Qualité mobile : pour l’UFC-Que choisir, l’Arcep doit aller plus loin

Pour l’association de consommateur, l’Arcep devrait distinguer le trafic issu du réseau d’Orange de celui de Free dans ses résultats sur les mesures de qualité des opérateurs mobiles.

L’Arcep y est presque mais doit encore faire des efforts. C’est le constat que porte Alain Bazot, dans un billet de blog, sur le rapport sur la qualité des services mobiles des opérateurs que l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes a présenté hier. Si le président de l’UFC-Que choisir salue les améliorations essentielles apportées à l’enquête 2016 par rapport à celle de l’année dernière, notamment en matière de comparaisons de la qualité de service selon la densité de population, il pointe une « regrettable constante : la piètre qualité de service obtenue par Free Mobile ! »

« L’opérateur collectionne les bonnets d’âne en termes de qualité, remarque Alain Bazot. Pire pour l’opérateur, et ses abonnés, non seulement il ne parvient que très rarement à se hisser sur le podium, mais en plus la remise d’une médaille autre qu’en chocolat semble constituer pour lui un mirage tant il est décroché de ses compétiteurs sur la qualité des services de l’internet mobile. »

Des résultats trop défavorables pour Free

Autrement dit, le président de l’association des consommateurs pointe les résultats par trop défavorables à Free. Et, sans remettre en cause leur intégrité, il s’interroge sur la cause réelle de cette différence entre la filiale d’Iliad et ses concurrents. Et invite l’Arcep à pousser un peu plus loin son analyse en allant jusqu’à distinguer le trafic de Free de celui d’Orange, que le premier emprunte dans les zones non couvertes par ses soins en 2G et 3G dans le cadre de l’accord d’itinérance signé entre les deux opérateurs (et qui coure jusqu’en 2022). « Quid des différences de qualité selon que le trafic généré par les abonnés de Free Mobile passe par le réseau propre de l’opérateur ou en itinérance ? », lance Alain Bazot.

Car les différences entre Free et ses concurrents sont telles qu’elles semblent en devenir douteuses aux yeux du responsable. « A titre d’illustration, alors que dans les zones rurales (à priori celles qui font le plus appel à l’itinérance Orange) le taux de réussite de l’accès à un site internet en moins de 5 secondes est équivalent à celui des autres opérateurs (autour de 40 %), dès que l’on s’intéresse au test de services plus gourmands en bande passante (téléchargement de fichiers de 10 Mo ou lecture d’une vidéo en streaming sur YouTube), c’est la débandade : Free Mobile est à minima 10 points derrière les autres opérateurs. »

Plus de transparence sur les données

Pour Alain Bazot, il est donc urgent que l’Arcep affiche plus de transparence dans les données fournies au public. « Les données [que l’Arcep] met aujourd’hui à la disposition du public en open data ne constituent majoritairement qu’une resucée de celles présentes dans le rapport ! », écrit-il. Et, dans ce cadre, n’apportent pas assez d’informations pour pouvoir juger de la pertinence des résultats. « Quid des données sur le téléchargement de fichiers selon le type d’extension (pour déterminer si les fichiers multimédias sont victimes ou non de restriction) ? », illustre à titre d’exemple le président de l’UFC.

Mais contrairement aux apparences, Alain Bazot ne cherche pas à défendre un Free qui serait victime de supposées méthodes de l’Arcep visant à le discréditer aux yeux des consommateurs. Bien au contraire. Tout en restant impartial, le président de l’association souhaiterait que le régulateur s’empare de ses chiffres pour « en tirer le bilan ». Notamment en regard du règlement européen sur la neutralité du Net applicable depuis le 30 avril dernier et qui vise à rendre illégale une gestion discriminatoire du trafic Internet. « Si les données aujourd’hui dans les mains de l’Arcep devaient traduire l’existence de telles discriminations, il serait intolérable qu’elle ne juge pas utile d’ouvrir une enquête approfondie sur les pratiques incriminées », s’enflamme le défenseur des consommateurs.

Alimenter la plainte de l’UFC contre Free

Une telle enquête arrangerait bien, a priori, les affaires de l’UFC-Que choisir. Voilà plus de 3 ans déjà que l’association a porté plainte contre Free « pour pratiques commerciales trompeuses ». Sans retour à ce jour. Et des résultats approfondis du régulateur seraient à même d’alimenter la plainte de l’association. « Combien de temps encore les consommateurs devront-ils attendre que la lumière soit faite sur la nature des restrictions sur l’itinérance Orange utilisée par Free Mobile ? », s’interroge Alain Bazot.

Le président semble néanmoins oublier que, d’une part, l’Arcep affiche la volonté de compléter son étude de données issues du crowdsourcing, donc des consommateurs eux-mêmes, dans un mouvement de « data gouv ». Et, d’autre part, que l’Autorité est dotée d’un pouvoir de sanctions qui, sans avoir à passer par la justice (sauf pour les demandes de perquisition), lui permet d’imposer aux opérateurs d’éventuelles modifications de leur comportement. Mais, plutôt que de sanctionner, le régulateur espère que l’ouverture de l’accès aux données collectées poussera les opérateurs à s’imposer eux-mêmes les corrections nécessaires pour améliorer leurs services face à ceux de la concurrence. Une sorte de course aux bons points plus saine et efficace que la stratégie répressive. Au risque de couper l’herbe sous le pied de l’UFC-Que choisir ?


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