Tribune : à quoi et à qui peut servir l’Open data ?

Guilhem Duché - GFI Rennes

Responsable mobilité chez GFI Informatique, un spécialiste européen des logiciels et des services informatiques, Guilhem Duché signe cette tribune libre dans laquelle il revient sur le phénomène open data et son intérêt pour les responsables informatiques.

Retour d’expérience et difficultés rencontrées

Après maintenant plusieurs projets menés sur des démarches open data (Rennes, Nantes, Saône-et-Loire…) nous sommes en mesure de faire un premier retour d’expérience sur l’exercice que peut représenter la réutilisation de données publiques.

Parmi les critiques qui reviennent souvent, on peut notamment citer deux remarques. Tout d’abord, la qualité technique des données et la maintenance de celles-ci sont des points cruciaux et qui pour l’heure sont prises en compte de manière assez inégale selon les démarches d’ouverture de données et du type de données.

Ensuite, pour faciliter la réutilisation des données, la question de l’interopérabilité des données est une question clé. La réutilisation des données techniques via une application représente un investissement important : un expert devrait pouvoir sans difficulté exploiter son travail d’une collectivité à l’autre. Pour cela, des formats communs doivent être utilisés.

Enfin, on le voit bien en parcourant les données, l’intérêt des données brutes est très variable. Certaines sont très intéressantes et suscitent beaucoup de créativité (les données sur le transport notamment). Mais d’autres présentent une valeur intrinsèque bien moindre (position des arbres de la ville, des bureaux de vote…). Quand bien même l’open data ne fait pas de discrimination sur la donnée elle-même (et à juste titre, car cela permet à chacun de pouvoir par son travail dévoiler tout le potentiel d’un jeu de données), il serait bon de mettre à disposition des données très « riches » dans le seul et unique but d’animer et de soutenir la créativité des réutilisateurs, qu’ils soient journalistes, développeurs ou simples citoyens. En effet, la sélection des jeux de données ouverts, ainsi que les critères associés restent parfois obscurs. Plus de transparence dans cet aspect de la démarche open data serait profitable à tous.

Des axes de progression pour 2012

Pour les organismes qui se sont lancés dans l’ouverture de données, on peut dégager plusieurs axes d’amélioration. Comme on vient de l’évoquer, la question des formats de données est cruciale et doit amener à un meilleur échange entre les différentes démarches d’ouverture. En plus de faciliter la réutilisation des données, c’est une opportunité pour mutualiser les moyens mis en place pour l’open data. En effet cette démarche a un coût et il serait judicieux que les organismes se regroupent pour le limiter ou le partager, ou tout du moins pour que le travail réalisé par les uns puisse profiter aux autres.

Une véritable implication des pouvoirs publics en termes de communication, de transparence et d’éducation des citoyens est essentielle à la bonne réussite d’une démarche open data. À l’heure actuelle en France, ces démarches ont donné lieu à une mise à disposition d’une quantité considérable de données, mais elles ont toutes échoué dans la mise en place d’un véritable dialogue bidirectionnel entre les pouvoirs publics et les concitoyens. Les données brutes s’adressent toujours à un public expert et les pouvoirs publics se reposent trop sur les informaticiens pour promouvoir leurs données et leur démarche auprès d’autres professionnels et des citoyens en général. C’est au prix d’une implication forte dans la mise en place de canaux d’échange entre pouvoirs publics et citoyens que l’on peut espérer voir l’open data donner la pleine mesure de son potentiel. Et pourquoi pas, contribuer à mettre en place un véritable outil numérique pour une démocratie participative.

Du côté des “‘réutilisateurs““’ de données, le principal enjeu repose sur la pérennisation des services développés dans le cadre de l’open data. À l’heure actuelle, trop de réalisations faisant suite aux concours de développements, en France comme aux États-Unis, ne sont pas maintenues. Plusieurs explications existent, parmi lesquelles ont retrouve bien évidemment le coût de la réalisation et de sa maintenance. Les ‘réutilisateurs“’ devront donc à l’avenir se fixer comme objectif de générer un retour sur investissement suffisant pour justifier la maintenance de leurs services.

Retours sur investissement

Comme on le voit, l’open data représente de nombreuses opportunités d’améliorations pour les pouvoirs publics dans la gestion et la réutilisation de leur patrimoine de données. Au-delà des informations brutes qu’elles représentent, la vraie richesse des données se trouve dans les nouveaux usages qu’elles peuvent induire et dans les débats qu’elles peuvent faire émerger.

Tout cela à un coût, mais au moment du bilan, que l’on soit du côté de la mise à disposition des données ou du côté de leur réutilisation, il ne faut pas perdre de vue que le retour sur investissement peut prendre bien des formes. Il y a certes le nombre d’applications mobiles réalisées avec ces données, la valorisation de l’image de nos collectivités, mais pourquoi pas à terme une transparence améliorée et un dialogue renouvelé avec les concitoyens. Et ça, cela n’a pas de prix !

Crédit photo : GFI Informatique