus en 2015 pour le ministère de l’Intérieur.

Les effectifs du ministère de la Justice vont également être renforcés (950 emplois prévus), ainsi que ceux des ministères de la Défense (250 emplois) et des Finances (80 postes). Le but : mieux combattre le terrorisme et ses réseaux. Les unités en charge de la lutte contre le cyberdjihadisme bénéficieront « d’équipements plus performants », a également promis Manuel Valls, sans donner plus de précisions.

Un fichier répertoriant les « terroristes »

« Les terroristes utilisent fréquemment les mêmes réseaux sociaux que le grand public. Notre plateforme de signalement de contenus illicites (Pharos) a reçu 30 000 signalements depuis le 7 janvier, soit six fois plus que d’habitude », a souligné le Premier ministre. Pour prévenir la radicalisation et « l’embrigadement djihadiste », 60 millions d’euros seront alloués et un site Internet d’information créé.

« Aujourd’hui, il faut surveiller près de 1 300 personnes, Français ou étrangers résidents en France, pour leur implication dans les filières terroristes en Syrie et en Irak. C’est une augmentation de 130% en un an », a souligné Manuel Valls. Viennent s’y ajouter « 400 à 500 personnes concernées par les filières plus anciennes ou concernant d’autres pays, ainsi que les principaux animateurs actifs dans la sphère cyber-djihadiste francophone », a-t-il ajouté. Au total « ce sont près de 3 000 personnes à surveiller ».

Annoncée dès la semaine dernière, la création d’un fichier des personnes condamnées pour terrorisme ou « judiciairement mises en cause » a été confirmée. Ces personnes « devront déclarer leurs adresses à intervalle régulier et informer de tout départ à l’étranger ». Il s’agit davantage d’une officialisation que d’une nouveauté pour les services de renseignement – la DGSI par exemple – qui gèrent, dans le secret, leurs propres fichiers.

La loi sur le renseignement et les écoutes

Le projet de loi sur le renseignement sera présenté début mars au Parlement, a annoncé le chef du gouvernement (le communiqué officiel évoque de son côté le mois d’avril). Le texte va inclure l’amélioration de la performance des systèmes d’interception (les écoutes administratives et judiciaires). « La loi de 1991 sur les interceptions a été conçue avant Internet. L’encadrement légal des opérations réellement conduites est lacunaire. Désormais, l’intégralité des opérations assurées sur le territoire national bénéficieront de la légitimité de la loi et feront l’objet d’une autorisation expresse. Ce sera un texte protecteur des libertés publiques, puisque chaque opération sera soumise à un contrôle externe indépendant, sous le contrôle d’une juridiction spécialisée », a tenté de rassurer Manuel Valls face aux risques de dérives d’une surveillance accrue des individus.

Il n’est donc pas question d’une législation d’exception, façon Patriot Act, en référence à la loi antiterroriste promulguée aux États-Unis après les attentats du 11 septembre 2001. « La proportionnalité des moyens de surveillance autorisés sera au coeur des opérations de contrôle », a assuré le Premier ministre. Présent à ses côtés, le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, a souligné l’importance de « mobiliser des moyens technologiques qui pour l’instant n’ont pas pu l’être ». Et ce, « dans le respect du droit ».

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