USA : le FBI veut prolonger le stockage des données des clients

Sous le couvert de la lutte contre le terrorisme et la pédophilie en ligne, les géants du Web ont été invités par le FBI et l’Attorney General Alberto Gonzales à enregistrer et conserver les données personnelles de leurs clients

Le lobby sécuritaire américain poursuit son chemin. L’administration Bush, le Département de la Justice et le FBI militent auprès du Congrès américain en vue d’obtenir un allongement de la période de conservation des données personnelles qui transitent via les opérateurs Internet.

Les principaux fournisseurs d’accès Internet américains – AOL, Comcast, Google, Microsoft et Verizon Communications ? ont déjà été approchés mi mai par des représentants du Département de la Justice, puis par l’Attorney General Alberto Gonzales et le FBI, qui anticipant la décision du Congrès leur ont demandé de prolonger dès maintenant le stockage des données de leurs clients. L’objectif de l’administration américaine est d’imposer une période de rétention de l’information de deux ans. Elle profite pour l’obtenir de la croisade engagée par l’Attorney General Alberto Gonzales contre la pornographie enfantine. Une croisade qui s’est caractérisée par la très controversée procédure engagée contre Google pour accéder aux informations personnelles associées aux requêtes posées sur le moteur par les internautes, et qui s’est terminée par un compromis (lire nos articles). Cette affaire a révélé que les concurrents du moteur de recherche n’ont pas fait preuve de la même retenue que Google, qui s’est opposé à la demande au titre de la confidentialité des données de l’internaute. Ils ont coopéré avec le Département de la Justice et lui ont fourni les données personnelles de leurs clients sans que ceux-ci en soient avertis ! Le FBI, bien mal engagé avec la gigantesque (en volume, moins en réaction) affaire des écoutes téléphoniques et des e-mails, a trouvé dans la demande de prolongement de la période de stockage des données l’occasion de retrouver une légitimité? Il appuie la demande au titre de la lutte contre le terrorisme. Demande étonnante de la part d’un service dont les actions sont parfois des plus controversées, et qui surtout depuis les attentats du 11 septembre 2001 collecte illégalement ces informations, ainsi que les communications téléphoniques mobiles, auprès des opérateurs télécoms et Internet, qui ne se sont pas privé de collaborer avec le FBI ! A la différence de l’Europe, où la même démarche est en cours mais soulève plutôt des questions budgétaires ? qui va financer le coût du stockage ? La Commission européenne a reporté cette responsabilité aux Etats membres ? la demande anticipée de l’administration ne semble pas soulever de polémique chez les industriels américains. Ils collaborent sans état d’âme ! En revanche, ils pourraient s’appuyer sur la complexité technique du dossier pour suivre l’exemple de Google et s’y opposer. Surtout, les acteurs du Net veulent conserver le contrôle de leurs actions et de leurs technologies, une façon de limiter le risque de par trop s’attaquer à la confidentialité de leurs clients. C’est pourquoi ils ont plutôt mis en avant leurs propres projets technologiques destinés à limiter l’accès à la pédophilie en ligne. La véritable opposition au projet pourrait venir non-pas de l’industrie mais des organisations de défense des droits de l’homme et du citoyen. En effet, derrière le stockage des données personnelles des clients des opérateurs se profile la menace de l’exploitation abusive et politique de ces données. Les données des transactions stockées par les opérateurs Internet pourraient, par exemple, renseigner l’administration américaine sur les personnes qui téléchargent légalement de la musique qualifiée de subversive? Mais le plus gros danger pourrait venir de l’exemple que le grand frère américain pourrait donner au reste du monde. Entre un pays comme la Chine qui cherche à contrôler la toile et les Etats-Unis qui espionnent leurs citoyens sans état d’âme et en toute illégalité, la frontière est bien mince. La vision du ‘1984’ d’Orwell n’est plus très loin?