SFR, la fille à papa mise au régime sec en 2015

SFR présente des résultats 2015 assainis, mais au prix d’une hémorragie des abonnés mobiles et d’une sévère cure d’austérité. 2016 devrait être l’année de la reconquête pour l’opérateur, qui pourrait bénéficier de la fusion annoncée entre Orange et Bouygues Telecom.

Après le rachat de SFR, Patrick Drahi, fondateur d’Altice, avait expliqué aux députés que l’opérateur, « était devenu une vraie fille à papa, qui dépensait sans compter, et laissait (Vivendi) la maison-mère régler les factures à la fin du mois. Le papa a changé, et ma fille ne fait pas comme ça ». Presque un an après, force est de constater que « la fille à papa » est devenue plus vertueuse. Et surtout moins dépensière. Les résultats financiers 2015 le montrent. SFR a renoué avec les profits, avec un bénéfice net de 682 millions d’euros, contre une perte de 188 millions d’euros un an plus tôt. De même, l’Ebitda (excédent brut d’exploitation) progresse fortement sur l’ensemble de l’exercice (+20% à 3,86 milliards d’euros). Soit une marge qui progresse de 6,9 points, à 35%.

Une réduction des coûts musclée

Ces bons résultats sont le fruit d’une politique de réduction des coûts très rapide et brutale. L’année 2015 a été marquée par une polémique sur la pression exercée par SFR-Numericable sur ses fournisseurs. Factures non payées, demandes de rabais important, les sociétés et même le Syntec Numérique s’étaient émus de ces procédés au point d’en appeler au gouvernement et au médiateur des relations interentreprises et de l’innovation. Les choses étaient finalement rentrées dans l’ordre via un accord entre les différentes parties. Même si SFR a écopé, en parallèle, d’une amende de 375 000 euros infligée par la DGCCRF pour les retards des paiements de ses factures. Une façon de faire qui a eu pour conséquence de classer SFR comme le donneur d’ordre le plus mal aimé des fournisseurs.

Les réductions de coûts ou les optimisations se font sur tous les fronts (cf schéma ci-dessous). La présentation du groupe montre que 55 millions d’euros d’économies ont été réalisés sur les dépenses courantes du service client, la branche commerciale et marketing affiche 230 millions d’économies (notamment avec la mise en place d’un outil Salesforce). L’activité réseau et maintenance détient la palme de l’optimisation, avec 235 millions d’économies. Les dépenses de personnel et administratives ont participé à l’effort à hauteur de 35 millions d’euros chacune. Si on ajoute les dépenses d’investissement (capex), le total des économies atteint 755 millions d’euros.

SFR réduction de coût

Hémorragie d’abonnés stoppée et reconquête

Des résultats financiers assainis malgré la perte de près d’un million de clients dans le mobile en 2015 (991 000) et de 224 000 clients sur l’ADSL. Au 31 décembre, SFR revendique un total de 21,95 millions d’abonnés mobiles, grand public et entreprises, contre 22,94 millions un an plus tôt. C’est principalement l’activité grand public qui a souffert en passant sur un an de 16,24 millions d’abonnés à 15,14 millions de clients au 4ème trimestre 2015. Mais bonne nouvelle, SFR a recommencé à gagner des clients au cours du dernier trimestre. Malgré tout, cette érosion de la clientèle se traduit par une baisse du chiffre d’affaires de 3,5% sur un an : ce dernier passe de 11,44 milliards d’euros à 11,04 milliards d’euros en 2015.

Et Michel Combes, président de Numericable-SFR, entend bien faire de 2016 l’année de la reconquête. Cette ambition dont les grandes lignes seront dévoilées la semaine prochaine passe par une reprise des investissements dans le réseau. « D’ici 2022, nous voulons relier 22 millions de foyers à la fibre », explique le dirigeant. Et d’ajouter : « c’est crucial pour réduire la dépendance à Orange ». Les investissements devraient repartir à la hausse dans le réseau mobile. Michel Combes est conscient du sous-investissement qui a entraîné des problèmes sur le réseau 3G de l’opérateur et de la faible couverture du réseau 4G maison. Mais les problèmes se résolvent avec un meilleur dimensionnement, de l’optimisation et l’ouverture de nouveaux sites en 4G et même en 4G+. Pour lui, « les deux facteurs du succès sont la taille du réseau et le spectre ».

SFR gourmand sur les actifs de Bouygues Telecom ?

Sur ce dernier point, SFR pourrait bénéficier d’un coup de pouce dans le cadre de la fusion Orange-Bouygues Telecom. Hier, des informations indiquaient que SFR et Free avaient finalisé leur projet de reprise des différents actifs de Bouygues Telecom. Selon Le Monde, SFR devrait même récupérer la plus grande partie des actifs de Bouygues Telecom. Un comble quand on sait que Patrick Drahi avait mis 10 milliards d’euros pour s’emparer de Bouygues Telecom. Par contre, les salariés de Bouygues sont inquiets et ne souhaitent pas, en cas de fusion, rejoindre chez SFR. Nul doute que les niveaux d’économie affichés aujourd’hui par l’opérateur ne sont pas là pour les rassurer. En décembre dernier, la CFE-CGC dénonçait le malaise social chez SFR et en appelait au gouvernement.

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