Supercalculateur exaflopique : la Chine 3 ans avant les Etats-Unis ?

La Chine annonce qu’elle franchira, avec son supercalculateur Tianhe-3, la barre de l’exaflops dès 2020. Bien avant les Etats-Unis. Mais l’annonce est à relativiser.

La Chine devrait virer en tête dans la course au premier système exaflopique (soit d’une puissance de 1 000 pétaflops), la prochaine étape majeure dans la course à la puissance que se livrent les supercalculateurs. Selon l’agence de presse officielle chinoise Xinhua, l’université des technologies de défense du géant asiatique prévoit de passer ce cap en 2020, soit trois ans avant les Etats-Unis. Le premier système exaflopique serait le Tianhe-3, un système qui suit la logique de l’évolution des supercalculateurs de l’université chinoise.

Une logique inaugurée en 2010 avec le lancement du premier ordinateur pétaflopique de l’Empire du milieu, le Tianhe-1. Si la Chine domine aujourd’hui le classement des 500 supercalculateurs les plus rapides de la planète avec son Tianhe-2 (en photo ci-dessus), elle n’avait, à l’époque, franchi la barre du pétaflops que deux ans après les Etats-Unis (avec le Roadrunner du laboratoire national de Los Alamos).

Le passage aux systèmes exaflopique pourrait donc marquer la prise de pouvoir durable de la Chine dans cette course à la performance. Même si des doutes subsistent sur les conditions dans lesquelles le Tianhe-3 atteindra cette barre symbolique. Première interrogation : combien d’énergie consommera ce système ? Les États-Unis prévoient de leur côté de franchir ce cap avec un système consommant de 20 à 30 MW, soit presque la production d’une petite centrale énergétique. Par ailleurs, il est probable que l’échéance de 2020 que s’est fixée la Chine corresponde au dépassement du seuil de l’exaflops sur le critère du pic de performances (RPeak dans le classement Top 500).

Or, comme le rappelle Steve Conway, un analyste d’IDC interrogé par Infoworld, les Etats-Unis visent, en 2023, une performance exaflopique stable sur une application 64 bits. Ce qui change tout. L’analyste estime que la Chine devrait atteindre ce stade entre 2022 et 2024. Bref, les deux superpuissances seraient, en réalité, au coude à coude. Reste la puissance du symbole, que ne se prive pas d’agiter le géant asiatique.

3 Md$ pour toucher l’exaflops

Aux Etats-Unis, le développement d’un supercalculateur exaflopique s’inscrit dans une stratégie nationale définie par le président américain Obama en juillet 2015 (National Strategic Computing Initiative) et pilotée par le Département de l’énergie américain. Le gouvernement prévoit de « financer les fournisseurs de supercalculateurs afin d’effectuer la R&D en matière d’architecture matérielle nécessaire à la construction et au support de systèmes exaflopiques. »

En 2016, le gouvernement américain consacrera ainsi 250 M$ au programme, et l’enveloppe devrait même être un peu mieux garnie en 2017. Au total, le Département de l’énergie estime que le programme de développement de l’ordinateur exaflopique coûtera 3 Md$ environ. Discuté avec les industriels courant mars, ce plan a été dévoilé mi-avril sur un site officiel des Etats-Unis.

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Le Sequana d’Atos.

Le Japon et l’Europe tentent eux aussi de mettre au point des supercalculateurs touchant l’exaflops. En France, Atos, le repreneur de Bull, vient d’annoncer une machine intégrée atteignant le pétaflops : Sequana. Et Thierry Breton, le patron du groupe, n’a pas fait mystère de sa volonté de viser le système exaflopique : « Nous commençons avec un pétaflops aujourd’hui, l’année prochaine nous allons multiplier par 30 cette capacité et d’ici 2 ans, nous allons encore la multiplier par 30 pour atteindre le 900 pétaflops. D’ici 2020, le supercalculateur exaflopique sera une réalité », a pronostiqué mi-avril l’ex-ministre.

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