TF1, Canal+ et Vodéo.tv mettent les films à portée de souris

Aujourd’hui le spectateur veut sortir de sa léthargie cathodique. Il veut être un acteur de la programmation. La vidéo à la demande est l’incarnation même de ce nouveau mode de consommation

Pour profiter du filon (car la cible devient enfin importante avec 8 millions d’abonnés haut débit en France), trois groupes se lancent dans l’aventure quasiment simultanément : TF1, Vodeo.tv et Canal Plus. Retour sur une tendance de fond : la personnalisation des contenus audiovisuels.

Le groupe Canal+ a présenté un nouveau service répondant au nom de CanalPlay. Il s’agit d’un site Internet de téléchargement de vidéo à la demande développé par un pionner du genre, MovieSystem, entreprise rachetée par Canal Plus en mai dernier. L’idée est de nous permettre de regarder « ce que l’on veut, où l’on veut et quand on veut ». Aujourd’hui en ligne, CanalPlay propose une offre de films importante avec les nouveautés cinéma pour l’instant disponibles neuf mois après leur sortie en salles, mais aussi, les classiques français et étrangers. De plus, des films en haute définition devraient être disponibles d’ici peu, reste à Canal d’en obtenir les droits. À l’heure actuelle, le site utilise le codec Windows Media Player 10. Interrogé, Canal+ admet étudier une solution de type media center pour encore simplifier l’utilisation de la VOD. Les films sont proposés à 4,99 euros pour les nouveautés et à 3,99 euros pour les films de catalogue, c’est à dire ayant déjà été diffusés sur des chaînes de télévision. Les programmes adultes sont proposés à 6,99 euros. A l’occasion de son lancement, CanalPlay propose tous les téléchargements (sauf adultes) à 3 euros. Objectif: 100.000 utilisateurs CanalPlay est partenaire d’Allociné et des accords ont été signés avec Pathé, Sony Columbia, Europa, évidemment StudioCanal, mais aussi des producteurs indépendants français et américains. Plus d’1 million de titres seront disponibles avant la fin de l’année 2005, actuellement le site présente 700 titres. Le groupe estime que s’il totalise prés de 100.000 utilisateurs actifs d’ici à la fin de l’année, son site de VOD sera une réussite. Enfin, un CanalPlay pour les enfants devrait voir le jour. L’offre VOD de Canal+ permet de regarder le film de son choix et ce n’importe quand et n’importe où. En effet une fois que le film a été téléchargé sur le disque dur de l’ordinateur via Internet, il peut être conservé pour une durée maximum d’un mois et regardé dans les 24 heures qui suivent le démarrage du visionnage. La connexion Internet n’est pas nécessaire pour la lecture de la vidéo, dés lors que le téléchargement est terminé. De plus, CanalPlay permet, si on le souhaite, de commencer à regarder le film presque dés le début du téléchargement grâce à la technique dite du streaming ou téléchargement progressif. Face aux difficultés de l’industrie musicale, pour à la fois mettre un frein au piratage qui « plombe » les ventes, et s’accorder sur un modèle de téléchargement légal, Canal+ qui est partenaire du cinéma depuis longtemps a voulu éviter ce problème et réagir plus vite. CanalPlay s’inscrit pleinement dans les nouveaux usages de la Toile. L’Hexagone compte plus de 8 millions d’abonnés haut débit en France et plus de 13 millions d’internautes âgés de 11 ans et plus. Et la vente à distance via le net est en pleine expansion. En 2005, 1 internaute sur 2 achète en ligne. Sur une période de 6 mois, 50% des acheteurs ont acheté des DVD et des vidéos en 2004. Pour autant, ce qui va vraiment faire la différence aux yeux du consommateur c’est le contenu. La VOD doit absolument proposer autre chose que des films. Aux Etats-Unis, où le service décolle, les opérateurs ont compris que la diversification était indispensable avec par exemple des séries TV, des documentaires ou des téléfilms. Une notion que le site de VOD, Vodeo-tv, a parfaitement assimilé. Vodeo.tv : le choix du documentaire Lancé depuis le 15 septembre, voilà un site de téléchargement de vidéo à la demande qui mise plus sur la qualité et l’originalité du contenu que sur la quantité. Car l’originalité du site Vodeo.tv est de proposer des documentaires, des reportages et des émissions de télévision. Pour l’équipe de Vodeo.tv il existe un fort intérêt pour les documentaires et les émissions liées au savoir. D’ailleurs le renouveau des films documentaires au cinéma comme l’excellent « Buena Vista Social Club » ou les satyriques documentaires de Michael Moore, en sont la preuve. Plus de 2.300 heures de documentaires sont produites chaque année. Mais 20% d’entre eux ne sont pas diffusés sur les ondes hertziennes. 2/3 des foyers n’ont pas accès aux chaînes thématiques documentaires. Et il est généralement difficile de trouver ces programmes en grande distribution. Moins de vingt titres sont disponibles en grande distribution, représentant 50 % des ventes de DVD en France. Et moins d’une centaine sont présents dans les magasins spécialisés dans la distribution de produits culturels. Frédéric Pie, le président de la banque audiovisuelle, société éditrice de Vodeo.tv, revient sur le lancement de Vodeo : « La télévision produit un flux de programmes dont la fraîcheur et l’exclusivité sont essentielles à la course à l’audience. A de rares rediffusions près les productions des chaînes de TV sont conçues pour un usage unique. Si vous avez essayé de vous procurer un documentaire manqué lors de la diffusion, vous allez aimer Vodeo.tv. Aujourd’hui, le secteur audiovisuel favorise la fiction et le divertissement. Le savoir demeure synonyme de livres et de magazines. Pourtant, l’audiovisuel est devenu un vecteur essentiel de la connaissance et Internet devient peu à peu le vecteur principal de sa diffusion » Vodeo.tv propose différents formats pour regarder les documentaires. Tout d’abord la technique du streaming, qui permet de visionner immédiatement le documentaire, mais dans une qualité moyenne. Les programmes délivrés en streaming sont codés en 350 kbps et 750 kbps suivant le débit de la connexion à Internet de l’utilisateur. Vodeo délivre automatiquement l’un ou l’autre des formats compressés. Si la connexion garantit un débit de 1Mbps ou plus, l’internaute bénéficiera automatiquement d’un streaming en 750 kbps, lui assurant une meilleure qualité vidéo. Ensuite, le téléchargement, qui permet au spectateur d’enregistrer sur son ordinateur le film. Dés lors le programme est acquis et peut être regardé à loisir et même être gravé (une seule fois). La qualité de diffusion des vidéos téléchargées est nettement meilleure qu’en mode streaming. Les programmes délivrés en téléchargement sont codés en 1500 kbps (1,5 Mbps) soit une qualité d’encodage deux fois plus importante que celle des meilleurs programmes disponibles en streaming, encodés à 750 kbps. Enfin, Vodeo.tv propose un service d’édition de DVD sur mesure qui sera disponible d’ici à la fin de l’année. Cette solution offrira le même confort que celui d’un DVD acheté dans le commerce, car ce dernier n’est pas compressé. Les tarifs varient selon le format du film et sa durée. En streaming, les prix varient de 2 à 5 euros selon le format de 3 minutes à 50 minutes. En mode téléchargement, de 3 à 9 euros selon le format. Et pour les DVD gravés à la demande de 10 à 16 euros selon la durée. Pour l’instant, le catalogue de Vodeo compte 700 programmes et le site devrait en proposer 2000 d’ici la fin 2005. L’offre de TF1 Mardi 11 septembre, TF1 a annoncé le lancement de son service de VOD disponible à partir du 15 novembre sur la plate-forme de TPS Multivision et sur le futur site Internet TF1 Vidéo. Selon Les Échos TF1 a signé des accords avec les studios Regency, Paramount et Columbia. Tout comme CanalPlay, TF1 met à disposition les films neuf mois après la sortie en salle. Contrairement à l’offre de Canal+, TF1 ne propose pas de téléchargement, uniquement du streaming. L’utilisation de TF1 vidéo requiert un accès ADSL de 2 Méga ou un abonnement à TPS par satellite. CanalPlay n’est accessible que sur ADSL. En terme de prix, les deux grands groupes audiovisuels sont sur la même longueur d’onde avec un coût de 4,99 euros par film. Dans les deux cas, le paiement se fait par carte bleue. D’après Les Échos, « la différence d’approche entre les deux groupes s’explique en partie par le positionnement de TF1 dans le marché de vente de DVD où il réalise un chiffre d’affaires de 162 millions d’euros pour un résultat d’exploitation de 17,1 millions ». Une chronologie de diffusion défavorable

On l’a vu, les nouveaux films ne pourront être proposés en VOD que neuf mois après leur sortie. Les acteurs français du secteur se sont en effet mis d’accord sur ce délai. Et il n’est pas à l’avantage du Net. Une déception pour les cinéphiles accrocs de la Toile. Un film ne pourra être diffusé en ligne que 3 mois après sa sortie en DVD! Avec une telle mesure, le piratage ne sera pas jugulé. Au contraire. Evidemment, les acteurs sont eux satisfaits d’un tel accord. La filière souligne que le texte protège le cinéma et son principal argentier, la télévision.