Une mini puce pour doubler la capacité des réseaux mobiles

Des chercheurs de l’université Columbia de New York ont fabriqué un composant capable de supporter les communications sans fil simultanées sur la même fréquence.

Une équipe de chercheurs de la Columbia University de New York a mis au point un composant radio qui pourrait faire faire un bond, à défaut de révolutionner, la capacité des réseaux mobiles et sans fil en général. L’innovation technologique permet de traiter les communications sans fil en réception comme en émission simultanément sur la même fréquence. Et cela depuis un seul composant CMOS plus petit qu’une nano SIM (voir photo) : le full-duplex radio integrated circuits ou circuit intégré pleinement bidirectionnel.

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Le circuit intégré émetteur-récepteur bidirectionnel du laboratoire Columbia high-Speed and Mm-wave IC (crédit photo : Jin Zhou et Harish Krishnaswamy).

Jusqu’à présent, l’émission ou la réception simultanée d’un signal radio ne peut se faire que sur deux fréquences différentes. C’est la technologie FDD (Frequency Division Duplexing). Si l’on utilise une seule fréquence, il faut alors partager son usage dans le temps et l’on perd la simultanéité (ce qui n’empêche pas d’obtenir des performances records). C’est le TDD (Time Division Duplexing).

Emetteur-récepteur simultané

Visiblement, l’équipe du professeur Harish Krishnaswamy, qui dirige le laboratoire Columbia high-Speed and Mm-wave IC (CoSMIC), s’est affranchie de ces contraintes. Si nombre de chercheurs et start-up travaillent à résoudre ces problématiques, le labo CoSMIC est le premier à proposer un composant électronique capable de supporter la technologie. Les travaux ont été présentés le 25 février dernier dans le cadre de la International Solid-State Circuits Conference (ISSCC) à San Francisco.

Schématiquement, depuis le circuit électronique, les chercheurs ont réussi à filtrer les « mots » émis par l’émetteur lors d’une conversation, ce qui lui permet de n’entendre que les « mots » de son interlocuteur en tant que récepteur. Un schéma où chacun est à la fois émetteur et récepteur, et où tout le monde parle et écoute en même temps. Appliquée à l’humain (ce qui est impossible), la technologie réduirait une conversation d’une heure à 30 minutes, donc (sauf si un seul interlocuteur parle mais c’est une conférence dans ce cas).

Un changement majeur

« C’est un changement majeur, avance Harish Krishnaswamy, en tirant parti de notre technologie, les réseaux peuvent effectivement doubler les ressources spectrales disponibles pour les smartphones et tablettes. » Autrement dit, doubler le volume de données échangées à un instant T et sur une même fréquence. Une optimisation de « place » d’autant plus appréciable que, on le sait, la capacité des ondes hertziennes est par nature limitée. Ce qui contraint les gouvernements à mettre à disposition des opérateurs de nouvelles bandes de fréquences radio (souvent empruntées au secteur audiovisuel ou à la Défense) sous formes d’onéreuses licences afin que ces derniers disposent de capacités suffisantes pour fournir des services voix et données mobiles à leurs clients toujours plus nombreux et consommateurs. Aujourd’hui, une quarantaine de bandes de fréquences sont ainsi utilisées pour la téléphonie mobile commerciale et on arrive à peu près au bout des ressources disponibles.

La technologie bidirectionnelle mise au point par les chercheurs devrait également contribuer à construire la 5G dont les capacités du futur réseau sont annoncées comme 1000 fois plus importantes que celles de la 4G. Plusieurs pistes sont étudiées pour y parvenir : la libération de nouvelles fréquences, leurs multiplexage et agrégation, le multi-antenne, l’accès dynamique « louées » dans les bandes peu utilisées la majeure partie du temps, ou encore en allant chercher de nouvelles ressources dans les hautes fréquences (mais au prix d’une densification nécessaire de l’infrastructure réseau pour palier la courte portée de ces ondes haut perchées). La technologie de l’équipe de Harish Krishnaswamy pourrait donc s’y inscrire comme une étape majeure de cette évolution. Si elle est retenue, il restera néanmoins à l’intégrer aux équipements réseaux et aux terminaux pour en bénéficier. Ce qui nécessitera de nombreuses années.


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