SSII : feu vert pour le rachat de Bull par Atos

L’OPA d’Atos sur Bull est un succès. Les deux SSII vont pouvoir entamer leur rapprochement pour consolider leurs positions dans la sécurité, le Big Data ou le Cloud et tenter d’arrêter l’hémorragie que connaît Atos France.

L’offre publique d’achat d’Atos sur Bull est un succès : la SSII dirigée par Thierry Breton a recueilli plus de 84 % des actions de sa cible, alors qu’il lui suffisait de réunir 50 % plus une action pour prendre le contrôle de la société dirigée par Philippe Vannier. Atos a également mis la main sur environ 18 % des Oceane de Bull (obligations convertibles échangeables en actions nouvelles ou existantes). Les actionnaires de Bull n’ayant pas encore apporté leur titre à l’opération disposeront d’une nouvelle période de 10 jours pour le faire, aux prix initiaux (soit 4,9 euros par action et 5,55 euros par Oceane).

Le succès de cette première étape ouvre la voie au rapprochement opérationnel des deux sociétés. « Nous pouvons démarrer sans plus attendre la phase d’intégration pour procéder au regroupement des opérations et générer les synergies prévues », commente d’ailleurs Thierry Breton dans un communiqué. L’ex-ministre se dit prêt à accueillir « chaleureusement les 9 200 salariés de Bull ».

Un renfort pour rester sur podium en France

Rappelons que, selon le discours officiel, ce rapprochement a notamment été motivé par la volonté d’Atos de se renforcer dans la cybersécurité et le Big Data, deux activités qui seront logées dans une entité dédiée, qui conservera la marque Bull et sera dirigée par Philippe Vannier. A noter que Thierry Breton a comparé cette structure à un nouveau Worldline (l’entité e-paiement qui est désormais une société cotée). L’autre facteur décisif avancé par les deux sociétés réside dans le Cloud, où les activités de Bull (140 millions d’euros selon les chiffres communiqués au moment du rapprochement) seront apportées à la filiale d’Atos dédiée à cette activité, Canopy. Autant de segments où Bull amènera à Atos des actifs en matière de propriété intellectuelle (notamment dans le HPC et la sécurité où le dernier constructeur français commercialise notamment des boîtiers HSM, des smartphones sécurisés, etc.).

Dans les faits, le rachat de Bull permet aussi à Atos de renforcer ses activités traditionnelles (infogérance et intégration) en France. Les métiers traditionnels du service représentaient les deux tiers du chiffre d’affaires de Bull en 2013. Avec le renfort de Bull, Atos devrait ainsi conserver sa troisième place dans l’Hexagone, selon les estimations de Franck Nassah, de Pierre Audoin Consultants (PAC). La SSII repasserait ainsi devant le couple Sopra-Steria, dont le rapprochement est également en bonne voie. Et permettrait à Atos de compenser son effondrement dans l’Hexagone (-8,5 % en 2013, à 1,02 milliard d’euros et encore – 2 % au premier semestre 2014). « Le groupe deviendrait également leader sur le secteur public (avec une position intéressante au ministère de la Défense où Bull a remporté un contrat pluri-annuel en 2013, NDLR). Mais est-ce réellement un bon point tant ce secteur apparaît à risques avec les récentes annonces du Premier ministre ? », commentait récemment l’analyste dans nos colonnes.

Pas sûr toutefois que l’apport de Bull suffise à stabiliser Atos France. En tout cas à brève échéance. Selon la CGT d’Atos, le groupe négocierait en parallèle la vente de son activité WSDS (support sur site et helpdesk) à Proservia, filiale de Manpower. 800 salariés de la SSII sont concernés. Les raisons de cette vente ne sont pas précisées, mais on peut remarquer que la rentabilité d’Atos dans l’Hexagone est très dégradée (avec une marge opérationnelle de seulement 0,2 % sur les six premiers mois de 2014). Une offre de Manpower devrait intervenir en septembre, explique la CGT, pour une finalisation de l’opération en fin d’année. Par ailleurs, la perte de deux gros contrats (SFR et surtout Michelin) met en difficulté deux sites d’Atos, à Rennes et Cournon (Puy-de-Dôme). Sur ce dernier, 90 personnes sont concernées par la perte du contrat avec le fabricant de pneumatiques.

Pas de plan social a promis Thierry Breton

La fusion avec Bull s’effectuera un climat social tendu tant chez Atos que chez le dernier constructeur français, où les accords sur le temps et les conditions de travail ont récemment été dénoncés dans le cadre de la mise en place du plan de restructuration One Bull (qui a coûté plus de 50 millions d’euros à la société au premier semestre). Les salariés de Bull s’inquiètent également d’un éventuel changement de convention collective : ils bénéficient pour l’instant de la convention métallurgie alors que les employés d’Atos sont soumis à la convention Syntec, réputée moins avantageuse. Lors de l’annonce du rachat de Bull, Thierry Breton avait assuré que l’opération se ferait sans plan social, ni plan de départs volontaires ; la gestion des zones de recouvrement entre les deux sociétés devant être assurée via les départs naturels.

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