Salon IBC : Qualcomm tente d’imposer son MediaFlo (TV Mobile)

Face aux succès du DVB-H, notamment en Europe, le fondeur américain estime
que la bataille est loin d’être terminée…

Amsterdam (Pays-Bas) – La vingtième édition du salon IBC, dédié aux contenus numériques et aux technologies de diffusion, a été placée sous le thème de la mobilité et particulièrement de la TV Mobile. Alors que les lancements européens se précisent (encore que…), l’américain Qualcomm est venu en force dans la ville néerlandaise afin de démonter que sa technologie maison, le MediaFlo, est loin d’avoir perdu la guerre. Rappelons en effet que le DVB-H, solution poussée par Nokia, a été choisi par de nombreux pays européen et même par la Commission européenne.

Mais les américains sont les rois du lobby. Et le fondeur n’a pas ménagé ses efforts pour convaincre participants et journalistes de la pertinence de son modèle.

Si les jeux ne sont pas encore faits, la TV mobile diffusée (ou TNT mobile) est un marché émergent, balbutiant, Qualcomm accuse néanmoins un retard certain malgré les qualités de sa solution.

« Techniquement parlant, le standard MediaFlo apparaît comme intéressant aux yeux des acteurs : bonne efficacité spectrale, bonne qualité d’image, temps de zapping court », peut-on lire dans une étude d’OC&C sur la TV mobile. « Cependant, celle-ci présente deux contraintes de taille. D’une part, son statut propriétaire est un frein majeur à son développement à l’échelle européenne où des technologies non propriétaires sont à l’essai depuis plusieurs années et généralement préférées. D’autre part, il est assez peu probable que l’ensemble des acteurs abandonnent les travaux et réflexions menées jusqu’ici pour se pencher sur une technologie présentée trop récemment. Ainsi, malgré des performances techniques plus qu’honorables, les délais induits et le statut propriétaire de MediaFlo permettent d’ores et déjà de la considérer comme non éligible à l’échelle française voire européenne ».

« Meilleur business model »

Il est vrai que face aux multiples expérimentations et lancements du DVB-H dans le monde, et surtout en Europe, le bilan du MediaFlo apparaît encore bien maigre. Des expérimentations ont lieu en Grande-Bretagne avec BSkyB et au Japon avec KDDI et Softbank. Un seul lancement concret a été opéré, il s’agit du service VCast de Verizon aux Etats-Unis, dispo dans 44 villes. AT&T a prévu un lancement à la fin de l’année.

Côté fabricants de terminaux, neuf entreprises font partie du FloForum dont Samsung, LG, Motorola, Sharp et Toshiba qui ont ou vont lancer des mobiles compatibles.

Si MediaFlo a perdu la première bataille, il n’a pas perdu la guerre. Tel est le credo du très optimiste Jerry Hanley, Regional Director Business Development Europe MediaFlo pour Qualcomm. « Rien n’est joué. Le marché ne fait que démarrer. Les opérateurs vont s’apercevoir que leurs besoins vont évoluer et que MediaFlo peut répondre à leurs demandes. Car notre solution est plus qualitative que le DVB-H. La qualité de l’image est meilleure et l’on sait qu’une bonne QoS est essentielle pour le succès de ce marché. On peut proposer plus de chaînes (voir encadré), plus d’interactivité et la couverture à l’intérieur des bâtiments, une demande forte des utilisateurs, est meilleure » .

Surtout, Qualcomm n’apprécie guère qu’un standard soit de facto imposé, surtout depuis que la Commission européenne a décidé d’en faire un standard dans l’UE. Une décision qui n’a pas été digérée par le fondeur. « En régulant un service avant son lancement, on risque de tuer le marché », s’emporte le Regional Director. « Les opérateurs devraient avoir le choix, un standard unique n’est pas une bonne solution économique. Les technologies peuvent très bien cohabiter, d’autant plus que MediaFlo est assez proche du DVB-H. D’ailleurs, les principaux fournisseurs de services sont agnostiques ».

Marché multi-standards

Pour le groupe américain, aucune solution ne s’imposera vraiment : « Nous pensons qu’il y aura une convergence des technologies, les mobiles supporteront deux ou trois normes, à des prix agressifs ».

L’avenir le dira. En attendant, Qualcomm enfonce le clou. Et vise directement le portefeuille des opérateurs. « MediaFlo permet le meilleur business model possible pour les opérateurs », affirme Omar Javaid, VP du business development MediaFlo pour Qualcomm. Explications : « D’abord parce que notre solution s’approche de très près de l’expérience TV classique, ensuite elle permet de l’interactivité, enfin MediaFlo est conçu et packagé pour une offre multi-chaînes payantes (abonnement) et gratuites, sans impact sur le business. Permettre aux opérateurs de proposer simplement 34 chaînes gratuites et payantes est un argument de poids lorsque DVB-H est limité à 15 canaux. En bref, je dirais que MediaFlo est une solution alors que le DVB-H n’est qu’une technologie », explique Jerry Hanley.

Pour parvenir à ses fins, Qualcomm fait le tour des opérateurs et des équipementiers de la planète mais laisse le soin au FloForum d’accentuer la pression. Sorte de lobby composé d’équipementiers, d’éditeurs et d’acteurs divers, ce forum est le bras armé et masqué de Qualcomm. « Notre objectif est d’étendre l’écosystème MediaFlo », explique laconiquement Kamil Grajski, président dudit forum. Et de répéter le discours officiel du fondeur :  » Nous pensons véritablement que le marché sera multi-standards. Il nous semble évident qu’en Europe, DVB-H ne sera pas le seul compte tenu des besoins des opérateurs ».

Optimisme acharné ou véritable raisons d’y croire ?, Qualcomm qui a déjà investi 800 millions de dollars dans MediaFlo, estime néanmoins avoir déjà rempli ses objectifs. « Les lancements aux Etats-Unis nous permettent déjà d’être profitable. Si nous perdons à terme la bataille en Europe, on se concentrera sur les USA, l’Asie, l’Océanie, l’Afrique, l’Europe de l’Est où les potentiels sont tout aussi importants ».

Comparatif des différentes technos de TV Mobile. Source : OC&C Strategy Consultants