Peer-to-peer: l’industrie du cinéma contre-attaque

Professionnels du secteur et FAI se sont entendus sur le principe de plates-formes payantes de téléchargement, à l’image de la musique. Il était temps

Le téléchargement illégal de musique fait la une de l’actualité. Pourtant d’autres secteurs sont concernés. Avec l’augmentation régulière des débits, les films sont depuis plusieurs mois les stars du ‘peer-to-peer’. Alors que cette nouvelle pratique ne semble pas avoir fait diminuer les entrées dans les salles obscures, l’industrie a décidé de réagir. Les professionnels du cinéma et les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) se sont ainsi retrouvés ce samedi à Beaune, en Bourgogne, pour convenir du principe d’une offre sécurisée et payante de films sur Internet comme parade indispensable contre le piratage.

« La contrefaçon menace la création et la diversité culturelle et finira par nuire également au public en appauvrissant la création. Une action urgente et coordonnée avec les professionnels concernés est donc indispensable », ont souligné le ministre français de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, et le président de la Motion Pictures Association of America, redouté organisme regroupant les grands studios américains. Lors d’un débat intitulé « Pour une nouvelle alliance entre les fournisseurs d’accès à Internet et l’industrie cinématographique?« , les professionnels du cinéma sont venus dire tout le mal qu’ils pensaient des FAI, accusés de contribuer au développement du piratage avec leurs offres à très haut débit. Ces derniers, représentés par Michaël Boukobza, d-g de Free, et Marie-Christine Levet, président de T-online France (Club-Internet, Deutsche Telekom), ont cité pour leur défense une étude affirmant que le piratage ne représentait en importance que la 5è utilisation du haut débit, et que 40% des internautes étaient prêts à payer pour télécharger de la musique et des films. A l’issue des discussions, les pouvoirs publics ont proposé d’ouvrir un forum de concertation afin de parvenir à un accord dans les plus brefs délais. Il serait temps ! Car beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis que les internautes téléchargent en masse des films avant ou après leur sortie en salle ou en DVD. Selon une étude du Centre national de la Cinématographie (CNC), 468 nouveaux films ont été piratés en version française entre le 1er août 2002 et le 31 juillet 2003: 52% étaient américains et 24,9% français. Au total, 36% des films sortis en salle durant cette période étaient disponibles, en version pirate, sur Internet. En moyenne, les films étaient disponibles sur Internet 37 jours après leur sortie en salle. Si le film est français, il n’est disponible qu’en moyenne 123 jours après; s’il est américain, c’est en moyenne 17 jours avant même qu’il ne sorte! Les copies pirates circulent quatre mois avant leur sortie en DVD, ce qui fait de ce marché la principale victime du piratage avec les vidéo-clubs. Selon un sondage réalisé en mars-avril 2004, 19% des internautes, soit trois millions de personnes, admettent avoir téléchargé des films. Au total, un million de téléchargements de films sont effectués quotidiennement, un chiffre à mettre en regard des 477.000 entrées réalisées chaque jour par les salles françaises. Cette prise de conscience n’est qu’un début. Car il faudra du temps à l’industrie pour se mettre d’accord : quelles technologies choisir ? quel prix ? quelles protections ? Il faudra des offres réellement séduisantes pour détourner les adeptes du ‘p2p’ ! Avec les débits actuels à 2Mb/s, il ne faut en effet que quelques heures pour télécharger un film gratuitement en qualité DVD.