Une première en France : Vincennes met en place l’accueil unique multicanal

Francois Madjlessi 2Traiter dans un seul endroit toutes les demandes des citoyens, quel que soit le média par lequel elle arrive (guichet, téléphone, e-mail). C’est le pari, un peu fou, auquel s’est attaquée la mairie de Vincennes. «  Quand je suis arrivé à  ce poste il y a trois ans, cela semblait presque impossible  ; personne ne l’avait encore fait   », se souvient le DSI de cette ville du Val-de-Marne d’environ 50  000 habitants. Arrivé du conseil général de ce département, o๠il avait mis en place un accueil téléphonique unique mais limité aux seules demandes d’information, François Madjlessi (en photo ci-contre) lance alors un appel d’offres en assistance à  maîtrise d’ouvrage afin de «  résoudre cette équation   ».

L’idée  ? S’inspirer des technologies du privé et les adapter au service public, «  tout en tenant compte du facteur humain   ». Car l’un des enjeux majeurs du projet résidait dans la capacité à  amener les agents d’accueil, auparavant spécialisés dans un domaine (petite enfance, sports, état civil…), à  traiter des dossiers de toutes natures. Graduellement. «  En interne, nous gérons 70 processus. Et chaque agent a sa propre histoire, son propre rythme d’apprentissage. Certains agents vont assimiler la moitié des processus, d’autres la totalité   », illustre le DSI.

Autre enjeu : la séparation des différents services avec des agents dédiés au back-office – l’instruction de la demande – et d’autres au front-office – l’accueil des administrés (pris en charge par une vingtaine de personnes sur la centaine d’agents impliqués dans les processus administratifs). «  Il faut avant tout instaurer un dialogue avec les métiers sur l’organisation cible, dit François Madjlessi. Et bénéficier du soutien sans faille de la direction générale.   » A Vincennes, pas de problème de ce côté pour le DSI : le maire a fait de l’accueil unique un des objectifs politiques de son mandat.

« Des principes similaires dans l’assurance, mais moins complets   »

Retenu sur le projet, le bureau d’études Altetia cherche une base de travail. «  Aucune entité administrative ne disposait d’un système de ce type, se remémore Dominique Mouchet, son responsable du pôle solutions collaboratives et innovations. Des principes similaires existent dans l’assurance, mais ils sont beaucoup moins complets   ».

Mairie Vincennes 2La mairie de Vincennes construit son projet autour d’une base de connaissances (200 fiches métiers avec les principales formalités et informations générales) bà¢tie sur SharePoint. Sur cette base, trois éléments viennent compléter le dispositif. Un gestionnaire de file d’attente (Genesys) permet, après qualification des demandes, de gérer les affectations aux guichets disponibles, en fonction des qualifications des agents (voir photo ci-contre). «  En parallèle, un plan de formation permet d’améliorer la polyvalence des agents   », assure le DSI. Enfin, une modélisation des processus métiers est entreprise, «  ce qui nous a demandé pas mal de temps car, en interne, deux agents n’ont pas forcément une interprétation identique d’un même texte. Ce travail fait, ces processus, gérés dans l’outil K2 lui-même relié à  un logiciel de gestion de courrier, sont devenus de la matière vivante qu’on peut adapter   », assure François Madjlessi. «  L’agilité que fournit cet outil s’est révélée tout simplement indispensable, insiste-t-il. Car il nous a fallu adapter le système à  une réalité que nous construisions au fil du projet   ».

« Une prise de conscience des flux inutiles »

Ces fondations en place, reste encore à  connecter les applications existantes, nombreuses dans une collectivité locale. «  En réalité, nous devions répondre à  deux questions, se rappelle Dominique Mouchet. Comment rassembler tous ces applicatifs en un portail unique ? Et comment faire en sorte que les agents puissent bouger d’un poste à  l’autre ?   » Pour répondre à  ces enjeux, la collectivité crée un portail dans lequel sont encapsulées les applications. Mais impossible pour l’heure d’utiliser des Web Services et d’intégrer l’applicatif aux processus. «  Mais c’est bien la volonté de la ville d’aller vers des applications ouvertes, explique le responsable d’Altetia. Si un certain cloisonnement est imposé par la CNIL, nous sommes en pourparlers avec les éditeurs de logiciels pour aller vers des Web Services. 70 % d’entre eux l’ont intégré à  leur roadmap sous deux ans.   »

##En place depuis le 23 septembre, l’accueil unique (en mairie, par téléphone ou par courrier via un processus dématérialisé) assure une traçabilité sur tous les processus. Ce qui permet évidemment d’adapter la formation ou de gérer les saisonnalités (pics de demandes pour la crèche, les passeports…). «  Cette visibilité permet aussi de prendre conscience des flux inutiles. Donc de développer des téléservices, accessibles aux citoyens sur le Web, les plus stratégiques pour la collectivité   », analyse François Madjlessi. La mairie prévoit d’intégrer des téléservices à  son fonctionnement unifié dès 2014.

D’ailleurs, «  le focus du projet se déplace maintenant de plus en plus sur le décisionnel   », note Dominique Mouchet. Logique. Auparavant chaque service faisait des statistiques annuelles. Désormais, la collectivité dispose d’une vision à  360 ° et en temps réel sur tous les flux. «  Cela permet d’optimiser les processus de manière permanente et rapide, assure le DSI. L’organisation s’adapte désormais à  la demande.   » Entré dans une phase d’optimisation, le projet a déjà  suscité la curiosité d’une dizaine de mairie ou de conseils généraux, bien décidés à  comprendre comment Vincennes est parvenu à  transformer radicalement son organisation sans voir le projet péricliter du fait de la résistance des utilisateurs.


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