Selina Lo (Ruckus Wireless) : « Le wifi va être complémentaire des small cell 3G et 4G »

Selina Lo, cofondatrice et CEO de Ruckus Wireless

Selon Selina Lo, CEO du constructeur wifi Ruckus Wireless, les opérateurs auront recours au wifi pour renforcer leur infrastructure mobile.

Créé en 2004 aux États-Unis pour répondre aux problématiques de l’IPTV sans fil, Ruckus Wireless s’est vite tourné vers les entreprises pour répondre à leurs besoins de connectivité et sortir d’un marché des box minuscule à l’époque.

Insignifiant sur le marché mondial en 2008, Ruckus s’est hissé à la troisième place avec 5% à 7% des parts derrière Cisco (50%) et Aruba Networks (15%). Et ambitionne de dépasser le numéro deux HP sur le secteur des solutions pour opérateurs fournisseurs d’accès. Un secteur qui revient en force.

De passage éclair à Paris, la cofondatrice et CEO de Ruckus Wireless Selina Lo a partagé avec Silicon.fr l’évolution du marché du wifi et le positionnement de son entreprise.

Silicon.fr : On parle aujourd’hui beaucoup de 4G pour résorber le trafic mobile. Mais qu’en est-il du wifi ?

Selina Lo : le trafic mobile explose et, même avec la 4G, les réseaux vont saturer. La solution nécessite toujours plus de cellules (antennes) pour couvrir les petites surfaces. Le wifi est ainsi vu comme la première étape pour les opérateurs à travers les hotspots qui deviennent des éléments à part entière de leur réseau.

Par exemple, à Londres, l’opérateur O2 équipe les lampadaires de points de connexion wifi car il n’est pas encore prêt à le faire en 3G ou 4G. Mais la municipalité limitant le nombre d’équipements à un seul par lampadaire, il y a une vraie stratégie à occuper le terrain. Vous allez voir ce phénomène arriver rapidement, même en France.

Les small cells, qui permettent de décharger le réseau de l’opérateur mobile, ne viennent-elles pas concurrencer les hotspots wifi ?

Avant, les small cell de rue pouvaient être concurrentielles des solutions wifi. Mais les spectres des fréquences attribuées ne suffisent pas à couvrir la charge du trafic en sans-fil. Il faut tirer de la fibre. Ce qui coûte cher.

Le wifi s’avère plus économique. Il n’y a pas de raison que les opérateurs ne se tournent pas vers le wifi. Le wifi va être complémentaire des small cell, c’est la première étape.

Mais la nécessité de s’identifier sur les accès publics reste aujourd’hui un frein à l’usage du wifi…

La norme Hotspot 2.0 permettra au client d’accéder automatiquement au wifi de n’importe quel opérateur (après une première authentification), à condition qu’il y ait des accords d’itinérance entre eux, ce qui va pousser les opérateurs à signer ces accords.

Un client Orange pourra alors se connecter en wifi sur un réseau AT&T aux États-Unis en toute transparence, par exemple. Hotspot 2.0 nécessite une simple mise à jour logicielle. Elle sera livrée courant 2013 pour les hotspots et les terminaux suivront.

Que représente le marché du wifi des opérateurs ?

Le wifi pour les opérateurs représente un petit marché de 500 millions de dollars aujourd’hui. Mais, il est très prometteur. Selon Infonetics, il devrait atteindre les 3,5 milliards de dollars en 2016. Le marché des small cell est beaucoup plus large, mais personne n’a réellement implémenté de solution substantielle aujourd’hui.

L’outdoor représente 10% à 15% des 40 milliards de revenus du wifi mondial. Mais il est stratégique de se positionner dessus pour gagner des appels d’offres, notamment du côté des universités, des hôtels, des restaurants…

Quelles évolutions du wifi les entreprises peuvent-elles attendre ?

La deuxième vague du wifi 802.11ac, attendue en 2014, intéressera les entreprises car les débits monteront à 1 Gbit/s grâce au support du multi MIMO (agrégation de plusieurs antennes) alors que, à 600 Mbit/s, la première vague n’offre pas une différence tangible avec le 802.11n.

Ruckus Wireless ZoneFlex 7982, un hotspot qui peut gérer 4000 chemins de signaux différents
Le boîtier transparent (pour la démonstration) du hotspot ZoneFlex 7982 permet d’apercevoir les différents éléments d’antennes qui permettent de gérer 4000 chemins de signaux différents.

Comment l’offre de Ruckus se distingue-t-elle de ses concurrents ?

Ruckus se distingue technologiquement notamment par ses capacités à mesher (créer un réseau de hotspots wifi communicants entre eux, NDLR) le wifi indoor et outdoor.

Par exemple, pour mettre en place un réseau de caméras de surveillance du parking d’un hôtel en extérieur relié au réseau intérieur. Un seul contrôleur permet d’assurer l’administration de ces deux réseaux alors vus comme un seul. Mais dans les deux cas, c’est le même logiciel et les mêmes antennes.

Autre spécificité, notre technologie SmartAntenna permet d’adopter automatiquement et dynamiquement la portée du signal aux besoins immédiats. Notre technologie permet notamment de gérer la polarisation verticale et horizontale du signal. Ce qui permet d’apporter une connexion de qualité que l’on tienne une tablette à plat ou un smartphone debout.

Nos concurrents ont tendance à proposer des antennes unidirectionnelles statiques. Ce qui les oblige à multiplier le nombre d’antennes qui finissent d’ailleurs par interférer entre elles. Nous, on crée des signaux personnalisés selon les besoins du client. Dans un boîtier comme le ZoneFlex 7982, il y a 19 éléments d’antennes qui génèrent 4000 chemins possibles du signal.

Que représente le marché européen pour Ruckus et comment vous positionnez-vous en France ?

Le marché européen représente entre 25% et 28% de notre chiffre d’affaires (de 214 millions de dollars pour un bénéfice net de 31 millions en 2012, NDLR).

En France, nous avons une forte présence auprès des entreprises. Nous sommes présents dans le secteur public (avec 80 mairies équipées, les CCI du Havre, d’Anger), l’hôtellerie (Mariott, Hilton) et les campings, nous pénétrons le secteur de la santé (CH de Neuilly-Courbevoie), la Fondation Rothschild, plusieurs Epad, le siège de Vivendi…

On adresse le wifi pour des applications métiers précises. Et nous abordons le marché des opérateurs. Nous devrions faire une annonce avec un client français à fort potentiel d’ici 3 mois.


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