Nicolas Sarkozy écrit à Bruxelles : 'il faut sauver la riposte graduée'

Le président de la République sort du bois. Après le refus du Parlement européen, le président de l’Europe adresse une lettre à la Commission pour qu’elle accepte la riposte graduée

Simple lettre de vœux ou coup de pression envers la Commission européenne ? Nicolas Sarkozy a adressé une lettre à José Manuel Barroso, souhaitant qu’il rejette l’amendement 138, révèle Electron Libre. Ce texte appelé aussi amendement Bono-Cohn Bendit est la motion votée par le Parlement européen qui a retoqué la riposte graduée.

La mesure votée lors du passage du Paquet Telecom au Parlement européen vise purement et simplement à supprimer ce dispositif très cher au gouvernement français pour lutter contre les « effets » du piratage. Approuvé même à une très large majorité (573 pour, 74 contre), l’amendement 138 énonce qu’aucune restriction à la liberté d’expression et d’information d’un citoyen ne doit être prise sans décision préalable de l’autorité judiciaire, ce que ne prévoit pas la future loi française….

Ce qui peut ressembler à une franche opposition de la part des instances communautaires passe pour un simple contretemps pour Nicolas Sarkozy. Une position inconfortable qui l’oblige à écrire cette lettre au président de la Commission européenne, José Manuel Barroso. La missive, reprise par le site electronlibre.info, est des plus limpide : « Il est notamment fondamental que l’amendement n°138 adopté par le Parlement européen soit rejeté par la Commission. Pour écarter l’amendement, je sollicite votre engagement personnel et celui de la commissaire en charge du dossier« .

La réponse de Bruxelles ne s’est pas faite attendre. Martin Selmayr, porte-parole de la Commission européenne en charge de la Société d’Information et des Médias, prend acte de la missive de Nicolas Sarkozy, et explique que l’institution communautaire pourrait suivre la décision du Parlement : « La Commission respecte la décision démocratique du Parlement européen. De notre point de vue, cet amendement fixe des principes importants notamment en ce qui concerne les droits fondamentaux des citoyens. Il s’agit de trouver le juste équilibre entre le respect de la vie privée, de l’accès à l’information et les droits des auteurs ».

Et de poursuivre: « la Commission comprend laspect hautement politique du débat en France, cela dit elle invite le gouvernement français à discuter autour de l’amendement 138 avec les ministres concernés des 26 Etats. Je rappelle qu’il est nécessaire (selon la procédure de la co-décision) qu’il y ait l’accord du Parlement et du Conseil de l’Europe pour qu’un amendement devienne une loi« . Une sorte de mise en garde contre toute ingérence de Nicolas Sarkozy dans les affaires de la Commission.

Une réponse qui pourrait ne pas satisfaire le chef de l’Etat puisque côté français, le Président a fini par s’exprimer sur l ‘épineuse question de la riposte graduée (comme nous le prédisions il y a quelques semaines). Une mesure pas franchement populaire et qui a le mérite de ne séduire qu’une faible partie des acteurs de la production culturelle.

Nicolas Sarkozy fait donc le grand écart entre une opinion publique farouche et des promesses de campagne. Un terrain difficile en tant que président de l’Union européenne pour une réforme placée dans son programme électoral.

Enfin, le chef de l’Etat fait face à des contraintes de calendrier puisque dès mercredi, le Sénat doit définir son ordre du jour pour les semaines à venir. Le projet Hadopi devant être voté en urgence si ses partisans souhaitent le voir être appliqué dès le début de l’année prochaine.