Recap 2006 : Linux et open source

2006 aura probablement été pour le monde de l’open source moins une année
riche en nouveautés technologiques qu’une année charnière qui est venue
confirmer la tendance que nous évoquions l’an passé, la professionnalisation de
ses acteurs

S’il fallait qualifier l’année 2006 pour Linux et l’open source au travers d’évènements et de produits, nous retiendrons certainement trois moments forts, chronologiquement :

Novell SUSE Linux Enterprise Desktop 10

Pour la première fois, un grand éditeur d’une distribution Linux se lance sérieusement dans l’aventure du poste de travail. Certes, cette annonce était attendue, mais tout portait à croire que les acteurs de l’open source n’y croyaient pas, laissant à Microsoft, Windows, Office et Internet Explorer le champ du poste de travail.

Pourtant, Novell a relevé le défi, et c’est probablement sa première véritable contribution à la communauté. Il démontre qu’une alternative sérieuse à Microsoft existe sur le poste de travail. Et chacun de préparer sa distribution desktop. Il existe un autre avenir que Windows pour simplement saisir des documents, aligner des chiffres ou surfer en ligne, mais il faudra s’accrocher !

Novell annonce SUSE Linux Enterprise 10

Accord Microsoft et Novell sur Linux

La communauté a-t-elle fait plier le géant de Redmond, ou au contraire doit-elle craindre que Novell ait fait entrer le loup dans la bergerie ? Peu importe, le plus important c’est que Microsoft a enfin reconnu le monde Linux et qu’il ne puisse plus revenir sur cela.

Microsoft Windows supporte Novell Linux

Microsoft-Novell : et l’open source ?

L’accord est cependant porteur de beaucoup plus de choses que la simple reconnaissance ! Il est l’aboutissement d’une longue marche de l’industrie vers les standards, mais aussi vers l’interopérabilité.

Accord Microsoft (Windows) Novell (Linux) : la révolution est en marche

L’important n’est plus de savoir si Linux a sa place dans le paysage informatique, celle-ci lui est acquise et désormais reconnue par ‘l’ennemi héréditaire’ du pingouin. L’important aujourd’hui est que tout ce petit monde, car il s’agit bien d’un microcosme malgré les milliards qu’il draine, cohabite et communique.

Microsoft-Novell : ‘ Nous établissons un pont entre deux mondes ‘, nous a affirmé Bernard Ourghanlian, directeur ‘Technologie et Sécurité’ de Microsoft France

Java en open source

Sun Microsystems va ouvrir Java à la communauté open source. Enfin diront certains, trop tard pourrions-nous relativiser !

Java open source est un micro événement pour Sun, qui confirme sa volonté de basculer l’ensemble de ses environnements logiciels dans le monde du libre (afin de s’attirer la sympathie de la communauté et de ventre du service et du hardware?). C’est un geste fort, dont l’implication financière sera probablement faible car depuis longtemps Java n’appartient plus à Sun dont la communauté s’est bien passée sans état d’âme.

Sun ouvre Java à la communauté ‘open source’

En revanche, replacé dans le contexte de l’open source, Sun a libéré enfin un maillon essentiel de l’écosystème du libre. Désormais, avec Linux, Eclipse, Java et ODF (Open Document Format), la communauté du libre dispose des fondements – nous pourrions dire aussi de la plate-forme ou de l’environnement ? pour lutter à armes presque égales avec son redoutable adversaire Windows, .NET, Visual Studio et Office.

Java vit désormais sa propre vie ‘, nous a affirmé James Gosling, le créateur mythique de Java, à l’époque où l’open source n’était pas d’actualité.

Une page se tourne !

Et pourtant, l’essentiel de l’année 2006 n’est pas là ! Il est culturel et pourrait marquer le monde du libre pour longtemps, voire très probablement définitivement ! Le plus important à retenir de cette année charnière sera la séparation, la cassure, le gouffre qui s’est créé entre les deux approches de Linux et du libre, le professionnel et le hobby.

L’année 2006 n’aura pas été marquée par des changements technologiques profonds, à peine par des nouveautés. En revanche, Linux et l’open source sont devenus une affaire de professionnels, n’en déplaise à la communauté.

Faisons preuve tout d’abord d’un peu de réalisme. L’argument de la gratuité, de la licence libre, n’est qu’accessoire. Au pays des serveurs, du middleware, de la consolidation, du SOA, la licence est devenue une part négligeable des budgets informatiques. A l’exception bien évidemment de quelques très grosses applications ? SAP ou Oracle pour ne citer que ceux là -, qui comme par hasard n’ont quasiment pas de concurrence sérieuse dans le monde de l’open source, l’essentiel d’un budget est désormais consacré au conseil, au développement, au déploiement et au support, étonnamment (vraiment ?) tout ce qui fait partie du modèle économique de l’open source.

Quelle est alors la place à la passion et au fanatisme de la première heure ? Les contributions bénévoles, certes, mais seulement sous contrôle des responsables des projets et des plates-formes. Les jeux sont faits et désormais le hobby n’a plus sa place.

Cette vision du monde libre trouve une expression inattendue dans le clivage qui s’élargit entre le noyau dur des développeurs du kernel Linux, avec à leur tête Linux Torvalds, et la FSF (Free Software Foundation), lors des travaux sur GPLv3. Le pragmatisme des premiers les oriente vers la volonté de conserver un code libre, tandis que l’idéalisme des seconds les oriente plutôt vers la présence de clauses anti DRM (Digital Right Management).

Linus Torvalds refuse la licence ‘libre’ GPL v3, le créateur de Linux a affirmé qu’il ne veut pas livrer le noyau Linux.

Autre exemple flagrant, l’évolution de la distribution Linux Ubuntu. Même si elle reste libre, elle migre lentement mais sûrement une approche professionnelle régie par ses propres règles.

Et que penser de la guerre des prix qu’à lancé Oracle ? Casser les prix sur un produit réputé gratuit, ce n’est pas très communautaire, ça !

Comme on le constate, deux mondes commencent à s’affronter et à évoluer dans une fourchette dont les branches s’écartent inexorablement ! Une branche idéaliste et une branche commerciale. Qui va gagner ? Il est à craindre que les jeux ne soient faits, et depuis longtemps. Depuis d’IBM a investi le monde de l’open source, par exemple? Car si les premiers ont la foi, les seconds tiennent les cordes de la bourse !

Quelques moments forts publiés par Silicon.fr Assises de la Sécurité : et l’Open Source ? Une table ronde animée des Assises de la sécurité a permis d’évoquer les apports de l’Open Source en matière de sécurité et ses rapports avec les solutions propriétaires. Open Source: les développeurs créent un réseau à la mode Microsoft. Le FSG (Free Standard Group) a lancé LDN (LSB Developer Network) une plate-forme d’information et de librairies Linux dont l’ambition est d’être le MSDN (Mic rosoft Developer Network) de l’open source Les pirates séduits par l’Open Source. Les auteurs de programmes pirates reprennent à leur compte la méthodologie qui a fait le succès de l’Open Source pour développer leurs ‘bots’. ISO : le format OpenDocument fait l’unanimité. Malgré le désintérêt de Microsoft, l’ISO a reconnu à l’unanimité le format de document ODF, ce qui en fait un standard mondial. USA : la révision des processus de brevets ‘open source’. L’Office américain des brevets va modifier sa manière de traiter et suivre les brevets logiciels connexes.Et en France ? Les futurs députés seront ‘libres’, les logiciels ‘libres’ équiperont les ordinateurs de l’Assemblée nationale dès la prochaine législature OpenOffice fait son chemin dans l’administration française. Le ministère du Budget et de la réforme de l’Etat fait un premier bilan, 400.000 postes dans les administrations françaises auront migré sur OpenOffice.org avant 2007.