Mesures du réseau de Free Mobile : les méthodes de l’Arcep remises en cause ?

Selon l’Agence des fréquences, si les mesures du réseau mobile de Free par l’Arcep permettent de vérifier le taux de couverture, elles ne permettent pas de mesurer la réalité des usages.

Les syndicats des opérateurs n’ont cessé de le faire remarquer : les méthodes de l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) appliquées lors de la mesure des réseaux mobiles ne sont pas suffisamment efficaces en regard de la réalité du terrain. L’Agence nationale des fréquences (ANFR) tendrait aujourd’hui à leur donner raison.

Selon le rapport commandité par Éric Besson, ministre délégué en charge de l’Industrie, de l’Énergie et de l’Économie numérique, le système de mesure de l’Autorité ne permet pas en l’état d’évaluer efficacement le respect des engagements de Free Mobile, rapporte Les Echos (06/03) qui a pu mettre la main sur le document. Le régulateur utiliserait de fait des puces SIM « bloquées » sur le réseau de Free Mobile (et donc incapables de détecter les réseaux voisins). Dans ce cadre, le nouvel opérateur respecterait bien ses engagements de couverture, soit 27 % de la population pour les services voix (GSM) et 25 % de la population pour la donnée (2G/3G) à l’ouverture (taux qui monteront respectivement à 75 % et 69 % en 2017 puis 90 % et 83 % en 2020).

Les SIM de Free Mobile préfèrent Orange

Mais les usages sont tout autres. Les abonnés utilisent des puces SIM compatibles avec les réseaux mobiles concurrents. Notamment l’infrastructure d’Orange qui a signé un partenariat d’itinérance avec Free Mobile sur la 3G et supporterait plus de 90 % (on parle de 95 % à 97 %) du trafic de Free Mobile. Un taux disproportionné en regard de la couverture affichée par les antennes de la filiale d’Iliad et qui laisse à penser que, entre deux réseaux disponibles, le téléphone de Free a tendance à privilégier celui d’Orange.

L’ANFR pointe également l’espacement des antennes de Free Mobile qui augmente la dépendance au réseau de son fournisseur d’itinérance (en mobilité un utilisateur connecté à une antenne Free au début de sa conversation a donc toutes les chances de basculer sur une antenne Orange) ainsi qu’une mise à jour de détection du réseau effectuée seulement toutes les 30 minutes (ce qui, certes, augmente l’autonomie de la batterie des smartphones Free mais ne favorise pas la détection de son propre réseau).

Remise en cause des mesures

Enfin, le gendarme des fréquences note que « seules 70 % des stations de l’opérateur en émission sont entrées spontanément en interaction avec le mobile portant une carte Free », toujours selon le quotidien économique. En résumé, les paramètres des cartes SIM de Free Mobile ne favorisent pas forcément l’usage de son propre réseau.

Un choix qui ne doit rien au hasard selon Sébastien Crozier, président du syndicat CFE-CGC et UNSA France Télécom – Orange et porte-parole de l’ensemble des syndicats des opérateurs, qui estime que « l’amortissement du réseau [de Free Mobile] est plus cher que le coût de roaming dans le bilan comptable ». Privilégier le réseau d’Orange permettrait donc à Free de limiter la visibilité des dépenses de fonctionnement dans ses comptes… malgré un accord d’itinérance avec Orange qui risque également de peser. Selon les déclarations de Stéphane Richard, PDG d’Orange, le milliard d’euros initial sur cinq ans pourrait simplement doubler.

Éric Besson déclare, sur Twitter, avoir transmis le rapport de l’ANFR à l’Arcep. Reste à savoir si le régulateur le rendra public et remettra en cause ses méthodes de mesures comme le réclament les syndicats.

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