‘Vulgarisateur technique’, un métier est né : rassembleur?

Rencontre avec Vincent Bertin, « vulgarisateur technique »: ce métier s’est épanoui de l’autre côté de l’Atlantique mais reste méconnu chez nous. Il rassemble l’entreprise, l’éditeur et la société de services informatiques sur une documentation technique commune, acceptée et disponible.

Il est suisse, consultant, spécialiste de la documentation technique, et il se nomme lui-même ‘vulgarisateur technique’, un poste clé, selon lui, et encore méconnu, pour peu qu’il existe, dans la chaîne de production des applications informatiques. Vincent Bertin jette un regard lucide et pragmatique sur les projets informatiques : « L’entreprise ne sait pas toujours comment exprimer concrètement ses besoins. Entre le chef de projet de l’entreprise, le consultant et le développeur : les bases communes sont parfois à renforcer afin que le chef de projet exprime son besoin, le consultant le caractérise et le développeur le réalise ». « Quant à la compétence des concepteurs pour utiliser le logiciel qu’ils développent, c’est une idée reçue », explique ce consultant. « Le développeur est la plus mauvaise personne pour expliquer comment ça marche : c’est tout simplement une question de point de vue. Expliquer comment il a conçu son produit n’est pas former les utilisateurs ! C’est l’exemple de l’automobile, où le garagiste n’est pas le moniteur d’auto-école ». Face à ce constat, une seule conclusion s’impose : il faut que ces trois acteurs, partenaires, communiquent mieux ? l’entreprise, l’éditeur et la société de services informatiques. Et si possible, autour d’un document unique et donc commun, la documentation technique. Il s’agit donc de faciliter la communication en apportant des solutions pour mieux documenter le projet et former les personnes concernées aux méthodes et aux outils qui permettent de créer cette documentation. « Je jette des ponts qui leur permettent de faire comprendre ce qu’ils font ». Des méthodes? Le consultant vulgarisateur technique Vincent Bertin exploite trois méthodologies pour accompagner les projets informatiques et vaincre la « Tour de Babel informatique ». La modularisation : une méthode de rédaction technique personnelle, dérivée de méthodes existantes mais simplifiées, et rendue plus didactique en élaguant une partie des lourdeurs de ces dernières. Elle est plus particulièrement destinée à normaliser et à modulariser la documentation. Le mind mapping (lire nos articles), en tant qu’outil de représentation de l’information. Mais aussi d’organisation de l’information, de réflexion et de « modification de la façon de représenter les idées ». Et enfin le single sourcing, sur le principe d’un document unique mais disponible sous plusieurs formats et donc rendu accessible à tous. « Il faut se détacher du format ‘à la sauvage’ du traitement de texte Word avec son faux standard XML ». Pour cela, il existe des solutions reconnues, comme RoboHelp (manuel papier et aide en ligne) ou FrameMaker (création et publication XML) d’Adobe-Macromedia, des outils qui commencent à être compris par l’entreprise et le grand public. Des outils qui permettent d’éditer un document unique sous des formats vraiment universels, comme du pur XML, HTML, PDF, ou même CHM (Compiled HTML), format développé par Microsoft. Quel avenir pour les « vulgarisateurs techniques » ? « Le marché est très demandeur. Il y a encore tellement de projets informatiques où les gens n’arrivent pas à communiquer ! ». Pour en savoir plus, le site VBC.com L’exemple de PSA , Peugeot Citroën)

L’exemple de la formation des soudeurs automobiles – encore un métier en pleine mutation avec l’omniprésence des outils informatiques – du groupe PSA Peugeot-Citroën est significatif du rôle du vulgarisateur technique. Pour un logiciel propriétaire appliqué à la soudure automobile chez PSA, Vincent Bertin a restructuré une documentation technique globale puis supervisé la formation de 200 soudeurs dans cinq pays (France, Espagne, Grande-Bretagne, Brésil et Chine), en 3 langues (français, anglais et espagnol). « Chaque contenu de la formation était modelé en fonction des caractéristiques propres de chaque pays et du rôle des sites de production au sein du groupe PSA. Au niveau pédagogique, cet accompagnement était riche : beaucoup de personnes ne connaissaient pas ou peu l’environnement informatique. Entre 2 et 5 jours, ils ont pu comprendre les fondaments théoriques de ce logiciel, en mode client serveur construit sur une base de données Oracle, et surtout reprendre leur c?ur métier : la soudure, sur cette nouvelle interface informatique ».