Vers des services d’infogérance standards ? Si les grands comptes y mettent du leur

Depuis de nombreuses années, l’industrie des services informatiques et les donneurs d’ordres essayent de s’orienter vers une infogérance de plus en plus standardisée. Pour des résultats encore très mitigés, estime Dominique Raviart, analyste chez NelsonHall.

La crise informatique de 2002 a été un élément clef vers une industrialisation des services d’infogérance, la mise en place de « best practices » et l’utilisation des librairies ITIL. Le but poursuivi est bien de réduire les coûts et les prix et d’homogénéiser les manières de travailler chez un même client.

Le mouvement ne s’est pas arrêté là. Depuis deux à trois ans, les SSII étendent cette approche de standardisation au hardware et au software. Concrètement, les prestataires informatiques tentent de s’aligner sur un nombre réduit de produits relativement indifférenciés d’un seul fournisseur pour le stockage, les serveurs x86 ou les outils logiciels de service management par exemple. L’effort est louable et constitue une étape logique vers une homogénéisation de l’informatique. Malgré tout, même si cet effort concerne des produits informatiques à faible différentiation, l’adoption par les clients ne va pas forcément de soi.

Dans sa version IaaS, le Cloud constitue une nouvelle étape majeure vers des services d’infrastructures plus « productisés », que ce soit au niveau de l’hébergement, du hardware, du logiciel ou des services de support. Une étape majeure…  que les donneurs d’ordre ont du mal à franchir.

L’adoption du cloud d’infrastructure par les clients est essentiellement centrée autour des offres de cloud privé, que ce soit dans leurs centres de données ou dans ceux de prestataires. Le manque d’appétit des donneurs d’ordres pour le cloud public ne traduit pas que leurs interrogations en matière de sécurité.

Contrats standards : les SSII n’y arrivent pas

Au-delà de cet élément, la transformation et la migration du matériel informatique et de l’applicatif masque des projets risqués, importants. D’autre part, à l’heure où l’informatique se tourne vers une approche business, une migration vers un cloud public s’apparente avant tout à un projet technique. Un chantier qui risque fort de laisser les entités business de marbre…

Parallèlement au cloud, les SSIII développent depuis des années des offres de service packagées. Ceci est particulièrement vrai pour les offres où les marges sont réduites, telle l’infogérance des postes de travail. Concrètement, il s’agit d’offrir des SLA plus standardisés, des plages communes de support au service desk, des délais d’intervention sur site plus homogènes. Cette approche est, sur le papier au moins, essentielle car les spécificités de tel ou tel client, telle une plage horaire de support inhabituelle, demande souvent des ressources dédiées. Et les équipes de delivery des prestataires ont parfois du mal à gérer les différentes clauses entre tous les clients.

La réalité est toutefois que cette approche contractuelle plus standardisée a du mal à percer. De nombreuses SSII admettent que leurs termes contractuels standards sont rarement adoptés tels quels par les donneurs d’ordre, mais servent plutôt de base de discussion dans l’expression des besoins des clients, des besoins forcément spécifiques.

Mutualiser ou limiter les choix technologiques ?

Alors quel avenir pour un service d’infogérance informatique plus standardisé et donc moins cher pour le client ? Il existe deux pistes actuellement. La première réside dans un delivery mutualisé sur plusieurs clients. Cette approche est envisageable sur des activités de remote monitoring (gestion des infrastructures à distance) ou sur le niveau 1 de service desk. Avec une contrainte : les équipes de delivery doivent pouvoir utiliser les mêmes outils pour tous les contrats ou du moins une interface utilisateur commune, afin de jongler simplement entre les clients. Cette approche de delivery partagé existe depuis plusieurs années ; elle reste néanmoins minoritaire. En France, un pays où l’infogérance sur site reste privilégiée, le phénomène prendra sans doute du temps à percer.

L’autre approche, elle aussi abordée depuis plusieurs années, consiste, pour les SSII, à essayer de limiter les choix technologiques. Prenons un exemple dans le domaine des postes de travail virtuels : plutôt que d’offrir un large choix de fournisseurs de virtualisation, certains prestataires ont développé des architectures standards de postes de travail virtuels basés sur un nombre réduits de logiciels.

Dans une approche plus globale, le défunt EDS avait lancé son partenariat, la fameuse Agility Alliance, dans les années 2005 avec dans le domaine des infrastructures Xerox, Sun, EMC et Symantec. Plus récemment, CSC, sous l’impulsion de son nouveau PDG Mike Lawrie, tente la même démarche : moins de choix technologiques, plus de stabilité, des architectures prédéfinies. Nous verrons dans quelle mesure les grands comptes adopteront cette approche. Il est néanmoins facile de parier que nombre de donneurs d’ordre trouveront l’approche séduisante… à condition de pouvoir y apporter quelques modifications qui leur sont propres !

Par Dominique Raviart, analyste chez NelsonHall


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