Semiconducteurs : quels coups de poker pour Altis et NXP ?

Les deux fabricants de semiconducteurs n’ont pas seulement en commun de chercher des financements. On s’interroge sur la sincérité et la solvabilité des investisseurs…

« Le profil de NXP peut incarner la caricature du LBO désastreux » écrit Le Monde de ce 11 août.

Le grand quotidien du soir se fait ainsi l’écho de la mise en bourse très décevante du géant hollandais des semiconducteurs -NXP- dont l’IPO, à la Bourse de New York ce vendredi 6 août n’a pas manqué d’intriguer sinon d’inquiéter.

« Un investissement dont on aimerait se défaire mais dont personne ne veut« , constate les analystes.

Pour rappel, NXP avait été acquis en 2006 par les fonds d’investissements Kohlberg Kravis & Roberts (KKR), Bain, et trois autres fonds auprès du groupe Philips.

Ce 6 août, c’est 14% du capital qui ont été mis en jeu. Or le résultat est décevant. Les fonds ainsi levés à New York s’élève à moins d’un demi-milliard de dollars (476 M $ exactement) alors que l’on en escomptait 1,15 milliard selon les prévisions présentées en avril.

Le prix de l’action, fixé à 14 dollars, constate l’agence Bloomberg, a été de 46% inférieur à celui qu’avait payé les fonds d’investissement.

Or rien ne dit que le cours de cette action va monter en flèche.

On est très loin de la « jolie culbute financière » auxquels ces fonds nous ont habitués.

Ici, c’est l’option du LBO qui n’a pas bien fonctionné -option où l’on a fortement recours à l’endettement et à la participation des managers et salariés… à qui on a demandé de partager le risque. Et ensuite, la nouvelle direction se charger de couper les coûts pour rentabiliser à tous prix dans les mois qui suivent.

Aujourd’hui la dette « LBO » de NXP est devenue anormalement lourde. « A fin 2009, NXP affichait 5,28 milliards de dollars de dette pour des ventes en chute libre. Bilan : 4,3 milliards de pertes nettes accumulées entre 2007 et 2009. »

« C’est la caricature du LBO désastreux« , constate Le Monde. L’entreprise de retrouve surendettée, fragilisée, au bord de la faillite.

« Les fonds resteraient-ils ainsi des « barbares » pour les entrepreneurs« ? Barbares? C »est le surnom donné à KKR par les auteurs d’un livre paru en 1990.

Mais ne serait-ce pas un calcul? Existerait-il une porte de sortie?

« D’une certaine manière, une action à un prix moins élevé que prévu nous offre une marge de progression« , explique l’actuel CEO de NXP.

La question est aussi celle de la pérennité et de la rentabilité de l’industrie des composants. Ceux qui suivent la compétition entre Intel et AMD voient régulièrement ce qu’il en coûte. AMD, qui vient d’avoir gain de cause devant l’arbitrage de la FCC, a dû recourir à des fonds souverains (Abou Dhabi) alors même qu’il est numéro deux du secteur…

Ce qui ramène au cas Altis

S’agissant de cette ex-filiale d’IBM et Infineon, la suite du feuilleton se veut plus rassurante. Même si des questions restent en suspens (cf notre article: Altis (Corbeil) le sauvetage est en bonne voie, dit le ministre Estrosi )

Dans un entretien au quotidien Les Echos, ce 11 août, Yazid Sabeg, qui tient l’une des clés de ce dossier, se veut rassurant:

« Altis dispose de capacités industrielles et d’une offre technologique permettant de figurer durablement dans l’industrie européenne des semi-conducteurs aux côtés de STMicroelectronics« , explique-t-il.

Et d’ajouter : « Altis conservera un accès à la feuille de route technologique d’IBM au travers de l’alliance (avec Samsung, Sony, AMD, STMicroelectronics). Ces liens vont notamment lui permettre d’offrir à ses clients en exclusivité européenne, en 2011, la technologie silicio-germanium pour la fabrication de composants innovants téléphones 4G« .

Toujours selon Yazid Sabeg, Altis pourra investir 200 millions d’euros en R&D dans les 6 ans qui viennent. Sera-ce suffisant?

Quant au chiffre d’affaires, il pourrait se situer entre 180 et 200 M€ en 2010, et entre 300 et 320 M€ en 2013 – « sans compter les revenus issus des nouvelles activités« .

Le point d’équilibre d’exploitation pourrait être atteint fin 2010, en étant à 50% de la capacité de production. Mais le commissaire de la République à la diversité, et président du conseil d’administration de CS (Communications & Systèmes) admet que les prix seront « 10 à 15% » supérieurs à ceux des taïwanais… Pas gagné!

( A suivre )