Virtualiser SAP Hana : un exercice hautement encadré

Non, Hana n’est pas forcément synonyme d’appliance. Depuis mi-2014, SAP supporte les déploiements en production de sa base de données au-dessus de vSphere 5.5 de VMware. Mais les possibilités offertes restent strictement encadrées par l’éditeur d’ERP.

Dans l’esprit de nombreux DSI, Hana, la base de données In-Memory de SAP, est toujours synonyme d’appliances dédiées, fournies par des constructeurs certifiés (Bull, Cisco, Dell, Fujitsu, Hitachi, HP, Lenovo pour les principaux). Une option souvent décriée pour son manque de flexibilité et son coût. En réalité, dès 2012, SAP a entrouvert la porte à la virtualisation sous VMware (vSphere 5.1), pour les environnements hors-production. Et étend peu à peu les possibilités offertes aux équipes de production.

« Depuis un an, les possibilités se sont ouvertes, raconte Nicolas Sipha, un des dirigeants de la société Endexar. Le mode dit TDI (Tailored Datacenter Integration, NDLR) permet désormais de déployer Hana au-dessus de VMware, y compris en production. Même s’il faut employer des baies de stockage et des serveurs certifiés par SAP, on y gagne en flexibilité. »

Grâce à une collaboration avec la société Hisi, Endexar, positionnée à l’origine sur les projets SAP et qui s’est développée dans l’infogérance, est en train de monter une offre Cloud, « afin que les entrerpises puissent acheter des unités d’œuvre autour de SAP », explique Nicolas Sipha. Le portail, en cours de développement, est attendu pour le début 2016. Selon Endexar, la plate-forme, bâtie sur OpenStack, mais avec VMware pour hyperviseur, est, elle, déjà opérationnelle. C’est sur cette dernière que le prestataire entend proposer des environnements Hana à la demande.

Moins de 1 To, un serveur physique par VM

Si SAP a bien ouvert les vannes de la virtualisation, il en contrôle scrupuleusement le débit. D’abord, la virtualisation se limite à l’hyperviseur fourni par VMware. Ensuite, avec vSphere 5.5, le support de SAP reste circonscrit aux bases de moins de 1 To. Et, pour des déploiements Business Suite on Hana, un serveur physique ne doit héberger qu’une VM de production (l’éditeur est plus souple pour le datawarehouse BW sur Hana). « Cette limite va sauter, c’est sûr », pronostique Dimitri Delbosq, l’autre dirigeant d’Endexar.

Même avec ces limites, le mode virtualisé intéresse certaines entreprises. C’est notamment le cas d’Exacompta Clairefontaine (3 500 salariés, 551 millions d’euros de CA en 2014), fabricant d’articles de bureau, qui a choisi le mode virtualisé tant pour son prototype de projet Business Suite sur Hana (réalisé en mai-juin 2015) que pour le passage en production, attendu début 2016. « Nous avons déjà des compétences en interne sur VMware. Alors que mes équipes sont moins à l’aise sur le cluster Microsoft sur lequel tourne actuellement le système SAP », dit Thierry Tissot, le responsable systèmes et réseaux du fabricant d’articles de bureaux. « Eliminer ce cluster devrait nous aider à gagner en fiabilité », assure l’informaticien. Et à finaliser la mise en place d’un PRA/PCA (Plan de reprise d’activité/Plan de continuité d’activité), l’infrastructure cible bénéficiant d’une architecture à tolérance de panne côté matériel (stockage et serveurs) et d’une réplication asynchrone sur la base proprement dite.

Bientôt 4 To par base

Pour l’instant, le passage à des infrastructures virtualisées en production reste toutefois l’exception, selon les témoignages que nous avons recueillis. Même si le choix d’une architecture multitenant gagne du terrain sur la partie stockage (c’est par exemple le choix d’Elior pour ses deux instances SAP – Retail et FICO – sur Hana). « Nous utilisons le Cloud public pour les bacs à sable et le mode projet, explique Luc Provost, le directeur du développement commercial d’Oxya, un spécialiste de l’infogérance SAP qui affirme héberger 18 clients sur Hana. Comme les architectures Hana sont chères, la virtualisation permet une optimisation des investissements. Aujourd’hui, la quasi-totalité des nouvelles installations passent par le mode TDI lors des phases de projet. » Mais pas en production. « Car les contraintes sont trop fortes pour l’instant », assure Maxime Sion, architecte chez Oxya. En particulier, celles relatives à la taille maximale de la base (qui exclut les grands comptes) et à la limitation à une instance par serveur physique. Reste que ces contraintes devraient peu à peu être levées. « Avec la version 6 de VMware, la taille maximale des bases Hana passera à 4 To », dit Guillaume Fin, consultant chez EMC croisé dans les allées de la convention USF.

Autre limite par rapport aux architectures Cloud traditionnelles : le scale-out, autrement dit la possibilité de rajouter un nœud quand les besoins grossissent. Si SAP a ouvert cette option depuis mai 2015, celle-ci reste limitée à BW. Et déconseillée par les spécialistes. « La complexité de gestion de multiples VM pousse à privilégier le scale-up (augmentation de capacités du système hôte, NDLR) », plaide Guillaume Fin. Même son de cloche chez Oxya où Maxime Sion explique : « Pour les administrateurs, le scale-out crée beaucoup de contraintes. » Chez le spécialiste de l’infogérance, un seul client a aujourd’hui exploité cette possibilité.

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