Une étude soutient que l’offshore’ crée des emplois

L’ITAA affirme que la migration des emplois technologiques vers les pays à faibles salaires (‘outsourcing offshore’) crée des emplois aux Etats-Unis

Etonnant discours que celui de l’ITAA (

Information Technology Association of America), une association qui compte 500 membres, dont Microsoft, HP ou Amazon.com ! Pour commencer, l’association confirme que l’outsourcing offshore (ou délocalisation d’activités technologiques vers des pays comme l’Inde ou la Chine) a supprimé 104.000 emplois américains, soit environ 3% des emplois technologiques – un chiffre que d’ailleurs de nombreux observateurs estiment très sous-évalué. Puis la dite association part sur une démonstration très paradoxale: elle veut démontrer que le phénomène est créateur d’emplois aux… USA. Et d’affirmer aussi que l’outsourcing a supprimé moins d’emplois que l’écroulement des ‘start-ups’ et sociétés ‘dot.coms’ ou télécoms depuis 2000, qui auraient vu disparaître 268.000 postes. Comme si l’on pouvait comparer un phénomène spéculatif à la migration des cerveaux? L’ITAA semble oublier qu’en privilégiant des emplois indiens, dont le coût salarial est six fois moindre que celui des US, et huit à dix fois inférieur pour les emplois chinois, l’offshore réduit dramatiquement le pouvoir d’achat des salariés de certains secteurs d’activité, dont celui des nouvelles technologies, pourtant un moteur de l’économie américaine. Quant à l’argument de la réduction des coûts qui permettrait d’augmenter les investissements en matériels et en recherche – peut-être. Mais encore faut-il que ces derniers ne profitent pas uniquement aux implantations en Asie, et surtout en priorité au portefeuille des investisseurs ! L’outsourcing crée des emplois aux US ! Pour la ITAA, au contraire, l’outsourcing a permis aux entreprises américaines de créer 90.000 nouveaux emplois en 2003, dont 10% pour la Californie et la Silicon Valley. Et 317.000 emplois seront créés en 2008, toujours grâce à l’outsourcing ! Des chiffres étonnants que seront heureux d’apprendre les milliers d’ingénieurs qui pointent au chômage en Californie. John Kerry, candidat démocrate aux élections présidentielles américaines, a glissé dans son programme un projet de limitation des pratiques d’outsourcing, une mesure politique qui va d’ailleurs dans le sens des attentes de l’électorat. Et deux douzaines d’Etats américains ont interdit toute forme de contrat qui ferait appel à des ressources délocalisées. L’ITAA crie à l' »imprudence » et au « protectionnisme« . Mais ses arguments, conjugués avec les contributions électorales que ses membres ne doivent pas manquer d’apporter à certains candidats ? la timidité des conseillers du président George W. Bush sur le sujet en dit long sur ce plan ? devraient rapidement faire taire une partie des politiques réticents aux méthodes de délocalisation des entreprises américaines. Un phénomène qui touche aussi la France, mais on n’en parle d’autant moins que la différence linguistique (indiens et chinois maîtrisent moins bien le français que l’anglais) nous met quelque peu à l’abri d’un ample mouvement de migration. Sur les centres d’appel en particulier ! Quoique? Un coup d’?il aux chiffres de l’emploi sur la Silicon Valley

En effet, comme pourrait l’affirmer la ITAA, les chiffres du chômage sur la zone de la Silicon Valley, essentiellement des emplois technologiques, ont baissé depuis 2000.

6,8% de la population active de Santa Clara County est inscrite au chômage. Une remarque au passage : c’est déjà un chiffre important puisque la durée légale d’inscription est réduite aux Etats-Unis et que la population sans emploi et sans droits n’est pas comptabilisée. Ce chiffre était de 7,1% en 2000. Mais le raccourci qui consiste à affirmer que les entreprises de la Silicon Valley recrutent ne tient pas à l’analyse de l’évolution de l’emploi. A y regarder de plus prêt, on constate tout d’abord qu’avec 812.000 emplois, le volume s’est réduit de 20% depuis 2000. La réduction des demandeurs d’emplois sur la Silicon Valley provient donc moins des créations que des expatriations, à savoir que les ingénieurs sont allés chercher des employeurs ailleurs?