Microsoft veut ignorer les lois de la physique !

La lutte acharnée que mène Microsoft pour se maintenir à la tête du marché des logiciels, affronter Linux et conquérir celui des médias numériques, ne cache-elle pas la négation d’une loi de la physique, pourtant élémentaire : ‘tout ce qui monte? redescend’?…

Ces dernières semaines ont continué de révéler le positionnement de Microsoft sur le marché qu’elle domine. Tout d’abord victime de la pire vague virale jamais connue depuis qu’Internet et l’informatique existent. Ensuite à négocier afin de mettre fin aux poursuites anti-trust.

Un autre regard sur l’actualité?

Victime, sans nul doute, mais ‘consentante’, aux risques et périls de ses clients, à l’image de certains constructeurs automobiles qui cachent des défauts connus sur des véhicules, car le coût des réparations et procédures est inférieur à celui du retour en atelier de l’ensemble de la production !

Les pirates qui s’attaquent à nos micros et serveurs Windows, tout en ciblant le grand méchant loup Microsoft, ne font qu’exploiter des années d’approximation, de priorité marketing, de vitesse excessive en sortie de courbe ! A croire que le bug et la faille ont fait partie de la culture de Microsoft !

Quant au discours volontariste des têtes de firme, avec l’affirmation que la priorité est donnée à la sécurité des systèmes, ils ne font:

1-que confirmer ce que tout le monde savait, à savoir que les produits Windows souffrent d’un mal endémique de conception,

2-que cacher une réalité simple : ce n’est pas en quelques semaines que l’on renversera la vapeur sur une machine lancée à toute vitesse sur une voie où le client n’a eu que peu son mot à dire!

Un profond malaise? et un remède qui fait mal

Microsoft a claironné à qui voulait l’entendre, et à la presse consentante, que Windows Serveur 2003 est ‘le système d’exploitation le plus sécurisé au monde’, mais l’OS a subit les mêmes attaques que ses ascendants, et a été la victime des Blaster et Sobig, comme le reste de la famille.

Microsoft victime d’une cabale? Lorsqu’on est numéro un, il n’est pas surprenant d’être la cible des critiques, et lorsqu’elles sont justifiées, la concurrence en tire partie. Microsoft n’échappe pas à la règle. Du coup, la montée des systèmes alternatifs, Linux en tête, ne s’explique pas uniquement par la sécurisation affirmée d’un système ouvert.

Et puis, le parc installé Windows, toutes versions confondues, est tel qu’une faille devient un gouffre! D’ailleurs plutôt que d’attaquer commercialement de front les prospects et clients Linux, Microsoft ne pourrait-il pas se contenter de laisser les parts de marché de l’OS se développer, afin d’exploiter les erreurs et failles qui ne manqueront pas de se déclarer avec l’augmentation du parc concurrent ?

Le malaise Linux est plus profond qu’on ne le croit

Steve Ballmer craint-il Linux? Si oui, il a raison, non que le système libre soit en tous points meilleurs que Windows, mais parce qu’il répond à la démarche d’une communauté d’informaticiens et d’utilisateurs gagnée par le ras le bol des failles et des bugs qui s’enchaînent. Mais pas seulement…

Car Linux, c’est un côté d’un miroir qui pourrait s’ouvrir sur plusieurs dimensions. Celui de la reconquête d’un pouvoir, celui d’un retour des services informatiques et des développeurs, sans oublier l’argument économique de l’Open Source qui calme la pression des financiers. Tout l’opposé d’un Microsoft, du prix des licences, du standard et de la normalisation à l’échelle du monde.

Reste le pouvoir de l’argent

Quelque part, Linux c’est la contre culture d’une informatique revancharde passée sous contrôle des géants de l’informatique. Car il faut bien les évoquer ceux là, les IBM, HP, Dell, etc. Deux pouvoirs à proximité l’un de l’autre se comportent comme les deux pôles d’un aimant: ils se repoussent !

Face à la puissance de Microsoft, qui domine le marché des logiciels pour postes de travail, il n’y a que peu d’alternatives. Remplacer Office par une suite Corel Wordperfect ? Access par un Oracle dont on aurait réduit le prix en déduisant la part de rémunération de son fantasque patron ? Le PC par du Mac ? Je sais, il est des choses qui font mal, parfois !

Ce pouvoir alternatif, les constructeurs l’ont trouvé dans Linux. Imaginez, un système ouvert, sans contrôle économique d’aucune firme, réputé plus sécurisé que son concurrent, et surtout dénué de royalties à celui qui va aujourd’hui jusqu’à l’outrecuidance de vouloir leur imposer le design de leurs créations ?

Tout ce qui monte redescend, même Microsoft

Règle fondamentale du marché : le leader est toujours la cible de ses prétendants. Et il réunit inévitablement tous les défauts du monde ! A force de grimper impunément, le marché se retourne contre celui qui le domine. Ainsi va la nature humaine !

Il faut dite aussi que Microsoft a fourni à ses détracteurs les armes pour se battre ! Les bugs ne datent pas d’hier, ni la sortie prématurée des logiciels. Quant aux failles, internet est une source évidente de risques grandissants. Le phénomène n’est pas nouveau, et il semblerait que ce soit plutôt sa prise de conscience qui soit une nouveauté récente à Redmond.

Mais ce que Microsoft doit affronter aujourd’hui, ce n’est pas seulement la fronde de ses détracteurs. Car s’il est une firme qui dispose des moyens financiers et des compétences pour redresser le tir, c’est bien Microsoft. Même si ces démarches s’annoncent longues et délicates, sans oublier que le consommateur a la mémoire courte et pardonne souvent très facilement !

Non, la plus grande menace que Microsoft doit affronter, c’est une loi essentielle de la nature, une règle que la physique impose, et à laquelle l’économie ne peut déroger : la loi de l’apesanteur. Tout ce qui monte redescend !

On peut donc logiquement s’interroger : Microsoft a-t-il atteint son apogée ?

La question n’est pas anodine. La fronde qui s’oppose à lui n’est pas anodine non plus. Le logiciel, dont le système, est une part importante de la marge dégagée sur la vente de configurations. Et l’évolution des technologies se prête à l’adaptation et au renouvellement des applications.

Le quasi monopole de fait de Microsoft, sur les systèmes d’exploitation avec Windows, sur la bureautique avec Office, sur l’accès internet avec Internet Explorer ou sur l’affichage des médias avec Media Player, pour n’évoquer que ces domaines évidents, ne peut qu’inquiéter ses partenaires, alimenter ses détracteurs? et avoir une fin.

Et aussi entraîner un risque de déviances. La résolution à l’amiable des plaintes d’AOL et de Be Inc., qui lave officiellement Microsoft de tout soupçon, selon un doux euphémisme, les royalties obtenus sur des brevets que la firme aurait contrevenus, la volonté affirmée de ne laisser aucun répit à Linux, même en cassant sa marge, pourraient cacher une volonté de conserver sa position dominante, quitte à employer des techniques en marge de la légalité ou des règles commerciales.

Lorsque qu’une entreprise en arrive à de tels expédients, c’est généralement qu’elle est aux abois, et que si elle ne réagit pas rapidement, la fin pourrait être proche ! Une fin qui sera ici l’objet d’une lente agonie, car Microsoft dispose des moyens de résister et de créer l’illusion de son leadership. Mais surtout une fin dangereuse pour le marché !

Car avec ses moyens financiers et technoliques, Microsoft, mais aussi SAP et Oracle, ainsi qu’IBM et HP ou Intel, Toshiba et Sony, contrôlent le marché, sa distribution, ses développements. Et le risque est grand que l’innovation ne reste concentrée entre quelques mains, ou soit étouffée directement ou en la noyant dans la monstruosité de certains services de développement. Et que l’époque des génies qui s’épanouissent dans un garage ne soit révolue.

Et à bien y regarder, l’attitude de Bill Gates, qui quitte le contenant pour le contenu, peut aussi être prise comme un signe. S’il semblerait que Microsoft éprouve parfois des difficultés à prendre le virage des règles communes de l’internet, par exemple, il n’en ait pas de même pour son fondateur et première fortune des Etats-Unis. Bill Gates investit désormais, à titre personnel, dans les médias et la fourniture de contenu.

Tout ce qui monte redescend, Microsoft l’apprend à ses dépends, mais la descente risque surtout d’être longue.