Yahoo : Microsoft jette l'éponge, pour le moment ?

Malgré un rehaussement de son offre, Redmond renonce mais pourrait reculer pour mieux sauter

Microsoft ne mettra pas la main sur Yahoo. En tout cas pour le moment. Ce samedi, le premier éditeur mondial de logiciels a officiellement retiré son offre sur son compatriote Yahoo. C’est une surprise : Microsoft tenait énormément à cette acquisition pour rattraper le retard qu’il a sur le Web face à Google. Malgré sa puissance de feu, Microsoft échoue dans cette opération stratégique.

Microsoft a pourtant mis les moyens. Après le énième refus de Yahoo il y a une semaine, Redmond s’est résolu à rehausser son offre, alors qu’il s’était juré de ne pas en arriver là. Ce samedi, le groupe a ainsi proposé 33 dollars par action Yahoo contre 31 dollars initialement annoncé le 31 janvier, soit un montant total de 47,5 milliards de dollars (30,8 milliards d’euros).

Insuffisant pour le portail qui exige 37 dollars par action, selon Steve Ballmer, p-dg de Microsoft.

« En dépit de nos meilleurs efforts, y compris le relèvement de notre offre d’environ cinq milliards de dollars, Yahoo! n’a pas montré sa volonté d’accepter notre offre », a-t-il écrit dans une lettre à son homologue Jerry Yang. « Après un examen minutieux, nous estimons que les exigences financières de Yahoo ne sont pas raisonnables pour nous et qu’il est dans le meilleur intérêt des actionnaires, des employés et des autres détenteurs de parts de Microsoft de retirer notre proposition », a ajouté Ballmer.

Seconde surprise : Microsoft renonce à lancer une OPA hostile. Depuis le lancement de son offre, le groupe avait toujours indiqué qu’il solliciterait directement les actionnaires de Yahoo (traduction : en lançant une OPA hostile) afin de faire plier la direction. Nous avons proposé beaucoup d’argent. Si son conseil d’administration pense que c’est équitable, parfait. Dans le cas contraire nous irons de l’avant », a récemment déclaré Steve Ballmer.Mais visiblement, ses plans ont changé, Yahoo est décidément trop gourmand.

Une nouvelle offre lundi ?

Reste que Microsoft perd beaucoup dans cette histoire. Le rachat de Yahoo aurait créé un challenger de poids à Google dans la recherche mais aussi et surtout dans le très juteux secteur de la pub en ligne (40 milliards de dollars en 2007) où Yahoo est numéro deux.

Microsoft y a multiplié les acquisitions mais l’ajout de l’offre Yahoo à son arsenal aurait pu lui permettre de peser face à Google qui s’est emparé de DoubleClick. Il faut savoir que Google encaisse environ un tiers des recettes mondiales de publicité en ligne, loin devant Yahoo qui en empoche moins de 15% et Microsoft (7%).

Microsoft se voit donc fragilisé et devra trouver de nouveaux alliés (comme AOL qui est en discussions avec… Yahoo). Mais que dire de Yahoo ? Après le retrait de l’OPA, le cours du portail devrait fortement chuter en bourse dès ce lundi. Et certains estiment déjà que cette chute pourrait permettre à Microsoft de reformuler une offre, plus basse et emporter le lot.

Car certains actionnaires de Yahoo se posent des questions. La dernière offre de Microsoft paraissait pour beaucoup raisonnable et Yahoo affiche encore des performances financières loin de celles de Google.

A l’heure actuelle, Yahoo reste donc une cible facile. Si Microsoft revient à la charge après une nouvelle correction du cours de l’action, Yahoo devra avancer une alternative.

« Maintenant que nous ne sommes plus distraits par l’offre non sollicitée de Microsoft, nous allons être en mesure de concentrer toute notre énergie à la réalisation de la transition la plus importante de notre histoire », a déclaré Jerry Yang dans le communiqué.

Le groupe discute en effet depuis des semaines avec AOL (Time Warner) mais rien de concret n’en est sorti. Yahoo mène également un test d’alliance publicitaire avec Google, mais une telle association est mal perçue par les autorités anti-trust américaines.

Bref, si Microsoft semble baisser les bras, Yahoo est loin d’être sorti d’affaire.